Grand Dijon : quelle place tient le vélo dans l’agglomération dijonnaise ?

Le Grand Dijon souhaite passer de 3 à 10% de cyclistes dans l’agglomération d’ici 2020. Cet objectif est-il atteignable ? Quels sont les aménagements qui encouragent la pratique du vélo dans l'agglomération dijonnaise ? Voici un état des lieux en huit points.

Qu’est-ce qui a déjà été mis en place pour encourager la pratique du vélo ? Qu’est-ce qui vaudrait le coup d’être développé pour faire passer la place des cycles de 3 à 10% dans le Grand Dijon d'ici 2020 ?

Loin d’avoir atteint, ni même approché, les 10%, l’agglomération dijonnaise emploie différents moyens afin de parvenir à ces chiffres. L’association EVAD (ensemble à vélo dans l’agglomération dijonnaise) est, quant à elle, un peu plus pessimiste. Elle déplore le manque de dispositifs mis en place malgré les nettes avancées en terme d’incitation au vélo : "si on est à 4% on aura déjà pas mal progressé. On attend les résultats de l’enquête pour 2015 mais je ne pense pas que l’agglomération dijonnaise atteindra ce qu’elle s’est fixé pour 2020. Il y a des choses qui sont faites mais ce n’est pas à la hauteur des ambitions affichées" a indiqué Christian Germain, le président de l’association EVAD.



Le Grand Dijon n’a pas répondu à nos sollicitations mais nous nous sommes procuré le bilan 2014 de l'Observatoire des mobilités actives afin de faire un état des lieux des aménagements en faveur du vélo. Nous avons mis ces données chiffrées face aux propos tenus par Christian Germain, président d’EVAD et Agnès Carbon, co-présidente, que nous avons rencontrés.



1 - Un réseau cyclable qui s’est largement étendu

Dans l’édition 2015 de l'Observatoire des mobilités actives, le Grand Dijon indique que la longueur totale d’aménagements cyclables est de 422 km, soit l’équivalent d’un Dijon-Avignon en voiture.

Parmi ces 422 km, il faut distinguer deux types d’aménagements :
  • ceux hors voirie (chemins accessibles aux vélos, voies vertes, pistes cyclables qui ne longent pas une route…) : 141 km
  • ceux sur la voirie : 281 km
Dans les 281 km d’aménagements cyclables sur route, il est important de relever que l’enquête prend en compte dans son calcul les zones 30. Même celles qui ne comportent aucun aménagement pour les cyclistes et qui représentent 149 km sur les 422 revendiqués par le Grand Dijon



Les aménagements en faveur des cyclistes ont fait un bond entre 2012 et 2014 (+12%) comparé à ceux pour les automobilistes (+2%). A noter que la plus forte progression concerne les fameuses zones 30 sans aménagement spécifique pour les vélos (+40 km entre 2012 et 2014) alors que les bandes et pistes cyclables ont légèrement diminué.


De manière générale, les dirigeants de l’association EVAD sont plutôt satisfaits de l’évolution des aménagements en faveur des cyclistes, notamment suite à la création du tramway en 2012. "Maintenant on peut circuler sur certains axes tranquillement à vélo, ce qui n’était pas le cas auparavant" déclare Agnès Carbon.

Malgré tout, Agnès Carbon et Christian Germain savent qu’il y a encore beaucoup d’actions à mettre en place pour que les trajets à vélo représentent 10% des déplacements. Potentiellement, la ville indique qu’elle peut encore aménager plus de 1000 km de piste cyclable, bande cyclable, zone 30 ou autre espace en faveur des vélos.



2 - "Un réseau en toile d’araignée serait plus efficace"

Les réseaux les plus efficaces pour les vélos sont ceux construits de manière circulaire, à l’image du réseau cyclable de Copenhague, la capitale européenne du vélo. Ce type de réseau permet de couvrir un maximum de territoire.


Selon les dirigeants d’EVAD, il faudrait simplifier le réseau dijonnais afin qu’il soit plus pratique et cohérent : "il manque de liaisons dans le centre-ville (des liaisons radiales) et surtout entre les communes de l’agglomération (le réseau circulaire qui en est au stade embryonnaire)". Nombreux sont les itinéraires qui s’interrompent et n’offrent pas une continuité dans les trajets à vélo.

Pour Agnès Carbon et Christian Germain, l’enjeu est d’offrir la possibilité aux cyclistes d’effectuer un trajet le plus direct possible : "il faudrait mettre en place de vrais itinéraires. Par exemple de Chenôve à Longvic, il n’y a aucun moyen de relier les deux de manière directe, sauf de passer par le canal".


Mais comme toute ville qui se développe, le réseau ne peut pas se former en claquant des doigts. Cela demande du temps. Il y a déjà des tronçons, reste encore à les relier entre eux. Une réalisation dont doute Christian Germain : "on nous l’a dit explicitement, il n’y aura plus de gros investissement en matière d’aménagement cyclable au niveau du développement du réseau".



