Du groupe mod-punk « The Jam », à sa carrière solo pop rock, en passant par la parenthèse soul « The Style Council », Paul Weller est en perpétuelle quête de renouveau. Quarante ans de richesse musicale que Nicolas Sauvage retranscrit dans son livre Life from a window. Portrait(s).

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De loin, la fumée de sa cigarette rencontre le froid hivernal ; elle masque son visage. Une marinière blanche et rouge vif cachée par un pull gris souris, des Oxford noires aux pieds, Nicolas Sauvage arrive tel un personnage sorti du film consacré à une radio pirate, Good Morning England. Des allures rock cultivées par ce spécialiste des musiques actuelles. Il y a quelques mois, le conférencier de la Rodia a sorti un livre dans lequel il retrace la vie d’un Britannique, Paul Weller, une icône … presque inconnue en France.

L’artiste britannique a été une rencontre structurante dans le parcours de Nicolas Sauvage, l’une des premières portes d’entrée vers la musique : « Il m’a permis de découvrir des musiques vers lesquelles je ne serai pas allé, en revendiquant des influences, en citant des artistes, parfois loin de mes goûts personnels. »

Ecrire un livre sur Paul Weller apparaît comme une évidence. Le Bisontin y voit « une manière, sans aucune arrogance, de le remercier », pour ces trente années de découvertes musicales. Un choix éditorial risqué. Jusqu’alors, pas d’écrits en France sur cette pop-star britannique, dont le nom n’évoque pas grand-chose. Le chanteur reste aussi un prétexte, une « colonne vertébrale », pour raconter une histoire plus vaste, celle de l’histoire de la musique anglaise.

The Jam, premier amour

« J’ai découvert un musicien qui avait disparu de la circulation », raconte Nicolas Sauvage. Vers la fin des années 1980, la carrière de Paul Weller connaît un vide. Pourtant, le Bisontin écoute pour la première fois The Jam, un groupe de mod-punk. Une révélation. Dix ans plus tôt, à Woking, banlieue londonienne, c’est l’histoire de trois jeunes hommes, qui se lancent dans le punk rock. Parmi eux, Paul Weller. Avec des sonorités rythmées, des textes engagés et un leader charismatique, le succès est au rendez-vous.

Nicolas Sauvage parle de Weller comme un « homme du peuple » très accessible ; « un grand frère idéalisé » pour le public britannique... et aussi pour le Bisontin. Son admiration a débuté avec « Going Underground », le premier morceau que le biographe a écouté en boucle, « la chanson du groupe qui [le] ramène à [ses] 16 ou 17 ans ». De sa voix grave, il confie : « l’énergie, la finesse et l’élégance m’ont fait succomber à l’univers de Weller ».

La nonchalance et l'engagement du jeune homme en font une « voix de la génération ». Un statut qui demeure difficile à porter pour Weller, et les envies de voir ailleurs se bousculent. Parue en 1982, « Town Called Malice », l’une des musiques les plus populaires du groupe, tient déjà en elle, la fin de la période mod-punk du chanteur. Bande-son de Billie Elliot, mais aussi de son adolescence. Enthousiaste, Nicolas Sauvage décrit cet équilibre entre « l’amour que Weller porte à la soul et un son typiquement britannique », complété « par un texte admirable qui place le musicien parmi les grands auteurs-compositeurs issus de cette génération. »

The Style Council, des hauts et des bas

Un an après, c’est le début de l’aventure The Style Council, plus soul, aux accents de pop et funk. Une période courte pendant laquelle le chanteur longiligne ne rencontre pas le même succès que pour The Jam. Pour l'ancien disquaire, le groupe se place à la croisée des « deux piliers de la musique anglaise » : l'héritage des Sixties et les chanteurs blues et soul de la Motown.

Changement de ton, donc, avec « My Ever Changing Moods », sortie en 1984. Des interprétations plus légères, plus 80s. Une chanson « idéale pour débuter la journée », d’après Nicolas Sauvage, grâce « à la composition et au texte fantastique et à la fraîcheur qui émane de l’interprétation ».

Paul Weller, l’icône britannique

Ses yeux émeraude s’illuminent. « Cette résurrection, ce come-back miraculeux, je l’ai vécu en direct. », s’exclame Nicolas Sauvage. 1992. La première fois que le Bisontin voit Paul Weller en concert. Les premiers pas en solo pour l’anglo-saxon. Après la disparition de Style Council dans le plus grand anonymat, l’ex-chanteur des Jam veut se relancer. Nicolas raconte, d’un ton enjoué : « Personne ne s’attendait à ce qu’il y ait un post-scriptum à son histoire musicale ».

C’est d’ailleurs cette période qui marque le plus Nicolas Sauvage. De ces souvenirs limpides, il se rappelle d’ « un concert acoustique, où il y avait trois cents personnes, dont énormément d’Anglais », une « impression d’être privilégié ». Parmi ses nombreux 45 tours tombés aux oubliettes, « Everything Has A Price To Pay » (Face B), l’ancien disquaire apprécie « ce titre exceptionnel dissimulé dans les zones d’ombre d’une discographie pléthorique ».

Bras croisés, Nicolas Sauvage convoque le « puzzle » pour narrer la carrière de Paul Weller. Dans son dernier album en date, le conférencier remarque la chanson « White Horses ». Le passionné parle d’ « un rapport vraiment épidermique » à ce morceau qui pourrait « se dispenser de toute instrumentation ». La voix de Weller le bouleverse, à chaque écoute. 

Par ce livre, l’ambition de Nicolas Sauvage est de faire découvrir Paul Weller et d’éveiller la curiosité. Car aujourd’hui, les cassettes et les vinyles ne sont plus. Le Bisontin déplore l’ère de Youtube, Deezer ou Spotify, qui témoigne d’un changement dans le rapport à la musique, la fin d’une consommation collective. Dans son ancien métier de disquaire, Nicolas donnait des clefs aux acheteurs pour qu’ils découvrent d’autres artistes. Pour le conférencier, prendre le temps de lire un livre, « ça peut marcher aussi bien que trois clics sur internet ».

 

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