VIDEOS. "Consommer local, c'est bon pour l'alimentation et les emplois", en Franche-Comté, des agriculteurs et des consommateurs ont choisi les circuits courts

Dans le Doubs et le Territoire de Belfort, on vous emmène à la rencontre d'agriculteurs, d'artisans et de consommateurs qui veulent se passer des grandes surfaces. Ils ont choisi les circuits courts et la vente directe, pour ménager leur pouvoir d'achat et manger des produits de qualité.

La ferme est à l’écart de la route, au bout d’un chemin de terre et de cailloux. On hésite presque à circuler en voiture dans cet espace apaisé, de nature et de forêt.

C’est là, dans le Doubs,  que Nuria Loyant et Jérémy Coley vivent et travaillent, à la ferme paysanne et bio d’Uzelle.

Leur ferme est une des plus petites de la région. Une vingtaine d’hectares, avec des chèvres, des vaches, des poules et des cochons.

L’installation, en 2014, n’a pas été simple. Les organismes agricoles ne voyaient pas le projet d’un bon œil. Pensez donc, un élevage avec une telle diversité d’animaux, la fabrication de fromages et la vente directe ? Non, la ferme ne sera pas viable !

On nous a beaucoup dit que ce n’était pas possible ! Mais on a prouvé qu’on pouvait y arriver.

Nuria Loyant, agricultrice à Uzelle

Nuria ajoute : "On a deux emplois, Jérémie, moi, et on a une salariée à mi-temps à la fromagerie, notre ancienne apprentie. Ça se passe bien, on arrive à en vivre, à nourrir nos animaux et à nourrir nos clients".

Bio et bien-être animal

Nuria et Jérémy voulaient une ferme la plus autonome possible. Ils n'achètent pas d'aliments pour les animaux. Les vaches sont au pré, ou nourries au foin, en hiver. Les chèvres et les poules trouvent dehors ce dont elles ont besoin.

Le bien-être animal fait partie du quotidien : un des poulaillers est une maison de retraite !  Les poules les plus vieilles, qui ne pondent presque plus, ne sont pas abattues. Elles y finissent tranquillement leur vie. "On leur doit bien ça, après tout le travail qu'elles ont fait pour nous !", précise Nuria.

Reportage : "Place du local", un e-marché de produits frais et locaux. Intervenants : Nuria Loyant, agricultrice bio, Julien Pradié, Josselin Pradié, Arnaud Dudoit, e-marché Place du local.

La ferme d’Uzelle pratique la vente directe pour la quasi-totalité de ses productions. C'est une question d'éthique :

Chaque fois que les consommateurs dépensent un euro pour acheter nos fromages, ils nous disent on est d’accord avec votre système de production, ça c’est agréable !

Nuria Loyant, agricultrice à Uzelle

E-marché de produits frais et locaux

Il est 11h00. Une camionnette se gare près de la ferme. Julien Pradié vient récupérer une commande. Il est un des gérants de "Place du local", un marché de produits frais en ligne. Il charge un plateau de fromages et des faisselles dans sa camionnette. Quelques mots échangés avec Nuria. Il repart et poursuit sa tournée des producteurs. En début d'après-midi, il arrive au dépôt d’Etupes, près de Montbéliard, dans le Doubs.

Sur place, les salariés de "Place du local" pèsent, emballent et préparent les commandes faites en ligne par les clients. Dans quelques heures, elles seront livrées à domicile, ou récupérées directement par les clients, au magasin du dépôt.

C'est Josselin Pradié, le frère de Julien, qui a eu l’idée de ce e-marché local de produits frais. Son emploi du temps ne lui permettait pas d’acheter des produits frais près de chez lui :

Si on veut acheter directement chez des producteurs, ça prend beaucoup de temps, et d'argent, surtout en ce moment, avec la hausse du prix des carburants.

