Le procès en appel de Nicolas Zepeda, accusé de l'assassinat de son ex-petite amie Narumi Kurosaki en 2016, se poursuit à Vesoul (Haute-Saône). L'accusé a été formellement reconnu par deux témoins et a avoué avoir menti sur l'objet de sa venue à Besançon. Revivez l'intégralité les débats du troisième jour. Le procès se déroule du 4 au 22 décembre 2023.
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L'audience est suspendue jusqu'à jeudi 9h.
20h51 : La dernière témoin de la journée est appelée à la barre : Ludivine S. "J'ai très peu vu Nicolas Zepeda lors de son départ de notre hôtel, [dans la nuit du 2 au 3 décembre 2016]", dit la témoin. Comment était-il habillé ? Avait-il des bagages ? "Je crois qu'il avait un bagage mais il n'était pas chargé... Je ne sais plus...", répond Ludivine S., fouillant dans sa mémoire 7 ans après les faits.
20h45 : Un témoin se prénommant Francis B. s'installe à la barre. Il était serveur de l'hôtel-restaurant "La table de Gustave" dans lequel ont dîné Narumi Kurosaki et Nicolas Zepeda, à Ornans, le 4 décembre 2016 au soir. "Ils ne se parlaient pas", se souvient le serveur. Une photo de Narumi Kurosaki est projetée à l'écran. Elle est installée à la table du restaurant où travaille le serveur et prend en photo son plat. Nicolas Zepeda avait dormi une nuit, seul, dans cet hôtel-restaurant. La nuit du repas avec Narumi Kurosaki, il ne dort pas sur place mais repart avec elle confirme le serveur. Me Cormier, avocat de Nicolas Zepeda, s'attarde sur le menu qu'ont choisi les deux jeunes.
C'était un couple pas souriant. Je les sentais pas amoureux.
Francis, serveur du restaurant à Ornans
20h14 : La valse des témoins continue. Christophe H. est capitaine pénitentiaire. Il était responsable du quartier disciplinaire de la prison de Besançon, dans lequel a séjourné l'accusé pendant 6 mois. Nicolas Zepeda a été incarcéré le 24 juillet 2020. "On a eu à gérer Nicolas Zepeda sans aucun souci. Je n'ai rien à dire de mauvais contre lui", explique l'homme à la barre. Le Chilien est resté six mois à l'isolement à Besançon et n'a jamais eu de manifestation d'énervement ou d'agressivité comme l'explique le témoin. Me Laffont, ancienne avocate de Nicolas Zepeda, a déposé plainte pour des faits de violence présumés commis le 13 janvier 2022 à l'encontre de Nicolas Zepeda, de la part d'un surveillant pénitentiaire. Cette procédure a été classée sans suite faute de preuve. "Si son attitude avec les gradés, la direction et les officiers est toujours bonne, il est courtois, il est poli, son positionnement avec les surveillants est tout autre : hautain, désagréable. Il va même jusqu'à siffler les surveillants pour rentrer de promenade. Comment analysez-vous cette discordance entre un rapport de directeur de maison d'arrêt et votre ressenti ?" interroge Etienne Manteaux. Le témoin dit n'avoir jamais eu connaissance d'un signalement contre l'attitude de l'accusé pendant qu'il était là.
Me Portejoie précise que Nicolas Zepeda a fait l'objet de plusieurs expertises psychologiques durant son passage à Besançon. L'accusé interpelle le témoin pour lui rapporter des faits. "Vous m'avez dit que l'expert pensait que je suis coupable", dit Nicolas Zepeda. "Je n'en ai pas souvenir. Je n'ai pas accès à ces informations. Je suis désolé. Je ne l'ai pas dit", répond le témoin, ce qui n'aide pas beaucoup l'accusé.
19h38 : Témoin suivant. La journée d'audience qui a débuté à 9h s'étire. Amr A. s'installe à la barre. Il était dans la même classe que Narumi Kurosaki au CLA de Besançon en 2016. "Pour moi c'était une fille sociable, elle était différente des autres Japonais. Elle parlait avec nous, elle partageait", se souvient le témoin. Des messages échangés entre lui et le téléphone de la victime sont projetés, en date du 7 décembre 2016. Le message indique que Narumi Kurosaki est à Lyon pour un problème de passeport. Les jours suivants, le 9 décembre, les échanges restent froids de la part de Narumi Kurosaki. Pour rappel, les enquêteurs soupçonnent l'accusé d'avoir piraté les comptes sociaux de la victime après l'avoir tuée.
