Si l'on comptait les hérissons ? Lancée en 2018 dans le Doubs par France Nature Environnement de Bourgogne-Franche-Comté, l’opération recensement des hérissons s’est étendue à l’ensemble de l’hexagone depuis 2020. Une initiative qui permet de récolter des données précieuses sur la vie du hérisson et qui sensibilise le grand public.
Il n’est pas rare de trouver dans son jardin une petite boule piquante au long museau fin et aux yeux ronds. Souvent présents dans nos potagers et sur les routes, le hérisson reste pourtant méconnu des scientifiques et naturalistes. France Nature Environnement (FNE) du Doubs a donc lancé en 2018 une opération recensement de ces petites bêtes dans le Doubs et dans le Territoire de Belfort.
Un moyen de récolter des données scientifiques tout en sensibilisant la population sur leur mode de vie. Victime de son succès, l’opération s’est élargie à l’ensemble du pays dès la fin 2020 et est reconduite chaque année. Avant elle, il n’existait aucun programme spécifique pour protéger le hérisson d'Europe à l’échelle nationale. Aujourd’hui, tous les renseignements récoltés sont traités dans le Doubs par FNE de Franche-Comté.
L’importance du hérisson dans les écosystèmes
En collaboration avec FNE, Jardiland a lancé une campagne de sensibilisation pour rappeler le rôle et l’importance du hérisson dans nos écosystèmes. Il préserve le bon équilibre dans nos jardins grâce à son alimentation. Chenilles, limaces, escargots...toutes ces petites bêtes envahissantes qui mangent vos salades font son repas. Il joue aussi un rôle sentinelle puisque c’est l’une des premières espèces impactées par la pollution, le changement climatique et les autres perturbations. Sa présence est donc le signe que votre potager se porte bien. En bref, le hérisson est essentiel et le protéger devient une nécessité.
Le hérisson cache encore des mystères
Le hérisson d’Europe, principale espèce présente sur le territoire, est protégé depuis 1981, mais il ne bénéficie pas de statut de vulnérabilité en France. Pour l’Union Internationale de la Conservation de la Nature, son statut de conservation dans le pays n’est pas alertant. Le hérisson est donc seulement classé comme « préoccupation mineure », c’est-à-dire que son risque de disparition en France métropolitaine est jugé comme étant faible.
Pourtant, le manque d’études scientifiques de ces animaux peut dissimuler une réalité plus préoccupante. « Aujourd’hui, on ne sait pas vraiment comment cette espèce se porte, » insiste Victoire Kühn, chargée de mission sur l’opération recensement des hérissons à FNE du Doubs. « Le but de ce recensement est vraiment d’encourager une personne lambda à participer à ce programme et lui montrer qu’elle peut avoir un impact important, » continue-t-elle.
Collecter pour protéger
L’opération recensement invite la population à remplir un formulaire dès qu’elle aperçoit un ou plusieurs hérissons, vivants ou morts, ou lorsqu’elle observe des indices de sa présence (excréments, nid, empreintes…). Toutes ces informations sont ensuite exploitées pour suivre son mode de vie et ses évolutions. « On peut en apprendre davantage sur leur hibernation, leur quotidien, leur alimentation et voir si tout ça varie d’une région à l’autre. Le nombre de signalements nous permet aussi d’estimer si ces populations sont en déclin ou en hausse » explique Victoire.
« On cherche aussi à évaluer l’impact de la mortalité routière » continue-t-elle. Tous ces renseignements sont primordiaux pour évaluer les conséquences des activités anthropiques sur les hérissons. « On construit de plus en plus de route et de plus en plus de murets ou de barrières entre nos jardins et ceux de nos voisins. Ça a des répercussions sur la vie des hérissons. » France Nature Environnement souhaite à terme utiliser ces données pour installer le dispositif « Route du hérisson » là où ces animaux sont les plus en danger. Né à Caen en Normandie, son but est de recréer des passages entre les propriétés privées ou publiques et les routes pour permettre aux hérissons de se déplacer pour se nourrir ou se reproduire en toute sécurité.
Les gestes à ne pas faire
Derrière la collecte d’informations se cache aussi une campagne de sensibilisation. « Le hérisson est plutôt aimé du grand public. Les gens le trouvent mignon et sympathique, c’est un animal sauvage avec qui la cohabitation se passe bien, » précise Victoire. Une affection qui incite la population à participer à son recensement, mais qui peut aussi lui coûter préjudice. « Beaucoup de Français qui ont un hérisson dans le jardin vont le nourrir quotidiennement avec des aliments qui ne sont pas adaptés. Ça dérègle son organisme, développe l’obésité et affaiblit sa capacité à se nourrir seul, » rappelle-t-elle. Le toucher, le déplacer, tenter de le soigner, le photographier avec un flash… sont autant de gestes qui nuisent à ces animaux.
Nous ne sommes pas là pour domestiquer le hérisson
Victoire Khün
FNE revient donc sur les gestes à faire et ceux à éviter. Pour le moment, l’opération recensement n’a pas encore assez de recul pour analyser la qualité de ces données, mais sur les années 2021-2022, les signalements ont été multipliés par 1.5 à l’échelle nationale. La Franche-Comté est la région qui a le plus participé au recensement du hérisson avec 1190 animaux mentionnés l'année dernière. Même si Victoire Kühn rappelle la marge d’erreur de ces chiffres puisqu’un même animal peut être signalé plusieurs fois, elle reste satisfaite des données récoltées et espère que le mouvement continuera de se développer.