PHOTOS. Il y a 500 ans, naissait la première brigade de pompiers de Besançon, un pompier fête cet anniversaire

26 septembre 1524, naissance de la première brigade des pompiers de Besançon. En 2023, un pompier fête ces 500 ans à sa manière : sur Facebook, Twitter et Instagram, il publie chaque jour une photo. Insolite et instructif !

Le Commandant Sébastien Freidig est le chef de centre de la caserne de Besançon, située à la Grette. Il raconte son métier et son projet un peu fou à la caserne, après une visite des lieux. Avec précision et enthousiasme.

Il a décidé à l’âge de 16 ans qu’il serait pompier professionnel, mais l’Histoire a toujours été pour lui davantage qu’un passe-temps. Passion conviendrait plus : il y passe beaucoup de ses loisirs : en recherches, en lectures aux archives municipales de Besançon, dans les brocantes et vide-greniers…

Et, comme, en 2024, les pompiers de Besançon fêteront leur 500 ans d’existence, il a voulu rendre hommage à ses collègues, d’hier et d’aujourd’hui. Chaque jour, depuis le 15 mai, soit 500 jours avant la date officielle de la naissance de la brigade de Besançon, il publie une photo sur ses comptes Facebook, Instagram et Twitter. Une photo d’un document, d’un véhicule, d’une intervention hors norme, uniquement sur Besançon et ayant un lien avec les soldats du feu.

Un autodidacte passionné

Il n’a pas fait d’études d’histoire. "Je ne suis pas historien " répète-t-il même à plusieurs reprises. Heureusement, pour l'aider, il a rencontré des professionnels, notamment Marie-Claire Waille, directrice des Archives Municipales. Elle et son équipe lui ont beaucoup apporté. " Déjà, ils m’ont appris la méthode pour chercher dans les documents. Puis, ils m’ont déchiffré les hiéroglyphes des comptes rendus du conseil municipal. Pour moi, c’était illisible… "

Sébastien Freidig court les brocantes, antiquaires, vide-greniers à la recherche de l’objet rare ou de la photo exceptionnelle.

Heureux comme un gamin, il va chercher dans sa vitrine une petite photo sépia, enchâssée dans un cadre, d’un homme en uniforme avec une barbiche : " C’est ma dernière acquisition, trouvée à la brocante d’Ornans. On voit tout de suite à l’uniforme qu’il s’agit d’un pompier. En fait, derrière la photo, le nom du photographe et du modèle sont indiqués. C’est le sous-lieutenant Charrière, de Besançon… J’étais vraiment content de l’avoir trouvée et identifié ! " 

La vraie richesse des pompiers, c’est les hommes. 

Commandant Sébastien Freidig

Il insiste sur sa volonté de rendre hommage aux hommes qui se sont succédé pour lutter contre les incendies durant cinq siècles à Besançon. Il veut également transmettre les résultats de ses recherches. Là encore, il a su trouver les bonnes personnes.

Sébastien Freidig poursuit : " Je n’ai pas de compte personnel sur les réseaux sociaux. En mars 2023, je n’y connaissais rien. Mais j’ai pu compter sur le service communication des pompiers pour créer les trois comptes sur Twitter, Facebook et Instagram. "

Besançon Pompiers 500 ans : une photo par jour

Depuis le 15 mai 2023, il publie chaque jour à 17 heures une photo avec une anecdote, un fait divers, un véhicule.

Et il se félicite du résultat : 300 abonnés pour chacun des comptes. Il précise "Je n'ai pas l'intention de devenir influenceur ". Mais il comptabilise de nombreux partages. " Les véhicules de pompiers ont beaucoup de succès. Cette photo a été partagée 6 000 fois. Un accident avec une voiture dans le Doubs a moins intéressé, c’est plus banal. " Plus touchant : les retours, qui sont multiples et variés. " Un jeune pompier volontaire du Doubs me pose toujours plein de questions, auxquelles je réponds systématiquement. Autre retour, une dame m’a dit qu’elle avait reconnu son grand-père sur un cliché… C'est émouvant. "

Il connait l'internaute qui regarde ses publications : " Sur Twitter, je touche un public professionnel, surtout des pompiers. Sur Facebook, le public est âgé de 35-50 ans. Sur Instagram, c’est plus jeune et plus varié. Il s’agit surtout de Bisontins intéressés par l’histoire locale. "

L'histoire des pompiers : une fenêtre sur cinq siècles d'histoire locale et nationale

Ce petit bout de la lorgnette, l’histoire des pompiers, peut paraître anecdotique. En fait, elle permet d’entrer de plain-pied dans l’Histoire. La Grande Histoire, avec un H majuscule, quand il s’agit de la participation des pompiers à la Grande Guerre par exemple, mais aussi l’histoire de Besançon, celle de l’industrie.

