La crise sanitaire du Covid-19 continue à tout bouleverser. Les vendanges devraient débuter mi-août, mais les viticulteurs peinent à recruter, car la main d'oeuvre étrangère risque de faire défaut. Tout est donc mis en œuvre pour séduire les étudiants.
Dans les vignes de Côte-d’Or, les vendanges s’annoncent précoces.
Déjà, les raisins commencent à changer de couleur : les grains verts prennent peu à peu une couleur rouge violet. Il faudrait juste quelques gouttes de pluie pour que tout soit parfait et si ça continue comme ça, le millésime 2020 promet d’être exceptionnel.
Si la météo est avec eux, en revanche la crise sanitaire inquiète les viticulteurs : arriveront-ils à trouver sufffisamment de vendangeurs pour cueillir les raisins au bon moment ?
"Pour les vendanges en Bourgogne, on a besoin de 40 000 personnes", explique Thiébault Huber, président de la CAVB (Confédération des appellations et des vignerons de Bourgogne).
"Sur ces 40 000 personnes, 18 000 sont des ressortissants européens qui viennent de Pologne, de Bulgarie, etc. Or, chaque pays a une attitude différente par rapport à la crise sanitaire du Covid-19. On a donc de grosses inquiétudes, car on ne sait pas si on va pouvoir compter sur ces 18 000 vendangeurs qui viennent chaque année en Bourgogne."
Face à cette situation exceptionnelle, les vignerons sont obligés de revoir leur organisation. "On espère beaucoup par rapport aux étudiants, car on est dans une année très précoce, on risque de vendanger au mois d'août. Comme les rentrées universitaires ne seront pas encore effectives, on espère attirer des jeunes", reconnaît le président de la CAVB.
Mais, "on entend qu’on reconfine ici et là et qu’une deuxième vague est possible. La situation évolue très rapidement. On se demande s’ils voudront bien venir travailler dans des équipes de 30 à 40 personnes pendant 10 jours."
Où loger le personnel en respectant la distanciation sociale ? Comment amener les vendangeurs dans les vignes en toute sécurité ? Où les faire manger ?
Ce sont quelques unes des questions qui agitent la profession en ce moment.
"On essaie de s’organiser avec les services de l’Etat. On a sorti un guide qu’on est en train d’affiner sur les mesures barrières à appliquer pendant les vendanges : mettre un masque dans les voitures quand on changera de parcelle, respecter une certaine distance entre les vendangeurs au moment des repas, limiter le nombre de personnes dans les dortoirs, mettre du gel hydroalcoolique à disposition…" détaille le président de la Confédération des appellations et des vignerons de Bourgogne.
Le logement fait partie des principaux points noirs.
Arnaud Dubreuil est propriétaire récoltant à Savigny-lès-Beaune, en Côte-d’Or. D’habitude, il héberge trois ou quatre saisonniers par chambre. Mais, cette année, ils ne seront que deux par chambre afin de garantir un espace plus grand entre chaque personne. Les autres devront se loger par eux-mêmes en s’installant chez des connaissances, au camping municipal…
Pour le travail, chacun aura son matériel qui lui sera remis au début des vendanges : un seau et un sécateur avec son nom marqué dessus. Tout sera nettoyé chaque soir. Arnaud Dubreuil a même commencé à faire des réserves de masques, de gel et de gants par crainte d’un rebond au moment des vendanges. "C’est une période très intense, on ne peut pas se permettre d’avoir un défaut de personnel à ce moment-là", dit-il.
Ce viticulteur de Côte-d’Or peut compter sur "un noyau d’habitués qui reviennent tous les ans". Les autres sont recrutés via Pôle emploi ou des annonces sur Le Bon coin. "Comme cette année, ça s’annonce compliqué, j’envisage de recourir à un prestataire de services, car c’est lui qui s’occupe de loger les gens et de les nourrir. Cela nous enlève une contrainte."
"On se pose beaucoup de questions. Est-ce que je vais mettre tous les vendangeurs en même temps dans la même parcelle ? Ou bien est-ce que je fais deux groupes pour limiter les risques, mais dans ce cas cela implique deux fois plus de logistique, par exemple pour organiser les casse-croûte à deux endroits différents."
Eviter la propagation du coronavirus à tout prix, c’est l’objectif numéro un. Même si "depuis qu’on a été confiné, on n’a pas eu de cas de malade ici. Il ne faut pas oublier qu’on est dehors et qu’on est séparé par les rangs de vigne. On n’a pas une proximité immédiate", rappelle le président de la Confédération des appellations et des vignerons de Bourgogne. "Ce qui m’inquiète le plus, c’est le buzz médiatique qu’il y a autour et qui peut faire peur aux gens."
En attendant, la priorité est au recrutement. "Le mois de juillet, c’est le moment où on constitue nos équipes de vendangeurs. On utilise beaucoup les réseaux sociaux comme Instagram ou Facebook pour essayer d’aller trouver les jeunes là où ils se trouvent. Car, c’est maintenant que ça se joue."