Payer son repas du midi avec son chéquier de tickets-restaurant peut parfois devenir un vrai défi. Certaines enseignes refusent désormais ce moyen de paiement. Lourdeur administrative, perte de temps, coût de l’envoi… À Dijon, de plus en plus de commerçants sont découragés.
Il y a ceux qui s’en accommodent. Le ticket-restaurant version papier, utilisable sans contrainte horaire et facilement distribuable à un proche, représente encore 40% des titres émis aux salariés, selon la Commission nationale des titres restaurant (CNTR). Et il y a ceux qui n’en veulent plus. Les restaurateurs, notamment. Le petit ticket détachable est devenu une vraie charge pour certains, au point de les refuser.
Un changement d'organisation qui ne passe pas
Dans le centre-ville de Dijon (Côte-d’Or), à la Menuiserie, "on ne s’est pas posé la question", lorsque la Centrale de règlement des titres (CRT) a fermé, fin février 2023. L’organisme récoltait et triait les titres, envoyés par les restaurateurs depuis un point de collecte. "Avant, on déposait tout à côté, à Metro, en même temps qu’on se ravitaillait en fournitures, une fois par semaine", détaille Antoine Barré Foncelle, le gérant de la Menuiserie.
Désormais, tout est à la charge des restaurateurs, qui doivent trier, commander les enveloppes, remplir les bordereaux pour chacun des quatre émetteurs de titres, et aller à la Poste. Un processus trop long pour beaucoup, mais surtout coûteux, puisque l’envoi sécurisé est à leurs frais. "Ça a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase", admet le gérant. D’autant que l’année dernière, les tickets-restaurant support papier représentaient moins de 3% de son chiffre d’affaires.
"Les tickets-restaurant version papier, c'était trop compliqué à gérer pour un pourcentage dérisoire de notre chiffre d'affaires"
Antoine Barré Foncelle, gérant de la Menuiserie
Un peu plus loin, chez Monique, boire et manger, plus possible non plus de régler l’addition avec ses tickets papier. Là aussi, la décision fut prise après la disparition de la CRT. Victor Blatrix, le chef de salle, ne regrette pas : "C’est surtout une histoire de temps. À l’encaissement, on va beaucoup plus vite, ça nous évite de faire les calculs, rentrer les tickets. C’est beaucoup plus confortable quand je suis seul en salle et que je dois faire les cafés, apporter les desserts…".
Trous dans la trésorerie
Face à l’essor de la carte ticket-restaurant, le support papier ne fait plus le poids. La majorité de la clientèle d’affaires, surtout le midi donc, règle par carte. Celle-ci applique des commissions, environ 6% selon les émetteurs. Mais elle présente aussi un avantage de taille pour les restaurateurs : un remboursement quasi-instantané, contrairement à son homologue papier. "Avec les tickets physiques, un taux de commission s’applique pour être remboursé rapidement. Sous 3 à 5 jours, c’est 4,75% du montant à régler, 4% pour 7 jours", détaille l’UMIH de Côte-d’Or. Les délais de remboursement peuvent grimper jusqu’à 21 jours. De quoi décourager les établissements les plus fragiles, qui ne peuvent pas toujours se permettre un trou dans la trésorerie.
Pour ceux qui continuent, c’est parfois laborieux. Près des halles de Dijon, la plupart des établissements acceptent toujours les tickets-restaurant papier, par peur de perdre la clientèle de la pause méridienne. Mêmes si certains murmurent avoir "hâte que ça s’arrête". A la Menuiserie, on n’a pas vu d’impact sur la clientèle depuis la décision de refuser les tickets-restaurant papier : "On nous demande encore quasiment tous les midis si on les prend, mais quand on explique, les clients comprennent". L’UMIH de Côte-d’Or rappelle que chaque établissement peut refuser un moyen de paiement, si elle en informe ses clients. La disparition du ticket restaurant papier n’est pour l’instant pas prévue, malgré la généralisation du ticket dématérialisé.