"Pas normal de pouvoir manger des kébabs à 4h du matin" ? : place de la République à Dijon, des commerçants partagés

Depuis fin septembre 2022, la sécurité de la place de la République a été renforcée par une présence policière supplémentaire et des agents de sécurité. Malgré ces renforts, des agressions violentes continuent de se dérouler au petit matin. Le préfet et le maire de Dijon veulent "reconquérir la place de la République".

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Le nouveau préfet de Côte-d'Or, Franck Robine, a annoncé lundi 7 novembre un plan d'actions pour "reconquérir la place de la République". Le Préfet, en poste depuis 3 semaines, a condamné fermement les récentes agressions commises, pour leur "extrême gravité" et "répétition".

Une réflexion sur les horaires d'ouverture de certains établissements de nuit

Depuis le mois de septembre 2022, une dizaine de faits et d'agressions se sont déroulés place de la République. Le maire de Dijon, François Rebsamen, présent aux côtés du Préfet lundi 7 novembre, a lui aussi souhaité "une meilleure régulation de la vie nocturne". Pour lui, "il n'est pas normal que l'on puisse manger des kebabs à 4h du matin".

Le maire affirme en effet que "les établissements qui s'apparentent à des restaurants - kebabs et autres - ne resteront pas ouverts après 1 ou 2 heures."


Les commerçants de la place de la République ouverts à la discussion

Les restaurants et bars de la Place de la République sont fédérés pour la plupart par l'Union des Commerçants du Quartier République. Son président, Christophe Sanchez, voit "un problème de surveillance de la Place entre minuit et 5 heures du matin. Il y a plus de points de crispation à ce moment-là."

Christophe Sanchez explique le fonctionnement actuel des établissements de nuit du quartier République : "Chaque établissement essaie de faire de son mieux, avec sa propre vigilance, mais personne ne peut sortir de son point de commerce. La difficulté est d'intervenir devant chez eux, mais pas au-delà de leurs propres limites."

Le Président de l'Association de Commerçants relaie l'idée d'avoir quasiment une base policière sur la place : "Ce que proposent le Préfet et le Maire, on est bien entendu d'accord, de faire plus attention à cette place, qui devient un point d'ancrage. L'idée est d'avoir un point central autour de la place de la République."

L'autre problème pointé du doigt serait celui des commerces de nuit qui vendent des alcools, "des épiceries de nuit" qui ont "prioritairement" dans leurs rayons "de l'alcool". Mais un arrêté municipal a interdit la vente d'alcool après 21h : "On s'est aperçus qu'il y avait moins de difficultés. Les commerces de nuit l'ont très mal pris. On a vu une réelle différence."

"Je ne m'attendais pas à une telle évolution"

Le restaurant et bar "Au Bureau" est installé depuis 5 ans place de la République, dans les locaux d'un ancien cinéma connu des Dijonnais, l'Alhambra. Selon son directeur, la présence policière depuis fin septembre a permis "de calmer un peu les choses sur la Place", au moins "jusqu'à une certaine heure".

Depuis 5 ans, les agressions sont devenues plus violentes

Richard, gérant du restaurant-bar "Au Bureau"

La place de la République a toujours été à Dijon un lieu privilégié pour les sorties nocturnes, "on ne peut pas non plus tout arrêter à deux heures du matin", argumente le gérant. "C'est pas nouveau, il y a déjà eu des agressions, les gens sont alcoolisés, ça peut vite déraper. Mais ce que je constate, c'est que depuis 5 ans, les agressions sont maintenant devenues plus violentes. Je ne m'attendais pas à une telle évolution."

A l'opposé de la place, un autre restaurant, "Pick & Roll", tenu par Alain de Senne. Ce dernier s'estime "un peu moins impacté dans cette zone de la place." Mais il demeure préoccupé par l'insécurité : "Ce qui m'inquiète, pour les restaurants qui ferment tard comme le mien, c'est qu'on peut se faire repérer. Je suis toujours sur le qui-vive."
Et lorsqu'on évoque l'attractivité de la place, le patron nantais de "Pick & Roll" pense "que cela a un impact sur la fréquentation."