19h11 : L'audience reprend. Une clé USB emmenée par Humberto Zepeda, le père de l'accusé, est transmise à la cour. En attendant d'en connaître le contenu, un nouveau témoin s'avance à la barre. Safet L. est accompagné par une interprète serbe mais s'exprime dans un français assez clair. Ce dernier connaissait Narumi Kurosaki. Il était en cours de français avec elle au CLA. Il échangeait des messages avec elle. "Ça va ma belle ?", avait écrit à Narumi le témoin le 10 décembre 2016, surnom qu'il utilisait par sympathie à son égard parfois et pour "parler comme les Français". "Belle ?" avait répondu le téléphone de Narumi Kurosaki, le 11 décembre 2016. "Les derniers messages étaient courts, sans smiley ou - ahahah -", s'était étonné le témoin. Les échanges entre les deux étudiants sont projetés dans la salle. On constate que les réponses sont effectivement plus froides que d'habitude.
L'audience est suspendue 10 minutes.
« La parole se libère c’est positif. Il évolue, il avance. Le procès sera long. J’espère que les prochains jours cela va encore évoluer » dit Me Portejoie par rapport à son client qui évolue dans sa version notamment sur sa présence à #Besancon. #Zepeda pic.twitter.com/bLlw0pa81q
— Sarah Rebouh (@srebouh) December 6, 2023
18h41 : Lecture de la déposition d'une autre voisine de Narumi Kurosaki, non présente ce jour à Vesoul. Elle parle également de bruits d'une femme qui crie, de "boom", et confirme que la scène a duré environ 10 minutes.
18h38 : Au total, onze personnes ont entendu des bruits "horribles" dans la résidence dans laquelle vivait la victime, dans la nuit du 4 au 5 décembre 2016. Malheureusement, personne n'a prévenu la police. "Si vous aviez appelé la police, il ne se serait probablement rien passé car les bruits se sont arrêtés. Les policiers n'auraient sûrement pas ouvert toutes les chambres", tente Etienne Manteaux, dans le but d'apaiser quelque peu la culpabilité que semble encore porter aujourd'hui le témoin.
18h17 : Témoin suivant : Adrien L. est appelé à la barre. Même propos que les témoins précédents concernant les cris horribles entendus dans la nuit du 4 au 5 décembre 2016. "J'ai été réveillé par un grand cri strident [de femme], qui a duré très longtemps. Et ce cri s'est terminé par un râle, comme quelqu'un qui n'avait plus de voix", dit le jeune homme qui résidait dans la chambre 132, très proche de la chambre de la victime. "Pour moi, le bruit vient de ma gauche, de sûr", dit-il. Selon le plan que nous avons sous les yeux, cela peut correspondre à la chambre de la victime. "Aujourd'hui, je suis persuadé que c'est la vie qui quittait le corps d'une personne. Comme quelqu'un qui rendait son dernier souffle", explique le jeune homme.
J'y repense souvent. J'aurais dû appeler les forces de l'ordre. Je repense à ce cri et à ce que ça a pu engendrer derrière.
Adrien, voisin de chambre de Narumi Kurosaki
18h04 : Nouveau témoin appelé à la barre. Il s'appelle Lalou P. et est étudiant infirmier. Il n'était pas présent lors du premier procès. "Au moment du début de l'affaire, je domiciliais dans la résidence du Crous où se seraient déroulés les faits, au 4e étage. Je n'ai rien entendu ce soir-là", dit l'homme, qui précise avoir vu un individu qu'il n'avait jamais vu auparavant dans son immeuble. Il semble ne pas avoir énormément d'informations précises et sa déclaration est un peu aléatoire.
18h : La témoin Sefika A. n'est pas présente dans la salle. Sa déposition est lue par le président. Elle aussi a été réveillée par des cris vers 3h dans la nuit du 4 au 5 décembre 2016. Ils étaient "très forts, de douleur, [et] ont duré environ 10 minutes". "J'ai aussi entendu des bruits comme si quelqu'un tapait dans un radiateur".
17h59 : Me Cormier, avocat de Nicolas Zepeda, interroge le témoin au sujet de l'attitude d'Arthur Del Piccolo et de la provenance des bruits entendus. "Je suis catégorique. Les bruits venaient de la droite de ma chambre", dit à nouveau le témoin à la barre, contredisant le témoin Shintaro Obata, qui situait ces bruits plutôt en bout de couloir. "Je n'y crois pas du tout", répond Nabil D. sans hésitation. Le président lit la déposition d'une étudiante. C'est elle qui a vu un homme avec un bouquet de fleurs dans une main, et dans l'autre une canette, essayer de se faire ouvrir la porte d'entrée de la résidence Rousseau. "Il frappait à toutes les portes mais n'est pas allé plus loin que celle de Narumi. Une porte s'est ouverte. Une femme a ouvert et j'ai entendu des gloussements. Je ne sais pas si c'était la chambre de Narumi Kurosaki ou une autre", a cité la femme, sans pouvoir reconnaître formellement Nicolas Zepeda.
