En Bourgogne, l'INRAE (institut de recherches pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement) expérimente le "zéro pesticide" sur son unité de Bretenière (Côte-d'Or). Mais le chemin est encore long.
C'est un sujet d'actualité brûlant : une agriculture sans pesticide, sans herbicide ni labour est-elle possible ? Au salon de l'agriculture 2023, nous avons posé la question à Nathalie Munier-Jolain, présidente du centre INRAE de Bourgogne-Franche-Comté. Ce dernier expérimente le "zéro intrant" sur son unité expérimentale de 120 hectares à Bretenière (Côte-d'Or), à une quinzaine de kilomètres de Dijon.
Quatre dispositifs-tests à côté de Dijon
Sur cette ferme expérimentale de Bretenière, "nous testons quatre dispositifs en "zéro pesticide", explique Nathalie Munier-Jolain. L'INRAE en teste certains qui incluent du labour, du travail du sol, et d'autres qui se passent totalement ou partiellement de labour. L'intérêt : éviter d'abîmer les sols par le labour, tout en évitant les pesticides et herbicides.
Le principe est celui de l'agroécologie, qui vise à "réintroduire de la biodiversité dans les agrosystèmes et bénéficier de toutes les régulations qui vont en découler et se mettre en place, entre ces sources de biodiversité", détaille la présidente de l'INRAE Bourgogne-Franche-Comté. Par exemple, le fait de se passer de pesticides peut faire revenir des insectes ravageurs sur les cultures, mais également des insectes carnivores qui vont chasser ces ravageurs. Ainsi, l'écosystème se régule de lui-même.
"Ne pas trouver des solutions simplistes"
Depuis 2018, les scientifiques de l'INRAE observent les résultats sur leurs quatre parcelles expérimentales à Bretenière. Le constat est mitigé, selon Nathalie Munier-Jolain.
"Sur les dispositifs avec travail du sol, on arrive à se passer des pesticides. Il est plus facile d'arriver à des résultats satisfaisants, agronomiquement et économiquement parlant."
"Mais sur les systèmes sans travail du sol, il est beaucoup plus compliqué de se passer totalement de l'usage des pesticides, y compris du glyphosate."
Nathalie Munier-Jolain
"Pour le moment, sur le système où vraiment il n'y a aucun travail du sol, la situation reste très compliquée." Charge donc, désormais, à l'INRAE de reconcevoir ces systèmes pour trouver une solution : c'est la prochaine étape du processus. Pour autant, certains agriculteurs parviennent déjà à se passer de labour et de pesticides : c'est le cas de ce cultivateur bio de Haute-Saône, Daniel Paulien, que nous avions rencontré en 2020 sur son exploitation.
Mais ces solutions trouvées localement peuvent-elles être généralisées à toute une filière ? C'est le but des recherches menées par les organismes comme l'INRAE. "La recherche est là pour travailler sur des systèmes en rupture", appuie Nathalie Munier-Jolain."Forcément, il y a des échecs et puis il y a des réussites, mais on apprend toujours de nos échecs."
L'essentiel, selon la présidente de l'INRAE Bourgogne-Franche-Comté : "c'est très important, pour la recherche, de ne pas trouver des solutions qui seraient simplistes".
POUR ALLER PLUS LOIN : Le reportage France 3 à Bretenière en 2018, lors du lancement de l'expérimentation de l'INRAE