Le gouvernement a annoncé mercredi 16 février une aide d'urgence pour les résidents de copropriétés et de logements sociaux. Elle vise à compenser la hausse du prix du gaz. Copropriétés ou particuliers : voici quelques conseils pour réduire la facture.
J'ai l'impression de payer pour une famille de 4 personnes, alors que je vis seule dans un appartement de 50m2
Chloé, 23 ansUne habitante de Dole (Jura)
Vous êtes nombreux à voir « flamber » vos factures de gaz, ces derniers mois. C'est par exemple le cas d'Elvire, 42 ans. Avec son conjoint et son enfant, elle habite Grandfontaine (Doubs). Dans cette ville située près de Besançon, elle s'est abonnée pour recevoir du biogaz : « Il y a 2 ans, j'ai souscrit un contrat chez le fournisseur Ilek. Il m'approvisionnait pour un tarif fixe de 1.700 euros par an ».
À la fin de son engagement, elle découvre une très mauvaise surprise. « En 2022, à la fin du tarif fixe, mon échéancier est passé à 3.100 euros. Ça représente plus de 113 euros par mois ! Je suis donc vite repartie sur une offre de gaz classique chez EDF avec une augmentation de 17 euros par mois au final », se souvient la mère de famille.
Une déconvenue dont Chloé se serait aussi passée. Cette chargée de communication de 23 ans payait de base « 50 euros mensuels » pour sa facture de gaz. Cette habitante de Dole (Jura) paye désormais « 90 euros par mois ». Une augmentation de près de 40 euros en un an inadmissible, pour la jeune femme. « Il y a cette hausse, sans compter la régularisation de 500 euros au mois de janvier ! J'ai l'impression de payer pour une famille de 4 personnes, alors que je vis seule dans un appartement de 50m2 », peste-t-elle.
Quelle est la hausse du gaz ces derniers mois ?
Le prix du gaz s’emballe. En un an, les tarifs ont été multipliés par quatre. Il coûtait environ 20 euros le MWh (mégawattheure) début 2021, indiquait le 15 février Francis Perrin, directeur de recherche à l’Institut de relations internationales dans une interview à Ouest France. Aujourd’hui, le prix se situe autour de 80 euros.
Les prix du gaz devraient se maintenir à des niveaux élevés cette année, estime de son côté l'institut public IFP Energies nouvelles. Les cours ont atteint des records ces derniers mois en raison d'un ensemble de facteurs : la flambée sur les marchés s’explique par la reprise, les conditions climatiques mais aussi par la baisse des livraisons de gaz russe.
« À la fin 2022, on (sera) toujours à des niveaux très, très hauts, de l'ordre pour l'Europe de 90 euros du mégawattheure », « à comparer à la situation de 2019 où on était à 20 euros », a prédit Pierre-Franck Chevet, président de l’IFP.
Peut-on changer de fournisseur à tout moment ?
Depuis 2008, il est en effet possible avec la loi Chatel de quitter son fournisseur d’énergies (gaz, électricité), à tout moment. « On n’est plus pieds et poings liés à son fournisseur », rappelle Benjamin Capelli, juriste de l'association UFC-Que Choisir dans le Doubs. Cette loi adoptée il y a près de 15 ans s'applique aussi aux contrats d'électricité et de gaz.
Les clients l’oublient pourtant, alors que la plupart des contrats de fourniture d'énergie prévoient une clause de « tacite reconduction ». En clair, les fournisseurs renouvellent automatiquement le contrat à sa date de fin. « Je vois régulièrement des cas où les consommateurs pensent être liés pour toute la durée de leur contrat avec leur fournisseur, comme pour les contrats de téléphone », constate le spécialiste.
Faire bien attention au type de contrat
Il peut exister plusieurs formes de facturation concernant les prix du gaz. D'après Benjamin Capelli, juriste de l'association UFC-Que Choisir dans le Doubs, il faut d'abord savoir dans quel type de contrat on s'engage. « Il peut y avoir des contrats basés sur la tarification libre, où le prix de vente du gaz est fixé par rapport aux tarifs réglementés. Ce prix varie en fonction de ces tarifs : s'il augmente, le prix augmente et inversement si les tarifs réglementés baissent », explique le juriste.
Tout peut sembler clair pour ce type de contrat. D'autres facteurs peuvent pourtant s'inviter dans la formule de calcul de votre facture. C’est là qu’il faut faire attention, selon Benjamin Capelli. « Plusieurs indices peuvent être pris en compte en même temps. Le tarif réglementé peut augmenter par exemple de 30%, mais on peut quand même se retrouver avec une hausse de 60% sur sa facture, avec le jeu de ces indices supplémentaires », alerte le juriste.
Le membre de l’association UFC-Que Choisir préconise donc de vérifier la méthode de calcul utilisée pour fixer le prix, dans ce type de contrat. « Quels indices sont pris en compte pour la facturation ? Est-ce juste celui des tarifs réglementés ou est-ce les tarifs réglementés et d’autres indices à la fois ? Le contrat prévoit-il de s’adapter aux tarifs réglementés, donc d’augmenter le prix si ces tarifs montent et de baisser les prix si ces tarifs baissent ? », énumère Benjamin Capelli.
Autre type de facturation possible : le tarif fixe sur une période donnée. « Il est avantageux car il permet de savoir ce qu’on paye sur une période donnée. Il permet aussi de se préserver d'une hausse, en cas d'augmentation du tarif réglementé. En revanche, en cas de baisse des tarifs, il peut être coûteux », rappelle le juriste de l’association UFC-Que Choisir dans le Doubs. Au consommateur de faire jouer sa liberté de choix, d'autant que le marché français compte actuellement au moins 40 fournisseurs d'électricité et de gaz.
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Prudence sur certains fournisseurs alerte la CLCV
L'association de consommateurs CLCV alerte toutefois sur les pratiques de certains fournisseurs de gaz. Elle vise en particulier CDiscount Energie et sa sous-marque GreenYellow. La marque incite ses clients « à résilier leur offre de gaz à prix fixe », pour recevoir en échange « une indemnité ».
L'association émet l'hypothèse que ces offres à prix fixe « signées avant le début de la crise de l'énergie, soit mi-septembre, soit une belle opportunité [pour les consommateurs]... qui coûte probablement cher aux fournisseurs ».
Pour CLCV, le consommateur risque de sortir perdant de cette proposition : « le montant du préjudice sera fréquemment de plusieurs centaines d'euros ». Elle déconseille donc aux consommateurs d'accepter ces propositions « suggérant d'abandonner leur contrat à prix fixe en échange d'une très maigre rétribution, de quelques dizaines d'euros ».
Aides et bouclier tarifaire
En France, l’augmentation de 12,6 % en octobre 2021 du tarif réglementé du gaz n’a pas été suivie de nouvelle hausse. L’Etat a bloqué les prix. Le Premier ministre Jean Castex a annoncé fin septembre 2021 « un bouclier tarifaire » avec un blocage du tarif réglementé du gaz. Les tarifs réglementés du gaz seront gelés à leur niveau d'octobre 2021 jusqu'à fin juin 2022.
Les particuliers étaient concernés, mais pas les copropriétés. Le 16 février, Matignon a finalement annoncé que « les logements chauffés au gaz et non éligibles au tarif réglementé de vente (copropriétés, logements sociaux, logements chauffés par un réseau de chaleur, etc.) pourront bénéficier d'une compensation visant à couvrir la hausse des prix de marché ».
Ils n’étaient pas concernés jusqu’ici par le gel des tarifs réglementés de l’énergie, décidé en janvier dernier.