Cet anesthésiste de Besançon est soupçonné depuis plusieurs années d'avoir empoisonné plusieurs de ses patients, dont neuf seraient morts, dans le cadre de ses fonctions à l'hôpital. Il a tenté de mettre fin à ses jours au domicile de ses parents, dans la nuit du 30 septembre au 1er octobre.
Frédéric Péchier s'est défenestré au domicile de ses parents, qui résident dans le département de la Vienne, dans la nuit du jeudi 30 septembre au vendredi 1er octobre 2021 selon l'un de ses avocats, Me Randall Schwerdorffer, qui a été averti par la soeur du docteur. "Il est dans un état critique. Il est gravement blessé avec une multitude de fractures dont celle du sternum. Il souffre d'un hématome sous-dural. Le pronostic vital était engagé au début de son hospitalisation. Aujourd'hui, nous ne savons pas comment cela va évoluer et s'il va avoir des séquelles", a précisé l'avocat ce mardi 05 octobre.
Le geste de Frédéric Péchier ne le surprend pas : "Je m’y attendais car depuis un certain temps, il était très sombre, fatigué et lassé de la procédure qui n'avance pas. Depuis 30 mois il n’a plus été interrogé par la justice. Tout ce qui rentre dans le dossier et qui lui est favorable, comme les dernières expertises psychiatriques, est traité comme si cela n’avait pas d’importance."
"Le contrôle judiciaire lui interdit de retourner chez lui et de retravailler, c’est trop"
La stratégie de la défense est la suivante : "Nous allons faire une demande de démise en examen d’ici la fin de la semaine pour débattre des charges qui pèsent sur lui. La justice n’a aucune preuve contre le docteur Péchier. Le contrôle judiciaire lui interdit de retourner chez lui et de retravailler, c’est trop", estime son avocat qui pointe la déchéance sociale de son client à cause de ces mesures. Alors qu'il y a 5 ans, "cet homme-là exerçait un métier qu’il adorait, gagnait très bien sa vie, avait une vie sociale, une vie de famille et une belle maison", il vit désormais chez ses parents dans la Vienne, à bientôt 50 ans. "C’est compliqué à vivre et l’avenir est sombre", explique Me Randall Schwerdorffer qui dit "comprendre son geste".
Depuis 2019, la justice a prononcé contre lui une interdiction de paraître à Besançon ou à Montfaucon, où il résidait. Médecin anesthésiste de renom de la clinique Saint-Vincent de Besançon, le docteur Frédéric Péchier est soupçonné d’avoir empoisonné volontairement 24 patients entre 2008 et 2017. Neuf d'entre eux sont décédés sur la table d'opération. Lui a toujours affirmé qu'il était innocent.
L'éclatement de l'affaire s'est réalisée en deux temps. D'abord, en 2017, il est mis en examen pour empoisonnement avec préméditation sur sept patients. Deux d’entre eux ne sont jamais sortis vivants de la table d'opération alors qu'ils étaient venus pour des interventions bénignes. Le docteur est alors placé sous contrôle judiciaire avec interdiction totale d'exercer son métier.
Deux ans plus tard, en 2019, l'affaire prend une autre ampleur puisque dix-sept nouveaux cas d’empoisonnements dont sept mortels sont versés au dossier. Il est alors mis en examen pour la seconde fois. Au total, le docteur Péchier est désormais suspecté d’avoir commis vingt-quatre empoisonnements sur personnes vulnérables dont neuf ont conduit à la mort.
Mais pourquoi Frédéric Péchier aurait-il commis ces actes ?
La thèse de la vengeance est privilégiée par le parquet : il aurait empoisonné les patients de ses collègues pour leur nuire. La personnalité du docteur est au centre de l'affaire et les experts peinent à dégager un consensus : trois analyses de sa personne ont déjà été réalisées avec des résultats contradictoires. La première analyse décrit une personnalité normale tandis que la deuxième dépeint le docteur comme une personnalité perverse. Une troisième, réalisée par le psychiatre Daniel Zagury durant l'année 2021, estime que l'anesthésiste est un être sans problème psychiatrique particulier.
L'enquête a également montré que depuis le départ du docteur Péchier de la clinique Saint-Vincent et de celle de la Polyclinique de Franche-Comté, plus aucun accident opératoire ne s'est produit dans les deux cliniques bisontines.