Les travaux à la Cluse-et-Mijoux et Jougne cristallisent des tensions. Les frontaliers, les routiers, les habitants et les commerçants de ces communes sont particulièrement touchés par cet aménagement de la RN57.
"On est tout énervés, on se fait des journées de fou", lâche Barbara, excédée par les travaux à la Cluse-et-Mijoux et Jougne. Cette habitante de Pontarlier (Doubs) est frontalière, elle travaille à Payerne, en Suisse. À cause de ces travaux qui durent depuis des semaines, voire des mois, la frontalière a multiplié ses temps de trajet. Avant, elle mettait 2h20 pour l'aller-retour, désormais, il faut compter 4h30.
Ce n'est pas tenable, on ne peut pas aller aux toilettes, on n'a rien à manger. On attend et on s'énerve.
Barbara* frontalière habitant à Pontarlier
Pour cette maman célibataire, cette situation est insupportable. Elle travaille trois jours par semaine comme infirmière et dort à présent dans sa voiture à côté de son travail. La Pontissalienne de naissance a l'impression d'être dans un cercle vicieux. Il y a six ans, elle travaillait à Pontarlier, mais les loyers ayant augmenté à cause de l'affluence des frontaliers, elle a été obligée de devenir frontalière, elle aussi.
Des routes inadaptées au trafic
Selon Barbara, ces problématiques routières témoignent d'un manque de reconnaissance de la part des élus. Raphaël Borne, frontalier depuis 25 ans, tire le même constat. L'administrateur du groupe Facebook Info Trafic Haut-Doubs emprunte quotidiennement les routes de Pontarlier pour aller jusqu'à Chavornay. En raison des travaux, il est obligé de passer par des routes plus petites : "Nous devons faire un détour sur des routes qui ne sont pas adaptées aux vus du nombre de frontaliers, touristes ainsi que des camions".
Le trafic a triplé en 20 ans, on ne fait rien pour les routes. Dès qu'il y a une déviation, ça devient la misère.
Barbara, frontalière habitant Pontarlier
Raphaël Borne a interpellé la députée du Doubs, Annie Genevard. Celle-ci lui a répondu être au courant de la problématique. Elle aurait appelé le maire de Jougne pour lui faire part de la situation.
Les bouchons cristallisent des tensions entre les différents acteurs du territoire. "Il vous faut de la patience et du savoir-vivre mais apparemment les frontaliers n'ont aucun des deux... Tout ne vous est pas dû...", réagit l'internaute "Haut Là" à la publication d'un frontalier se plaignant des travaux sur le groupe Facebook Info Trafic Haut Doubs.
Les travaux de la Cluse-et-Mijoux concernent un changement de conduites d'eaux et de gaz. Ils ont débuté le 13 mai et se termineraient a priori le 2 août 2024. Pour Jougne, la construction d'un rond-point a débuté le 13 juillet avec une circulation alternée. D'après Denis Bertin-Guyon, adjoint des travaux à Jougne, la circulation sur deux files reprendra du 2 août au 19 août puis alternera par période de deux ou trois jours jusqu'au 10 septembre.
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Des travaux de sécurisation à Jougne
L'adjoint de la commune regrette ces désagréments. Mais pour lui, ces travaux étaient nécessaires. "Ce sont des travaux de sécurisation", explique-t-il. Cette commune de 2 000 habitants, située à proximité de la Nationale 57 se devait de construire un rond-point. Les habitants de Jougne empruntent la rue du Faubourg et traversent la Nationale 57 pour se rendre au supermarché bi1. "On n'a pas le choix de faire ces travaux, le jour où il y a un accident important, qu'est-ce qu'il se passe ? ", questionne-t-il.
Jeudi 25 juillet, une réunion s'est tenu avec le sous-préfet de Pontarlier, la mairie de Jougne et les utilisateurs touchés (notamment le syndicat des routiers de Franche-Comté) par l'ensemble des travaux. "Le sous-préfet a dit qu'il allait signaler toute la problématique de la Nationale 57 au préfet du Doubs", rapporte Denis Bertin-Guyon. Quant à Raphaël Borne, l'administrateur du groupe Facebook Info Trafic Haut-Doubs, il regrette de ne pas avoir participé à cette réunion.
La Nationale 57 représente un trafic de 16 000 véhicules par jour dont 1 400 camions. "Ce sont beaucoup de livraisons qui vont en Suisse", précise l'adjoint. "Avec les travaux [les routiers] ne peuvent faire que trois rotations au lieu de quatre. Leurs sociétés perdraient environ 230 000 euros par mois de chiffre d'affaires", souligne-t-il.