Le site avait été repéré il y a 20 ans, mais les fouilles n'ont débuté que récemment. Les archéologues de l'Université de Franche-Comté cherchent à en savoir plus sur la présence des hommes dans le Haut-Doubs après la fonte des derniers glaciers, il y a 18.000 ans.
C’est le premier site préhistorique découvert dans la haute vallée du Doubs. À quelques kilomètres du lac Saint-Point, une équipe composée de deux archéologues de l'Université de Franche-Comté (UFC) et de plusieurs bénévoles locaux fouille depuis quelques jours ce qui s'est révélé être un lieu de présence de populations humaines, il y a plus de 7.000 ans.
"Ce site a été repéré par des prospecteurs, qui avaient trouvé que ce petit abri sous roche avait une bonne allure pour être un site préhistorique", explique Vincent Bichet, géo archéologue au laboratoire Chrono-environnement de l’Université de Franche-Comté, au micro de notre journaliste Marine Candel. "Et puis des prospections pédestres en mars l’année dernière dans les champs autour ont permis de montrer des petits éclats de silex."
C’est ainsi que les recherches ont pu être lancées sur cette zone peu, voire pas connue des archéologues. Et après quelques jours, les premières découvertes sont concluantes : "On ne s’attendait pas forcément à trouver des ossements sur ce site-là, c’est ce qu’on trouve le plus pour l’instant", décrit Claire Houmard, archéologue et enseignant-chercheur à l’Université de Franche-Comté.
Les ossements retrouvés, qui correspondent vraisemblablement à des restes de repas de mammifères, devront être expertisés par des archéozoologues. Plus intéressant, des fragments de silex ont été découverts, ils représentent des restes d’outils justifiant d’une présence humaine entre 9.000 et 5.000 ans avant J.-C.
Et notamment, "une toute petite pointe de flèche qui, elle, daterait bien les niveaux qu’on est en train de fouiller", estime Claire Houmard. À savoir 6.000 ans avant J.-C., entre le mésolithique et le néolithique.
Des derniers chasseurs-cueilleurs aux premiers agriculteurs
La pointe de flèche est un bon élément de datation puisqu’elle correspond à une période de transition, contextualise l’archéologue : "on serait avec des populations qui seraient soit les tout derniers chasseurs-cueilleurs, soit les tout premiers éleveurs agriculteurs."
C’est ainsi que l’équipe entrevoit les premières estimations de l’occupation humaine 8.000 ans avant notre ère. Sur un territoire dont on a peu de données préhistoriques. "On est sur un territoire qui a été complètement englacé il y a 20.000 ans, précise Vincent Bichet, il y a 18.000 ans, le glacier va fondre et laisser un territoire à disposition des hommes préhistoriques".
"Des communautés humaines vont venir, chasser, s’installer. Puis, progressivement, l’amélioration du climat va être favorable à l’installation des premiers agriculteurs, poursuit-il. On va passer d’une population très ténue de chasseurs, de cueilleurs, à une population d’agriculteurs. Petit à petit, sur plusieurs millénaires, à la faveur du changement du climat et de l’amélioration des sols."
Un rapport scientifique déterminera la poursuite des fouilles
Pour l’instant, le site recèle assez peu d’informations. "Ce qu’on peut dire, c’est qu’il y a eu une occupation, ils ont probablement consommé des animaux sur place, estime Claire Houmard. Reste à déterminer combien de temps ils sont restés et quels types d’activités ils ont fait."
Le chantier doit durer deux semaines, durant lesquelles les chercheurs espèrent effectuer le maximum de découvertes. Mais au vu de ces premiers résultats, l'équipe envisage déjà la suite : "ce site qui n’était pas considéré comme archéologique le devient, se réjouit Claire Houmard. Maintenant, on va faire une demande d’autorisation de fouilles pour les trois prochaines années". Une autorisation qui pourra être prolongée en fonction des rapports établis par l’équipe du laboratoire Chrono-environnement. "Notre objectif sera justement de montrer que la fouille a un intérêt scientifique."
Les scientifiques de l’UFC avaient déjà trouvé dans le lac Saint-Point des indices d’anthropisation, des pistes qui se sont donc révélées fructueuses, au regard de ces nouvelles découvertes. En septembre 2021, c’est le Mont d’Or qui avait intéressé l’équipe de Chrono-environnement. Des recherches qui avaient permis d’établir, voire de confirmer la présence humaine sur ces crêtes, théoriquement hostiles, mais suffisamment fournies en ressources et en abris, qui ont pu permettre à des populations d’y trouver refuge.