3 - Les services de vélo en concurrence ?

Il existe deux types de services de vélos dans l’agglomération de Dijon : Velodi et DiviaVélo.

Le premier s’adresse à des cyclistes occasionnels tandis que le deuxième est plutôt dédié aux locations de longue durée. Velodi a été lancé en 2007. 400 vélos sont à disposition de tous, dans 40 stations différentes. Selon l’Observatoire des mobilités actives, il y aurait 1 velodi pour 390 habitants. Le nombre d’abonnés a augmenté : il est passé de 3000 en 2009 à plus de 5000 en 2014.


Mis en place 4 ans après les velodi, la flotte Divia est constituée de 800 vélos. Les abonnements ont quasiment triplé : un an après son démarrage, on recensait 363 abonnés, en 2014 ils étaient plus de 1000.

Si le nombre d’utilisateurs a augmenté pour les deux services, les chiffres restent faibles. "Ces services ont eu un rôle incitateur et ont modernisé l’image du vélo", reconnaît le président de l’association EVAD. Maisils ne rencontrent pas un très grand succès : "c’est une niche, ça répond à un besoin mais ce n’est pas la solution miracle".



4 - Stationner son vélo et le faire réparer

Il y a deux types de parcs où il est possible de stationner son vélo : les privés et les publics. Si les parcs privés ne sont pas recensés, le Grand Dijon dénombre, en 2014, 2630 arceaux à vélos dans l'espace public. C’est 230 de plus qu’en 2012. Cela représente un arceau pour 100 habitants, soit deux places potentielles. Suite aux travaux effectués sur le campus universitaire, 80 arceaux supplémentaires auraient été implantés en 2015.


En 2013-2014, la communauté urbaine du Grand Dijon a installé 7 nouveaux parcs, les "VéloStation". L’accès est gratuit pour les abonnés Divia (annuel, illico et Diviavelo) et n’est vraiment pas cher pour les autres (1 euro par mois ou 10 euros par an). En 2015, la VéloStation de la gare de Dijon a été intégrée à l’ensemble du réseau et deux autres stations ont été créées. Ainsi, à ce jour, on dénombre 10 VéloStation, au total, dans l’agglomération.


Le Grand Dijon annonce qu’à chaque VéloStation il est possible d’effectuer des révisions et petites réparations grâce à la présence ponctuelle d’un technicien de La bécane à Jules. Les dirigeants d’EVAD restent sceptiques. Selon eux, il est très rare d’y voir un technicien. L’idée est bien pensée mais il faudrait l’élargir à des endroits stratégiques, proches de nœuds de transports en commun par exemple.


5 - L'insécurité est-elle un frein à la pratique ?

En 2012, il y a eu huit blessés à vélo dans l'agglomération dijonnaise. En 2014, quatre. Un mort est à déplorer en 2013. La majorité des accidents de cyclistes en 2014 ont eu lieu en zone urbaine et se produisent par collision à des intersections.


Le vélo est nettement moins accidentogène que les véhicules motorisés. Trois conducteurs (moto, voiture, cyclomoteur, scooter) ont été tués en 2012, puis deux en 2013 et enfin six en 2014 dans l’agglomération dijonnaise. Chaque année entre 2012 et 2014, la ville a recensé une centaine d’automobilistes blessés lors d’un accident.

Si les chiffres montrent bien que le vélo est potentiellement moins dangereux que la voiture, l’un des freins à la pratique du vélo est la peur. C’est même l’un des premiers freins à l’usage du vélo nous certifie le président de l’association EVAD. Pour dépasser cette crainte, l’association propose de nombreuses animations (accompagnement individuel ou en groupe, séance de velo-école, rencontres-débats…).




6 - Augmenter la superficie des zones 30 pour faire face aux réticences ?

Les zones 30 ont deux fonctions :
  • sécuriser l’espace public en donnant davantage de place aux piétons, cyclistes et autres utilisateurs d'engins en tout genre (trottinette, rollers, skateboard...)
  • diminuer la pollution de l'air et la pollution sonore engendrées par le trafic rapide
Les zones 30 représentent 60% des aménagements cyclables sur voirie. Elles sont plutôt bien perçues par Agnès Carbon et Christian Germain : "là où la vitesse est limitée à 30 et respectée, il n’y a pas besoin d’aménagement spécifique. Les vélos peuvent cohabiter avec les véhicules." Cependant, ils estiment que les zones 30 sont encore trop parsemées ici et là dans l’agglomération : "la ville répond au coup par coup mais on ne voit pas de politique globale". Pour eux, il faudrait étendre les zones 30 à l'ensemble de l'agglomération afin que cela soit plus clair pour tous, automobilistes comme cyclistes.


Étendre les espaces dits de "zone 30" serait l’une des clés pour (re)mettre davantage de personnes en selle. "Quand vous êtes frôlé à 50, ce n’est pas la même sensation que lorsque vous êtes frôlé à 30" constate Agnès Carbon.