Les restaurations de nuit dans le collimateur

Déjà, lors d'une réunion en septembre, la question des restaurations de nuit toujours ouvertes au moment des sorties des discothèques avait été évoquée entre la municipalité, les services de police et l'Association des commerçants République : "Ces commerces donnent des points de chute aux petits malfrats qui veulent jouer sur des gens un peu alcoolisés, fragilisés. Qui veulent venir en groupe pour agresser des gens qui sortent de boîte de nuit ou de fête."

Quelques établissements de restauration rapide, à proximité immédiate la place de la République, sont effectivement ouverts jusqu'à 5 heures du matin, les vendredis et samedis principalement.
Nous avons essayé de discuter avec les gérants de ces établissements. Certains n'ont pas donné suite à notre sollicitation, d'autres étaient absents au moment du reportage.

Alors est-ce une bonne idée que de vouloir restreindre les horaires d'ouverture des commerces de bouche proches de la place ? Christophe Sanchez ne s'y oppose pas, mais privilégie le dialogue : "Nous, en tant que commerçants, on comprend le maire et le préfet quand ils dénoncent des restrictions. On commence à se dire malheureusement que la Place de la République à Dijon, c'est un peu dangereux. C'est quand même incroyable d'imaginer ça, à Dijon ! Plus on aura des réunions entre commerçants, habitants et la collectivité, mieux ce sera, c'est comme cela qu'on arrivera à rendre cette place plus sécurisée."

Qu'en pensent les gérants des établissements de nuit ?

Le "Smart", situé rue Marceau, à quelques dizaines de mètres de la place de la République, est un restaurant qui est aussi établissement de nuit, avec la possibilité d'ouvrir jusqu'à 5 heures du matin. Pour la co-gérante, Annick Gaudin, "Il y a un sentiment d'insécurité sur la place, déjà la journée. Des gens traînent sur la place et s'alcoolisent. Mais ce n'est pas eux qui sont responsables des violences la nuit."

L'idée d'une fermeture anticipée de la restauration de nuit "ne changerait rien. Après tout, ça leur fait du bien de manger un bout car ils sont alcoolisés. Ce n'est pas sur ces commerces qu'il y a des problèmes, c'est sur les épiceries de nuit et les bars qui ne respectent pas les horaires de fermeture."

Pour le patron du bar "le Byron Bay", il faudrait que les restaurateurs prennent en charge les abords de leur commerce, à l'image des établissements de nuit possédant des vigiles : "je pense qu'il y a des problèmes parce qu'ils se retrouvent avec beaucoup de gens devant chez eux, ils ne s'occupent pas de l'extérieur. La gestion de nos clients, on le fait, au moment de la fermeture, on évacue les gens tranquillement, ça se passe plutôt bien devant les établissements."

Des pistes possibles pour reconquérir la place

Alain, le patron du "Pick & Roll", en est convaincu : il faut occuper la place. "L'idée, c'est : remettez des événements publics, des braderies, des choses pendant la fête de la musique par exemple. Redonnez l'espace public. Il faut qu'on réinvestisse la Place avec des évènements publics, festifs, pour que ces gens-là se sentent dérangés le plus souvent possible. Mettez la place en valeur, avec des boutiques fixes, pour redonner vie à cet endroit."

Même idée partagée par le patron du "Bureau" : "il faut refaire des événements sur la place, montrer qu'elle sert à quelque chose !"

Depuis fin juillet, des mesures mises en place par la Collectivité

La Préfecture de Côte-d'Or avait le 22 juillet, à la suite de "violences graves provenant d'individus ivres", mis en place un arrêté interdisant la consommation d'alcool sur la voie publique de 14h à 6h du matin.

La première adjointe au maire, Nathalie Koenders (PS), rappelait que deux autres arrêtés municipaux existaient :  le premier interdisant la vente d’alcool à emporter à partir de 21 heures, "pour éviter les regroupements", et le deuxième fermant les épiceries de nuit de minuit à 6 heures du matin.

En complément de ces mesures, une présence policière accrue : la Police Municipale présente jusqu'à 3 heures du matin, et rondes de la Police Nationale. 

Depuis le 20 septembre, des gardiens privés avec des chiens surveillent les demi-lunes de la Place de la République, en prévention.

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