Dans son nouveau roman intitulé La Troisième main (P.O.L), qui sera présenté au festival Livres dans la Boucle ce week-end, Arthur Dreyfus a choisi Besançon comme point de départ de l'intrigue.
L'un des romans les plus surprenants de cette rentrée littéraire. Déjà lauréat du Prix Transfuge du roman français [avec Humus de Gaspard Koenig (l’Observatoire)], Arthur Dreyfus et La Troisième main (P.O.L) seront au festival Livres dans la Boucle, qui se déroule du vendredi 15 au dimanche 17 septembre à Besançon.
Avant une rencontre au Scènacle samedi à 15h ["Destins hors du commun pour personnages hors normes", aux côtés de Jean-Baptiste Andrea pour Veiller sur elle (L’Iconoclaste) et Dimitri Rouchon-Borie pour Le chien des étoiles (Le Tripode)], l'écrivain franco-suisse a présenté à France 3 Franche-Comté son nouveau livre, dont le début de l'intrigue se déroule justement à Besançon. À mi-chemin entre "le conte gothique et le roman fantastique", La Troisième main ne laissera personne indifférent.
Quelle ont été vos sources d’inspiration pour écrire cet ouvrage ?
J'ai eu cette idée il y a une dizaine d'années. Celle d'un jeune homme à qui on a greffé une troisième main avec sa volonté propre. Je ressentais cela comme une image de contes de la fin du XIXe siècle, comme Le Portrait de Dorian Gray d'Oscar Wilde avec cet homme qui ne vieillit jamais et dont le portrait pourrit au grenier, Le Passe-muraille de Marcel Aymé avec le héros qui traverse les murs, La Métamorphose de Franz Kafka dans lequel le personnage se transforme en insecte, ou encore Docteur Jekyll et M. Hyde de Robert Louis Stevenson. Même si elles sont très simples, ces histoires impriment une image forte dans l'esprit du lecteur. D'où cette idée d'un gentil garçon moral et plein de bonnes intentions, qui se retrouve avec une main vicieuse et perverse accrochée à son ventre. Obligé d'apprivoiser cette main, il doit apprendre à vivre avec cette part monstrueuse en lui.
Vous êtes connu pour votre éclectisme dans vos écrits (roman, journal intime, théâtre, livre pour enfants...). Où classer La Troisième main ?
C'est une sorte de conte gothique ou de roman fantastique qui se déroule pendant la Première Guerre mondiale, puis dans les Années folles jusqu'au milieu des années 1930. Souvent, les romans fantastiques sont des histoires symboliques avec deux degrés de lecture. Le premier degré serait de vivre avec cette main étrange et monstrueuse accrochée à soi, quand le deuxième serait de réfléchir à la part d'ombre qu'il y a en chacun, nous faisant prendre des mauvaises décisions. En l'écrivant, je voulais qu'on croie à l'histoire, et qu'on accompagne vraiment ce personnage avec sa troisième main. Même si elle commet des crimes, elle va aussi sauver notre héros de situations très compliquées. Elle a même des points très positifs, comme sa maîtrise du dessin ou du piano. Cette troisième main n'est pas qu'un prétexte.
Pourquoi avoir choisi Besançon comme point de départ de l’intrigue ?
Dans mon histoire, le personnage alors adolescent se rapproche à vélo un peu trop près d'une zone de combat. Un obus tombe juste devant lui, et soufflé par l'explosion, il est transpercé au niveau du ventre par le bras découpé d'un soldat allemand. J'ai donc choisi Besançon pour cette proximité avec les tranchées, mais aussi parce que le Doubs a été un des départements où en conséquence de la guerre franco-prussienne de 1870, les engagements volontaires de soldats français ont été les plus élevés. C'est un territoire très imprégné par les traces de la Première Guerre mondiale.
Êtes-vous un familier de la ville ?
Je l'ai découverte grâce au festival Livres dans la Boucle il y a quelques années. Je m'en suis souvenu en écrivant tous les passages à Besançon, en pensant aux parties médiévales de la ville ou au fait qu'elle soit cernée par une forêt un peu fantastique. J'ai aussi retenu son côté parfois triste et intemporel ou bien certaines ruelles mystérieuses. Je retrouvais des sensations liées à Besançon quand j'ai écrit mon livre.
Quelle est votre relation avec Livres dans la Boucle ?
C'est dans ce salon que j'ai reçu mon premier prix littéraire en 2010 [le prix du premier roman du Doubs pour La Synthèse du camphre (Gallimard)], c'était une belle émotion. Je vais faire une rencontre samedi avec deux super écrivains et je suis donc forcément content d'y retourner.
►À LIRE AUSSI : Livres dans la Boucle à Besançon : nouveautés, auteurs reconnus... 4 bonnes raisons de se rendre à la 8ᵉ édition du festival littéraire
Quel accueil attendez-vous de la part des Bisontins pour La Troisième main ?
Ça peut toujours être étonnant d'ouvrir un livre qui commence en 1914, mais qui se déroule dans l'endroit où on vit. On voit alors son décor quotidien sous un autre jour et on imagine qu'il a pu être l'arène d'une histoire fantastique.
Quels sont vos projets à court terme ?
Pour l'instant, je vais de ville en ville pour présenter mon livre, et je suis encore bien immergé dans cette histoire. J'essaye toujours d'apprivoiser ma troisième main (rires).