C’est un prétexte pour parler d’histoire et d’hommes exceptionnels, pompiers ou non, et leur rendre hommage. 

Commandant Sébastien Freidig

Ainsi, Sébastien Freidig est intarissable sur Étienne Batifoulier. Un pompier haut gradé ? Pas du tout, un industriel du XIXᵉ siècle. Cet homme a été PDG d’une fonderie à Besançon et il a fabriqué des pompes de toutes sortes, dont des pompes à bras contre les incendies. C'était le seul engin disponible pour lutter contre les flammes, sinon les habitants combattaient le feu en organisant des chaînes humaines et utilisaient des seaux remplis d'eau.

Le Commandant poursuit : "Étienne Batifoulier a même inventé l’une des premières pompe à bras mécanisé. C’était une pompe à incendie automobile : le moteur permettait non seulement de se rendre sur les lieux de l’incendie mais aussi d’actionner la pompe qui projetait de l’eau sur les flammes… Mais il n’a pas réussi à la commercialiser".

Il était parti de rien, il n’avait pas un sou et, grâce à son intelligence alors qu’il savait à peine lire et écrire, il a construit un empire industriel et il était devenu immensément riche. Il est injustement oublié à Besançon. Son entreprise a employé jusqu'à 120 salariés

Commandant Sébastien Freidig

Et le 26 septembre naît la brigade de pompiers de Besançon

Mais revenons au XVIᵉ siècle et à la création de la première brigade de pompiers de Besançon. Sébastien Freidig replace le contexte : " Il faut bien s’imaginer l’époque : les incendies sont de véritables fléaux. Au XVIe siècle, l’un des plus gros feux avait détruit le tiers de la ville. Les maisons étaient mitoyennes, avec beaucoup de bois… Les ravages étaient considérables, les dégâts très importants, ça on le sait, mais on ne connait pas forcément le nombre de victimes."

Donc, à Besançon, en 1522, le conseil municipal fixe l’objectif : la lutte contre les incendies. Il faut attendre le 26 septembre 1524 pour qu’il s’en donne vraiment les moyens. Si ailleurs, on emploie le terme " gardes pompes ", à Besançon, on appelle les premiers pompiers des " gardes de feu ".

Sébastien Freidig enchaîne : "On sait que 40 hommes, tous issus des métiers du bâtiment, constituaient cette brigade. Ils étaient maçons, couvreurs, charpentiers, plâtriers et surtout costauds ! Et ils n’avaient pas peur de grimper en hauteur."

En plus de l’eau, l’autre moyen de lutte contre les incendies, c’est d’enlever le combustible, donc de démonter les maisons. On appelle ça "la part du feu" : laisser brûler une partie et en protéger une autre. Démolir, les spécialistes du bâtiment savent faire. Autre terme pour démolir, "saper", ce qui donnera sapeur par la suite.

Sébastien Freidig,

commandant et chef de centre de la caserne de Besançon

Attention, cette brigade n’est pas la première de France. Il en a existé certainement ailleurs mais à Besançon, on en a gardé les traces écrites. Ce n’est pas le cas dans d’autres agglomérations où beaucoup d’archives ont été détruites à cause des guerres… ou, ironie de l’histoire, par des incendies.

Une exposition 2.0

Sébastien Freidig a commencé ses recherches sur les premiers pompiers bisontins il y a presque 20 ans. Il a collecté des milliers d’informations.

Avec ses comptes sur les réseaux, il veut rendre hommage aux hommes qui, depuis 500 ans, luttent pour la sécurité de leurs concitoyens. Aujourd’hui, seulement 10 % de leurs interventions concernent les incendies, la plupart sont des secours à personnes avec accidents de la route, domestiques…

" Mon site, ce n’est pas une exposition physique mais dématérialisée, dans l’air du temps. Je publie tous les jours à 17 heures. Certains internautes attendent mon post avec impatience. Et quand je suis liké par le musée des pompiers de Lyon, je suis vraiment content."

Celui qui ne veut surtout pas prétendre être historien avoue sa satisfaction, un like de "pro" lui apporte crédibilité et légitimité. De quoi l'encourager à poursuivre encore quelques centaines de jours pour ses publications. Pour ses recherches, en revanche, pas de date de fin. 

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