Des scientifiques ont démontré que l’intensité, la vitesse et la hauteur de voix de notre interlocuteur influaient automatiquement sur notre perception de fiabilité et d’honnêteté de son discours. Explications.
Jean-Julien Aucouturier est directeur de recherches au CNRS, il est en poste actuellement au laboratoire FEMTO-ST à Besançon. Avec sa collègue Louise Goupil, psychologue, ils ont étudié l’acoustique des mots, pour définir les caractéristiques sonores qui garantissent la bonne persuasion de l’auditoire. Ces travaux sont publiés dans la prestigieuse revue "Nature Communications".
Quelle méthode pour étudier l'acoustique des mots ?
Pendant deux années, les chercheurs ont sollicité plus de 120 personnes de trois nationalités différentes (Français, Anglais, Espagnol) . Ils ont développé un logiciel -CLEESE- , pour créer de pseudos mots, des mots qui ne veulent rien dire.
L’important n’étant pas de travailler sur ce qui est dit, mais sur la façon dont on le dit.
Ils ont ensuite fait écouter plus de 3000 mots prononcés de façon différentes par un ordinateur, à leurs auditeurs. Et à chaque fois, ils leur ont demandé si ce « pseudo mot » leur semblait être exprimé de façon certaine et honnête.
Que révèlent ces travaux de recherche sur la voix ?
Les chercheurs ont conclu qu’en termes acoustiques, trois éléments clés permettaient de convaincre l’auditoire de façon certaine. En clair, celui ou celle qui s'exprime est jugé sûr de lui et son information honnête, si les mots sont prononcés de la façon suivante :
- Le Pitch (ou hauteur) qui définit une voix haute ou voix basse, doit tomber à la fin du mot pour être gage de fiabilité
- L’intensité haute en début de syllabe est aussi interprétée comme émanant d’un locuteur sûr de lui
- La rapidité, le débit de mots à un rythme soutenu est aussi considéré comme un gage de fiabilité
A quoi et à qui cette étude va t-elle servir ?
Les résultats de l’étude sont accessibles et utilisables par tous. Et il y a fort à parier qu’ils vont être mis en application rapidement par les spécialistes du langage : les avocats, les personnalités politiques, les acteurs par exemple.
Mais attention, les conclusions apportées par l’étude ne garantissent pas la véracité des propos. Si la manière dont sont prononcés les mots a une incidence certaine sur la notion de fiabilité perçue par l’auditoire, rien ne garantit que l’information donnée soit vraie. Elle est simplement perçue comme vraisemblable et honnête. Le chercheur bisontin précise, "tout le monde sait qu’il y a de parfait menteurs". Et moi j’ajoute : « pour les autres, il y a désormais aussi un bon mode d’emploi ! »