A Besançon, les intermittents en colère doivent occuper le centre dramatique national. Ils veulent attirer l'attention sur leur précarité, accentuée par la crise de la Covid-19. Les protestataires réclament aussi la reprise des spectacles, le plus vite possible.
Le centre dramatique national de Besançon bientôt occupé, pour ne pas se faire oublier. Les intermittents du spectacle se sont réunis à la salle de concert de la Rodia, ce jeudi 11 mars. Ils ont voté en assemblée générale, pour l'occupation de la salle de théâtre. Ces professionnels de l'art sont en situation délicate. L'arrêt des activités culturelles et la fermeture des salles de concert ou de théâtre, depuis le 28 octobre dernier, renforcent la précarité parmi les intermittents du spectacle.
Je défends le combat pour les théâtres, les cinémas et les lieux culturels, mais on ne parle jamais de la rue. Pourquoi on ne peut pas avoir un public de 300 à 500 personnes en extérieur, alors que les supermarchés, ou la Grand Rue à Besançon par exemple, sont remplis ?
Ce jeudi 11 mars, la Coordination des Intermittents et des Précaires se réunit en assemblée générale, devant la Rodia, une salle de spectacle de Besançon. Intermittents du spectacle, précaires et étudiants sont présents. La centaine de personnes doit voter l'occupation du centre dramatique national. L'idée fait l'unanimité parmi les manifestants.
Ils réclament le maintien d'une « année blanche » supplémentaire. Ce dispositif consiste à prendre en charge financièrement tous les professionnels du spectacle sans activité, en raison de la crise sanitaire touchant la France.
Parmi eux, il y a Cesar Fradé, un artiste de rue. Il fait partie de la Salamandre, une compagnie de spectacle du Doubs. Pour cet intermittent, la période est difficile à vivre : « La dernière fois qu'on a joué des spectacles, c'était au mois d'octobre. Là, on a des contacts, des projets, on nous fait des propositions, mais on est toujours dans l'inconnu ».
L'homme est particulièrement inquiet, d'autant que les règles sanitaires actuelles ne lui permettent pas de jouer dans la rue. « Je défends le combat pour les théâtres, les cinémas et les lieux culturels, mais on ne parle jamais de la rue. Pourquoi on ne peut pas avoir un public de 300 à 500 personnes en extérieur, alors que les supermarchés, ou la Grand Rue à Besançon par exemple, sont remplis ? Les gens y sont les uns contre les autres, et nous, on a pas le droit de jouer en extérieur dans la rue », s'étonne l'artiste.
Comme lui, d'autres intermittents connaissent une situation difficile. Ils s'estiment oubliés par le gouvernement et la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot. C'est pourquoi l'occupation des lieux de culture leur semble adéquate, pour être entendus. Cette opération se veut respectueuse.
Lionel Tessier, est musicien et fait partie de ces occupants : « Nous sommes en négociation avec le centre dramatique national. Nous voulons l'occuper, avec les précautions d'usage contre le covid-19 : on y tient beaucoup. On fait ça en soutien au mouvement entamé au théâtre de l'Odéon, à Paris, occupé depuis une semaine. On va s'organiser pour dormir là, faire de ce lieu un endroit de convergence des luttes ».
Compréhension et interrogations
Du côté du centre dramatique national, l'action est compréhensible. « Je suis personnellement solidaire des revendications de ce mouvement qui est en train d'exister en France. Il faut que "l'année blanche" soit recalculée de la manière la plus équitable et solidaire possible, d'une part. Il faut aussi dénoncer la nouvelle réforme de l'assurance-chômage qui doit entrer en vigueur le 1er juillet, et qui fragilise les plus précaires de l'ensemble des intermittents », explique Celie Pauthe, directrice du théâtre.
Face à la volonté des intermittents et précaires de camper dans le théâtre, la directrice du lieu a tout de même quelques réserves. Elle se dit « au pied du mur, en tant que directrice ». Ce qui la préoccupe, ce sont d'abord les inévitables conditions sanitaires : « J'espère que cette occupation se fera dans le respect des règles contre la Covid-19, qu'il y ait un nombre restreint d'occupants », justifie Célie Pauthe.
Autre point important pour la responsable, la présence d'équipes en cours de travail. « J'espère qu'à l'aune de ces occupations, le mot d'ordre va être "respect absolu du travail en cours". On serait sinon dans une contradiction absolue : des intermittents empêcheraient d'autres intermittents de travailler, ce qui est absurde », détaille la responsable du centre dramatique national.
Le collectif annonce d'autres actions dans les semaines à venir, à Besançon.