Josselin Pradié, fondateur du e-marché "Place du local"

Il a donc imaginé  un e-marché de produits locaux, avec tournée des producteurs et livraisons aux clients.

Fondé en 2016, "Place du Local" emploie une vingtaine de salariés en Franche-Comté.

Eleveur-fromager, pour boucler la boucle

A la ferme du Breuil, à Lavernay, dans le Doubs, Eloi Mulin termine de prendre soin de ses vaches. Il traverse la route, devant la ferme, et rejoint la fromagerie. Sa fromagerie. Dans le tank à lait accroché à la voiture, la traite du matin.

Eloi a été fromager dans des fruitières à comté. Il est devenu associé dans l’exploitation familiale de sa conjointe. Il est devenu éleveur-fromager.

J’aime boucler la boucle ! Le matin, je peux avoir une bonne surprise, avec la naissance d’un veau, je m’occupe des bêtes. Puis, avec leur lait, je fais du fromage que je vends à mes clients

Eloi Mulin, éleveur et fromager

Soin aux animaux, fabrication du fromage, vente directe : Eloi reste discret sur les longues journées de travail, 7 jours sur 7. Mais il considère que c'est une nécessité. Les grandes enseignes prennent des marges et dictent leur prix : il perdrait tout le fruit de son travail.

Epicerie  de produits locaux

Parmi les clients d'Eloi Mulin, il y a une épicerie de Saint-Vit, les Saisons, à quelques kilomètres de là. Gaëtan Pelletrat de Bordes, un des co-gérants de l'épicerie, vient goûter un nouveau produit, une tomme à l’ail des ours. Le fromage est encore jeune, mais son goût est déjà prometteur.

Reportage : A Saint-Vit, dans le Doubs, deux associés ont ouvert une épicerie de produits locaux. Intervenants : Antoine Boileau, société "Delicassie", Gaëtan Pelletrat de Bordes et Thomas Cuenot, co-gérants de l'épicerie, Josette Champenois, cliente du magasin, Eloi Mulin, éleveur-fromager dans le Doubs.

Faire bosser le fromager, le maraîcher, la biscuiterie, en local, c'est des emplois, des familles, des enfants dans les écoles, des moyens pour les communes rurales et des services publics.

Gaëtan Pelletrat de Bordes, co-gérant d'une épicerie

Il ajoute : "c'est ce qu'on dit à nos clients qui quittent les grandes surfaces pour venir chez nous, il faut que les gens le comprennent !"

Tour de France gustatif

De retour au magasin de Saint-Vit, Gaëtan met en rayon quelques fromages de la ferme du Breuil.

Thomas Cuenot, son collège et co-gérant, explique leur projet de magasin : "Si on fait du direct, avec des  producteurs locaux, c'est pour mettre en valeur leurs produits, en parler à nos clients. Au fil du temps, un lien se crée, on nous demande une petite recette, un bon produit".

Avant d'ouvrir leur épicerie, Gaëtan et Thomas se sont imposés un tour de France. Ils ont goûté des centaines de produits. Ils ont convaincu plus de 200 producteurs et artisans de devenir leurs fournisseurs.

Le travail  semble payer, comme le confirme Josette Champenois, une fidèle cliente du magasin :

C'est important de manger des produits locaux, de saison, c'est une question de bonne alimentation, et ça fait travailler nos gens !

Josette Champenois, client de l'épicerie

Artisan et fabricant de pain d'épices 

Un peu partout dans le magasin, des produits racontent des parcours étonnants. Comme celui d'Antoine Boileau. Après des études de commerce, Antoine a travaillé  pour un constructeur automobile, à l'étranger. Le temps de réaliser que ce n'était pas la vie dont il rêvait.

De retour chez lui, dans sa cuisine, avec une recette de sa grand-mère, il se lance dans la fabrication de pain d'épices.

Aujourd'hui, sa société, "Délicassie", emploie deux salariées. Et des centaines milliers d'ouvrières... des abeilles ! 

