Cryptomonnaies : des millions d'euros investis par des particuliers via une association de Dijon se seraient volatilisés

Plusieurs milliers de clients d'une association de la métropole de Dijon, RR Crypto, spécialisée dans l'investissement dans les cryptomonnaies, ont appris dimanche 20 juin que l'argent qu'ils avaient investi avait disparu.

L'essentiel du jour : notre sélection exclusive
Chaque jour, notre rédaction vous réserve le meilleur de l'info régionale. Une sélection rien que pour vous, pour rester en lien avec vos régions.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "L'essentiel du jour : notre sélection exclusive". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

"J’ai le regret de vous informer qu’à ce jour, les fonds ne sont plus présents sur le portefeuille, sans accès à l’historique de ce dernier". Le message envoyé en fin de journée dimanche 20 juin sur les boîtes mails de clients de RR Crypto a été reçu comme un véritable coup de massue.

RR Crypto est une association installée dans la métropole de Dijon (Côte-d'Or). Comme on peut le lire sur son site internet, encore en ligne à l'heure actuelle, elle se décrit comme "une association qui propose pédagogie et accompagnement personnalisé pour vos projets concernant les crypto-actifs auprès de particuliers".

Fondée par un certain Vincent Ropiot en 2019, elle a rapidement séduit de nombreux investisseurs qui ont décidé d'y placer des sommes importantes. Au point de détenir, selon des témoignages difficiles à vérifier, plusieurs millions d'euros. Certains évoquent un total qui atteindrait au moins 40 millions d'euros.

L'association s'est spécialisée dans le trading de cryptomonnaies, ces monnaies virtuelles qui s'échangent en ligne. Elle a recruté au fil des mois des commerciaux, des traders. Elle comptait dernièrement une vingtaine de collaborateurs. Après avoir un temps installé ses bureaux rue du Golf à Quetigny, elle a déménagé en 2020 à Longvic, boulevard de Beauregard.

Les salariés, puis les clients informés de la disparition des fonds

Vincent Ropiot a informé les clients de la disparition de leurs investissements dimanche. Il avait quelques jours plus tôt, le jeudi 17 juin, envoyé un message interne aux employés de la structure, après avoir, selon ses dires, déposé une plainte auprès de la gendarmerie. Dans ce message que nous avons pu consulter, le responsable de RR Crypto âgé de 26 ans indique avoir été "trahi", "utilisé", "volé". Il affirme s'être fait "cyber-harcelé" et "menacé".

Aujourd'hui, nous n'avons plus de fonds. Zéro, et ça fait quelques temps que ça dure, depuis fin mars. Je ne me cache pas derrière des raisons. Encore une fois, j'ai pris les mauvaises décisions. J'avais bon espoir de récupérer nos fonds mais en vain.

Vincent Ropiot, dans un message interne

"J'ai menti, j'ai maquillé la situation et c'était la pire chose à faire, j'en suis désolé. Je ne savais pas comment gérer cette histoire", ajoute encore Vincent Ropiot.

L'argent aurait donc disparu dès le mois de mars 2021, selon ce qu'affirme le responsable de RR Crypto. Pourtant jusqu'à jeudi 17 juin, rien dans le fonctionnement quotidien de la structure ne laissait supposer cela.

Les dépôts et les retraits se poursuivaient normalement jusqu'à cette date, selon un employé avec lequel nous nous sommes entretenus. Il a souhaité rester anonyme. "Jeudi dans la journée, on n'a plus eu accès à nos outils informatiques. On n'a plus eu accès à quoi que ce soit pour enregistrer de nouveaux clients. Le soir nous avons appris que les fonds de RR Crypto étaient à zéro", nous a-t-il confié.

Mais avant cette annonce fracassante, il n'avait vu aucun signe avant-coureur. Il a continué à recevoir son salaire, comme d'habitude. Celui-ci est d'ailleurs versé depuis le départ en cryptomonnaie et non pas directement en euros. Il nous confirme également avoir enregistré, même après le mois de mars, des demandes de retrait pour ses clients et celles-ci ont bien abouti. Si le fonds était depuis cette date à zéro, comment ont-ils pu recevoir leur argent ?

