Quatre mois après la reprise des championnats, les matchs professionnels se déroulent toujours à huis-clos, privant les clubs d'entrées d'argent. Depuis peu, ils sont également privés de leurs droits télévisuels. Mediapro, le diffuseur exclusif vient de se retirer des accords.
Le coronavirus menace-t-il l'avenir de certains clubs de football professionel ? La question brûle les lèvres depuis de nombreux mois. Elle a pris de l'ampleur ces dernières semaines. Après quatre mois de compétitions en France, les matchs continuent de se jouer à huis-clos. Et la billeterie continue donc de tourner à vide. " Aujourd'hui c'est simple, il n'y a aucune recette " résume Olivier Delcourt, le président du Dijon Football Côte-d'Or.
" Si on n’avait pas de réserves on serait en cessation de paiement "
En ligue 1, son club continue de jouer à perte. Chaque match disputé creuse le gouffre financier dans lequel les clubs sont engagés. Pour tenir, Dijon mise sur ses réserves financières, fruits de nombreuses années d'effort.
" On tient parce qu’on a des réserves qui nous permettent de tenir. Des réserves entretenues depuis que je suis président du club. On met de l’argent de côté, au gré des droits télé, de la gestion des budgets du club, au gré des transferts aussi " développe Olivier Delcourt.
Le transfert d'Alfred Gomis vers le Stade rennais cet été a, par exemple, permis au club de récolter 16 millions d'euros.
Mais le président ne se fait guère d'illusions. Plusieurs clubs sont déjà aux portes du précipice et si ce n'est pas encore le cas du DFCO, l'avenir pourrait s'assombrir.
" Si on n’avait pas de réserves on serait en cessation de paiement. D’après les projections que l’on a fait, si malheureusement il n’y avait aucune entrée jusqu’à la fin de la saison on serait en cessation de paiement en fin de saison. On aurait mangé toutes nos réserves. "
L'AJ Auxerre contraint de revoir son budget à la baisse
À l'étage inférieur, l'AJ Auxerre connait les mêmes difficultés. Au milieu de la saison, le club a même dû revoir son budget à la baisse, notamment à cause du fiasco des droits TV. " On n’aura pas les recettes qui allaient avec ce budget, donc on va limiter les dépenses " explique Francis Graille, le président.
En effet, cet été, après la longue hégémonie de Canal + puis de BeIN Sports sur les droits du football français, c'est le groupe sino-espagnol Mediapro qui rachetait les droits de diffusion de la Ligue 1 et de la Ligue 2.
Quatre mois plus tard, Mediapro se retirait des accords conclus avec la Ligue de football professionnel. Sans pour autant verser l'intégralité des sommes promises aux clubs professionnels ainsi qu'à la ligue. Un caillou de plus, et de taille, dans la chaussure des clubs.
" À Dijon, les droits TV représentent à peu près 60 % du budget du club, c’est énorme, commente le président du DFCO, Olivier Delcourt. Sur 50 millions de budget, c’est 30 millions. Il y a une petite partie qui a été payée au départ par Mediapro mais il y a une grosse partie qui manque aujourd'hui. "
En ligue 2 la situation est la même. Francis Graille confirme : " Au départ de la saison les droits télé devaient représenter entre 35 et 40% du budget. Aujourd'hui, on a touché la première partie dans son intégralité, mais on n’a pas touché ni la deuxième ni la troisième partie puisqu’ils [Mediapro] ont interrompu les versements. "
Pour les clubs de ligue 2, Médiapro devait présenter trois virements, en août, en septembre puis en octobre. Seul celui du mois d'août a été honoré. Entre 120 et 150 millions d'euros ont ainsi été distribués aux clubs.
Des négociations en cours pour la reprise des droits TV
Les deux présidents de club espèrent un accord rapide avec un autre diffuseur afin de perdre le moins d'argent possible. Les négociations sont en cours à la LFP. " Avec les matchs à huis-clos on perd de l’argent à chaque match et maintenant on n’en gagne plus avec la diffusion " conclut Francis Graille.
Ces enjeux financiers ne devraient toutefois avoir que peu d'incidence sur le marché des transferts hivernal qui s'ouvrira dans les prochains jours. À Dijon comme à Auxerre, la stabilité devrait être de mise. Sauf si une offre financière extraordinaire se présentait...