Les ruches sont derrière le bâtiment. Elles appartiennent à un apiculteur qui livrent directement le miel à l'entreprise d'Antoine Boileau :

Les ruches sont intégrées dans notre éco-système, avec les fleurs du Haut-Doubs et les sapins, ces saveurs seront dans le pain d'épices.

Antoine Boileau, fabricant de pain d'épices

"On découvre de nouveaux légumes"

18h00, dans une cour intérieur d'un immeuble  de Besançon. Une dizaine de personnes attendent patiemment de récupérer un panier de produits frais. Tous adhérent à "La cagette du coin", une AMAP, une association pour le maintien d'une agriculture paysanne. Ils paient une cotisation annuelle, qui leur donne droit chaque semaine à un panier de fruits, légumes, fromages, oeufs, ou encore de pain.

Martine et François Cali habitent juste à côté. Ils ont découvert l'AMAP depuis peu. Et ils ne peuvent plus s'en passer :

Dans un magasin, on achète toujours un peu la même chose, ici on n'a pas le choix, et c'est bien, on découvre de nouveaux légumes, de nouvelles recettes !

Martine et François, adhérents de l'AMAP

Reportage : découverte de "la cagette du coin", une l'AMAP du Doubs, une association pour le maintien d'une agriculture paysanne. Intervenants : Louis Dumez et Gaëtan Jeannin, maraîchers bio, Isabelle Cerisier, Ferme bio la Grange Mélot, Martine et François Cali, adhérents de l'AMAP. 

L'AMAP est une forme de vente directe. Grâce à elle, une partie du chiffre d'affaire est assuré par avance, ainsi que les débouchés pour les productions. Comme le précise Louis Dumez, maraîcher bio à la Grange Melot, à La Chevillotte, dans le Doubs : 

Ce matin, je récolte 36 salades, pour 36 paniers. Si je fais les marchés et qu'il pleut, je ne vendrai pas tout, une partie des salades sera perdue.

Louis Dumez, maraîcher bio

Le circuit court, une forme de vente encore marginale

Vente à la ferme, magasins de producteurs, association pour le maintien d’une agriculture paysanne : la crise sanitaire avait dopé les ventes en circuits courts, au détriment du commerce traditionnel. Mais le soufflé est un peu retombé. Le contenu de nos assiettes se semble pas être une priorité, contrairement au prix de l'énergie et des carburants, par exemple.

Gaëtan Jeannin, maraîcher bio à la Grange Melot, à La Chevillotte, le regrette : 

La question alimentaire n'est pas considérée comme relevant de la puissance publique, si c'était le cas, on paierait correctement les paysans, on subventionnerait bien mieux l'agriculture bio, comme on le fait pour la santé ou l'éducation.

Gaëtan Jeannin, maraîcher bio

Reportage :  En France, la vente en circuits courts représentent moins de 10% des achats alimentaires. Intervenants : André Racine et Jean-Pierre Huguet, jardiniers amateurs, Gaëtan Jeannin, maraîcher bio, Gaëtan Pelletrat de Bordes, gérant d'une épicerie, Josselin Pradié, e-marché Place du local.

Il est difficile de dire si le retour de l’inflation va éloigner les consommateurs des produits de saison, cultivés à proximité et vendus en circuits courts.

Pourtant, en évitant les intermédiaires, agriculteurs, éleveurs et maraichers, peuvent espérer vivre un peu mieux d'un métier trop souvent mal payé.

Quant aux consommateurs, beaucoup considèrent, souvent à tort, que le prix des aliments est plus élevé que dans le commerce traditionnel. En France, la vente directe du producteur au consommateur représente moins de 10% des achats alimentaires.

Reportages : Raoul Advocat, Fabienne Le Moing, Vincent Grandemange, Thomas Hardy, Caroline Seytre. Ces reportages ont été tournés juste avant l'épisode de sécheresse qui a touché le monde agricole en juillet et août 2022. 

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