Un homme de 25 ans, ancien candidat RN, connu de la justice, était jugé ce mercredi 6 novembre, pour avoir mortellement blessé un septuagénaire en septembre dernier dans le Doubs. À bord d'une voiture débridée, il avait violemment percuté le véhicule de la victime et son passager, près de Pontarlier, au carrefour de La Vrine.
C'est une audience particulière qui s’est déroulée ce mercredi au tribunal correctionnel de Besançon. Quentin L., était jugé en comparution immédiate pour homicide involontaire et blessures involontaires, pour avoir provoqué un accident de voiture, le 7 septembre 2024. Le frontalier de 25 ans, chauffagiste en Suisse était ce jour-là au volant d'une Audi débridée.
Aux alentours de La Vrine, sur la RN57, sur la commune de Val-d’Usiers dans le Doubs, il double à vive allure plusieurs véhicules avant de percuter une Dacia qui venait de s'insérer dans la circulation. L'arrière de la Dacia est complètement écrasé. Le conducteur de 70 ans, Claude G. est éjecté de son véhicule et meurt. Son passager Roger M. est grièvement blessé. Le conducteur de l’Audi est placé en détention provisoire le 13 septembre jusqu’à son procès.
Un homme au profil particulier, déjà condamné par la justice
Le conducteur à l’origine de l’accident est un ancien militant du Rassemblement national. Il a été référent départemental adjoint de Génération Nation du Doubs en 2021. La même année, au mois de juin, il se présente comme candidat RN aux départementales du canton de Pontarlier sur la commune de La Cluse-et-Mijoux, sans succès.
Mais Quentin L. est aussi connu des services de la justice. Cinq mois après les élections, il est épinglé et condamné pour avoir dégradé sur plusieurs mosquées à Pontarlier, Montlebon et Besançon dans le Doubs. Des croix de Lorraine peintes en rouge sont découvertes sur les murs.
L'homme avait aussi été condamné en 2020 et 2021 pour violences conjugales et port d’arme de catégorie D.
Les familles des victimes présentes à l’audience, beaucoup d’émotion
La salle d’audience est pleine. Sur les bancs, les deux familles des occupants de la Dacia. Les familles sont liées, les deux hommes étaient beaux-frères et habitaient à proximité. Les familles se sont constituées parties civiles dans ce dossier, ainsi que quatre usagers de la route présents lors de l’accident.
Dans le box, le prévenu ne regarde pas la salle d’audience et reste tourné vers la cour. Il revient sur les circonstances du drame. Le jour de l’accident, ”je n’avais pas de but précis, je profitais du soleil. Je vais voir (le véhicule) à la dernière seconde quand il est en face de moi. Je regardais à ma gauche au niveau du restaurant, au moment où je lève les yeux sur la route, je le vois en face de moi”.
L’expertise menée par la gendarmerie n’a pas permis de définir la vitesse du véhicule au moment du choc. Les témoignages des automobilistes lus par le président indiquent un véhicule qui roulait “comme une flèche”, et que la Dacia avait largement le temps de passer avant que la file de voitures n’arrive. Le prévenu indique ne pas connaître sa vitesse lors de l’impact :
J’avais laissé la voiture rouler, c’est la 8ᵉ vitesse, entre 100 et 110 kilomètre heures, c’est à peu près le ressenti que j’avais à ce moment-là.
Quentin L.
Accro à la vitesse
Interrogé par la cour sur son rapport à la vitesse, Quentin L. a reconnu “aimer la vitesse et les voitures”. Le véhicule aurait dépassé quatre véhicules à grande allure à hauteur d’un virage. “Je crois que c’est simplement, que je pensais avoir confiance en moi. C’est une voiture étant donné que c’est la mienne, je la connais. Je sais qu’il y a un freinage d’urgence, ce genre de chose. Je n'aurais pas pu imaginer que ça finisse comme ça. En règle générale, j'ai plus les yeux sur la route que sur le compteur”, a-t-il déclaré à l’audience.
La procureure a souligné que 14 infractions étaient inscrites sur le permis de conduire de l’accusé depuis son obtention en 2017. Des vidéos dans lesquelles il se met en scène à très grande vitesse sur la route ont été retrouvées dans son téléphone.
Des regrets : “Je n'aurais jamais souhaité que ça arrive”
Le prévenu a exprimé des regrets suite à cet accident mortel. “Tout ça, ça entraîne des conséquences dramatiques, des conséquences qui ne sont pas faciles à vivre que je garde sur la conscience, je peux que regretter, je n'aurais jamais souhaité que ça arrive”, déclare Quentin L.
L’avocat des parties civiles, Maître Bernard a martelé que le prévenu était un “meurtrier” qui n’assumait pas la responsabilité du délit et qu'il se moquait des infractions qu’il commettait dans un “égoïsme”.
Des pleurs se font entendre dans l’audience pendant la plaidoirie. L’avocat dépeint que Roger M. passager de la Dacia percutée, est dans un centre de rééducation, moralement très affecté.
Cinq ans d'emprisonnement requis contre le chauffard
Le parquet a requis une peine de cinq ans d’emprisonnement avec maintien en détention, une annulation du permis de conduire et une interdiction d’en détenir un pendant un an. La procureure a aussi demandé une “interdiction de conduire tout véhicule à moteur pendant un an pour sécuriser les routes du Haut-Doubs”.
De son côté, l'avocat de la défense Maître Jérôme Pichoff a notamment plaidé que soit écartée la circonstance aggravante du délit de vitesse égale ou supérieure à 50 km/h. Le radar situé en amont du lieu de l’accident n’a pas flashé la voiture. Il a ajouté que la Dacia a manqué de visibilité avant de s’engager dans le carrefour et qu’il s’agit d’un secteur “accidentogène”. L’avocat a plaidé pour une peine d’emprisonnement aménagée avec un bracelet électronique et le partage de la responsabilité civile.
Avant le délibéré, le prévenu a tenu à s’adresser aux familles des victimes. “Je tiens à m’excuser auprès des familles, des victimes, je suis sincèrement désolée pour cet accident, a déclaré Quentin L.
Quatre ans de prison prononcés par le tribunal
Le tribunal a condamné le prévenu à 4 ans d’emprisonnement, notamment au vu “de la personnalité” de Quentin L, tout en suivant les réquisitions du parquet pour les interdictions de conduire, de permis et la saisie du véhicule. La circonstance aggravante de l’excès de vitesse supérieur ou égal à 50km/h n’a pas été retenue. À l’annonce de la peine, les familles des victimes ont exprimé un soupir de soulagement. Le prévenu de son côté n’a pas réagi.
Les intérêts civils des 23 parties civiles et de l’une des usagères de la route seront jugés en juin 2025.