Ouvert depuis plus de 100 ans, ce temple du cinéma risque de fermer après un été catastrophique

L'Eldorado est en redressement judiciaire après avoir vu sa fréquentation chuter durant l'été. Ouvert en 1920, le cinéma d'art et d'essai dijonnais traîne une dette de 300 000 euros. Il va devoir se serrer la ceinture et retrouver l'équilibre, au risque de fermer ses portes d'ici un an.

Des cinémas centenaires, il n'en court pas les rues. Alors quand l'un d'eux est menacé de disparition, c'est forcément un drame pour tous les amateurs de salles obscures. "L'Eldo", comme l'appellent affectueusement les Dijonnais, fait partie du patrimoine de la Cité des ducs. Pas uniquement pour sa façade Art déco aux lettres d'or, inscrite à l'inventaire supplémentaire des Monuments historiques depuis 1986.

Depuis des dizaines d'années, critiques, historiens et réalisateurs  s'y succèdent pour rencontrer le public. En janvier 1988, le légendaire Jean-Luc Godard vient présenter un film à sketchs dans lequel Jane Birkin et les Rita Mitsouko figurent au générique. La venue du cinéaste franco-suisse attire les foules, la salle est pleine à craquer. L'établissement se forge une réputation en programmant près de trois cents films d'art et d'essai par an.

Trente-six ans plus tard, le tableau est tout autre : le public se fait plus rare, à tel point que le scénario d'une fermeture est envisagé si le cinéma ne redresse pas la barre d'ici un an. En effet, l'établissement a demandé son placement en redressement judiciaire la fin août. Demande acceptée par le tribunal de commerce. Avec, pour conséquence principale, de geler 300 000 euros de dettes sur une période de six mois renouvelable. 

Une année sans film d'art et d'essai porteur

"On n'a jamais connu un été aussi bas, avec trois fois moins de spectateurs que les autres années", déplore Matthias Chouquer, le directeur de l'établissement. "On a préféré prendre les devants pour avoir une chance de préserver ce lieu. On fera tout pour le sauver".

Première cause de cette désertion selon le gérant : l'absence de sorties de film d'art et d'essai populaires comme avait pu l'être Anatomie d'une chute en 2023. Mais d'après lui, la concurrence des autres cinémas dijonnais explique en grande partie la chute des entrées.

Le Pathé de la Cité de la Gastronomie capte beaucoup trop facilement les titres porteurs du cinéma d’art et d’essai. Même chose pour le Darcy, programmé par le groupe MC4. En tant qu’indépendant, on a beaucoup moins de puissance de frappe que ces deux groupes

Matthias Chouquer

directeur de l’Eldorado

Plan d'économie et appel aux dons

“C’est vraiment l’endroit où on voit des films qui font réfléchir”, s'inquiète une habituée des trois salles obscures de l'établissement. Des grands-parents qui fréquentent assidûment l'établissement redoutent eux aussi la disparition d'une programmation atypique, à destination d'un jeune public. "Nos petits-enfants ont découvert un cinéma qu’ils ne voyaient pas chez eux à la télé", confie un Dijonnais fidèle des lieux. "On peut acheter des affiches aussi pour décorer des chambres", rappelle une spectatrice à ses côtés.

Pour retrouver le chemin de la rentabilité, le cinéma va devoir se serrer la ceinture. Côté masse salariale, le CDD du programmateur animateur ne sera pas renouvelé et l'équipe du cinéma passera bientôt de six à quatre employés. La programmation papier va désormais s'étaler sur un moins contre une quinzaine de jours jusqu'ici.

Une contribution du public est également attendue. Une association sera prochainement créée pour recueillir des dons et recruter des bénévoles. "L'idée est de nous aider à tous les niveaux : la communication, l'organisation d'évènements, de festivals ou d'animations pour les enfants", détaille le directeur de l'Eldorado. Lancement prévu courant octobre. 

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