7 - L’indemnité kilométrique vélo (IKV) : "la mayonnaise ne prend pas"

L'indemnité kilométrique vélo (IKV) a pour objectif d’inciter les salariés à se rendre au travail à vélo. Les entreprises volontaires ont la possibilité de reverser 25 centimes d’euros par km à leurs salariés qui se rendent à vélo sur leur lieu de travail.

En 2014, deux entreprises bourguignonnes s’étaient portées volontaires pour expérimenter le projet du ministère de l’Ecologie : la CAF à Auxerre et Premice à Dijon (quatre salariés). Les résultats de l’expérimentation ont été assez concluants mais n’ont apparemment pas poussé ces entreprises à mettre en place cette IKV, applicable depuis février 2016.



EVAD offre une prestation gratuite aux trois premières entreprises qui voudraient mettre en œuvre cette incitation à l’usage du vélo. Seulement, l’association n’a reçu aucune demande d’entreprise jusqu'ici. Selon elle, certaines conditions peuvent freiner les sociétés :
  • l’IKV est limitée au secteur privé
  • l'employeur n'est pas obligé de l'appliquer
  • l’IKV est exonérée de cotisations sociales (pour l’employeur) et d’imposition sur le revenu (pour le salarié) dans la limite d’un plafond annuel de 200 euros
  • le cumul de l’IKV avec la prise en charge de l’abonnement aux transports en commun est possible uniquement lorsque les abonnements de transports collectifs ne permettent pas d’effectuer un trajet ou une portion de trajet
A ce jour, l'Observatoire de l'indemnité kilométrique dénombre 13 entreprises dans toute la France qui ont mis en place cette indemnisation :
Force est de constater que ce sont surtout des structures qui ont un rapport direct (6) ou indirect avec le vélo (3) qui ont mis en place l'IKV . C'est le cas par exemple de boutiques de cycles ou d'associations qui travaillent dans le domaine de l'environnement.

Le potentiel des salariés concernés dans l’agglomération de Dijon est de 10 000 personnes. "On aimerait bien qu’il y ait une entreprise sur le Grand Dijon. Si elle se manifeste on est prêt à la mettre en valeur" déclare Christian Germain. Selon le président, le Grand Dijon avait prévu de mettre en place une indemnité pour ses propres agents sauf que cela n'est pas possible : l'IKV ne s'applique pas à la fonction publique. 



8 - Que faire pour sensibiliser les habitants de l'agglomération à l’utilisation du vélo ?

Changer un mode de pratique, c’est changer un comportement, des habitudes. Et qui dit changement d’habitudes dit évolution des mentalités. Au-delà des aménagements en faveur des cyclistes, l’enjeu est d’amener chacun à penser autrement. Pour ce faire, l’une des actions primordiales à mener est la communication. Selon Agnès Carbon et Christian Germain, les points essentiels sur lesquels il faut communiquer sont les enjeux écologiques, environnementaux et de la santé.

La ville peut compter sur les associations (EVAD, La bécane à Jules, La rustine) qui relayent des nouveautés ou des événements se rapportant au vélo.


L’un des points capitaux selon les dirigeants d’EVAD est de rendre le vélo plus concurrentiel que les autres moyens de déplacement, notamment la voiture. Pour eux, le vélo doit devenir un moyen de se déplacer plus rapidement que la voiture, ce qui n’est pas encore le cas : "par exemple, sur le rond-point Saint-Exupéry, il y a une piste cyclable tout autour, c’est très bien. Sauf qu’il faut au moins 20 minutes pour faire le tour, car il faut s’arrêter à chaque intersection."

L’enjeu n’est pas non plus de rendre Dijon difficilement accessible aux voitures mais de trouver une juste mesure qui permet de partager les espaces entre les différents moyens de transports sans en avantager un plus qu’un autre.

Enfin, les manifestations organisées dans Dijon sont aussi un bon moyen pour communiquer sur la pratique du vélo. Le Vélo Tour en est un exemple. L’événement propose de découvrir autrement la ville de Dijon. Une balade insolite, à vélo, passant par des sites habituellement interdits au public, est proposée aux participants. Il existe d’autres types d'événements qui mettent en valeur le vélo : les bourses aux vélos, la fête du vélo, les concours et challenges (Au travail sans ma voiture)…

 

Grand Dijon : les déplacements à pied, à vélo, en trottinette...
En septembre 2012, le Grand Dijon a voté le PDU (plan de développement urbain) 2012-2020.

Parmi les nombreuses réflexions des élus figure celle des déplacements dans l'agglomération dijonnaise. L'objectif majeur de ce rapport est de faire évoluer les modes de déplacements actifs dans l’agglomération dijonnaise, c'est à dire les déplacements à pied, à vélo, en trottinette...

Les élus du Grand Dijon souhaitent faire progresser l'ensemble de ces déplacements de 31 à 40%. L’augmentation la plus importante concerne le vélo. L’objectif est de faire passer la part du vélo de 3 à 10% et celle de la marche à pied de 28 à 30%.
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