Un système à la Madoff ?

Il met en avant une hypothèse, celle d'une pyramide de Ponzi, un système d'investissement à la Bernard Madoff, où l'argent des derniers arrivants sert à rembourser ceux qui demandent de récupérer leur mise. Une possibilité difficile à démontrer pour l'heure. En tout cas, le fonctionnement de la structure était très largement centré autour de Vincent Ropiot, qui était le seul, selon cet employé, à avoir accès à l'ensemble du fonds. Ce témoin ne peut donc pas confirmer la somme totale qui aurait disparu, n'ayant jamais pu avoir accès à cette information.

Lui-même a investi ses propres économies via RR Crypto, avant d'être embauché par la structure comme conseiller. Il affirme avoir perdu, en plus de son travail, environ 76 000 dollars (environ 64 000 euros au cours actuel). Il doit désormais faire face au désarroi des clients qu'il a convaincus.

Au moins 2 000 clients victimes

Plusieurs milliers de personnes auraient été convaincues d'investir dans les cryptomonnaies via RR Crypto. Certains évoquent le chiffre de plus de 4 000 clients. L'employé avec lequel nous avons échangé affirme qu'il y en avait en réalité un peu plus de 2 000. Le recrutement de clients s'est fait par du bouche à oreille. La structure a d'abord séduit des épargnants en Bourgogne, où elle est implantée. Mais d'autres ont découvert RR Crypto via des forums de discussion et sont donc domiciliés ailleurs en France.

Antoine* a entendu parler de RR Crypto via un collègue. Il a décidé d'investir 3 000 euros avec sa compagne en décembre 2020, attiré par les importantes plus-values possibles. "Des collègues ont investi 5 000 ou 10 000 euros et se sont retrouvé en trois mois avec du +200 % sur leurs investissements", nous raconte-t-il. Une fois son argent placé, il a constaté les mêmes variations à la hausse. "Tous les mois on recevait un bilan. Ces derniers temps, c'était des grosses plus-values. On parlait d'entre +10 et presque +40% selon les mois."

Il était bien sûr conscient de la volatilité des marchés des cryptomonnaies et pensait pouvoir perdre sa mise de départ si le cours s'effondrait. Mais il n'a pas imaginé un seul instant que l'argent se volatiliserait comme ça. "S'il n'y a plus d'argent depuis plusieurs mois, on pense que tous les bilans qu'on recevait étaient faux", indique-t-il.

Contacté, le parquet de Dijon nous a renvoyé vers le celui de Paris où a été transféré le suivi de l'affaire. Ce dernier nous a confirmé l'ouverture ce mardi 22 juin d'une enquête "des chefs de vol en bande organisée, atteintes à un système de traitement automatisé de donnés et blanchiment en bande organisée" suite à une plainte déposée par l'association victime. Les investigations sont confiées à l'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication (OCLTIC), l'Office central pour la répression de la grande délinquance financière (OCRGDF) et la police judiciaire de Dijon. Nous avons tenté de joindre à plusieurs reprises Vincent Ropiot, le fondateur de RR Crypto, sans succès.

Un marché très volatil

L'investissement dans les cryptomonnaies séduit de nombreuses personnes, attirées par la possibilité de fortes plus-values. Mais ce marché, extrêmement volatil, est parfois l'occasion de pertes importantes. Le cours du bitcoin, la principale cryptomonnaie, a ainsi varié de manière très importante sur les derniers mois. En juin 2020, un bitcoin s'échangeait contre 8 500 euros. Mi-avril 2021, le cours était grimpé jusqu'à 52 000 euros pour un bitcoin. Depuis, il a lourdement chuté. Ce 22 juin, un bitcoin s'échange contre environ 25 000 euros.


* Le prénom a été changé à la demande de notre interlocuteur

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information