17h40 : Nabil D. explique avoir vu un homme étranger à la résidence entre le 30 novembre et le 7 décembre 2016 portant un bouquet de fleurs et tentant d'entrer dans son bâtiment. Il s'est fait ouvrir la porte par des étudiants. Était-ce Nicolas Zepeda ? La question se pose. Les avocats des parties civiles posent ensuite leurs questions. "Avez-vous vu Narumi après la nuit du 4 au 5 ?" demande Me Schwerdorffer. "Je ne l'ai plus jamais revue", dit le témoin. L'avocat général Etienne Manteaux lui fait préciser les distances en s'appuyant sur le plan projeté dans la salle.
17h14 : Le plan de l'immeuble dans lequel vivaient le témoin et la victime est projeté dans la salle. L'homme détaille le croquis et indique les entrées et les sorties du bâtiment. "Ce hurlement-là m'a glacé le sang. Un silence aussi glaçant ensuite, et un deuxième hurlement, de femme avec certitude", dit Nabil D., en indiquant que le bruit très proche venait de sa droite. Sa chambre se situe à la gauche de celle de Narumi Kurosaki, avec qui il avait sympathisé. "C'était à côté de moi, je dirais à mon étage", explique le jeune homme au sujet des bruits. Il avait aussi indiqué aux enquêteurs avoir entendu des bruits "de frappement ou de meubles qui se déplacent". Le témoin, très clair dans ses explications, précise qu'il connaissait également Arthur Del Piccolo avec qui il entretenait des liens "très cordiaux". Nabil D. se souvient d'Arthur Del Piccolo et du message de rupture qu'il avait reçu du téléphone de Narumi Kurosaki. "Il était peiné", dit l'homme à la barre. La justice soupçonne Nicolas Zepeda d'avoir envoyé lui-même ce message avec le téléphone de la victime, pour éloigner les amis de cette dernière.
C'était une personne en danger qui hurlait, pas un cri de joie.
Nabil D., ancien voisin de Narumi Kurosaki
16h43 : L'audience reprend avec l'audition de Nabil D., âgé de 25 ans. Il était étudiant en 2016 et résidait dans le même bâtiment et le même étage que Narumi Kurosaki. "Un soir il y a eu un hurlement, un premier, entre 3h et 4h du matin et cela m'a réveillé. Peu de temps après il y a eu un second hurlement. Un ami qui habitait au 3e étage l'a aussi entendu. Je me suis habillé, je suis sorti dans les couloirs au premier étage pour inspecter les choses. Je suis monté au 2e étage, pas de bruit, et au 3e étage non plus. J'ai rejoint mon ami. On est restés un peu de temps ensemble, on a passé la tête par les fenêtres et on n’a plus rien entendu. On s'est dit que ce n'était rien de grave, et on est retournés se coucher", débute l'intéressé. Ces faits se sont produits entre le 4 et le 5 décembre 2016, à 3h21, date à laquelle Narumi Kurosaki a disparu. Il s'agit du même moment que celui indiqué par la précédente témoin interrogée. Il raconte que par la suite, les étudiants japonais ont attendu tous les soirs Narumi Kurosaki devant sa chambre, la n°106.
L'audience est suspendue une quinzaine de minutes.
15h55 : "Pourquoi n'avez-vous pas appelé la police ?", demande Etienne Manteaux, avocat général. "J'étais terrifiée. Gelée de peur. J'étais dans un pays étranger et je ne savais même pas quel numéro appeler. J'avais 19 ans. Je ne savais pas quoi faire. J'avais juste peur", répond la jeune femme. Aucune des personnes ayant entendu les bruits cette nuit-là n'a appelé la police. Me Cormier, avocat de Nicolas Zepeda, demande de nouvelles précisions à Rachel R. sur l'accent de l'homme qu'elle a croisé dans la résidence ainsi que sur la taille du couloir dans lequel se trouvaient la chambre de la témoin et celle de la victime. "Quand j'ai ouvert les photos de la police, je me suis mise à pleurer, car j'ai compris que j'avais parlé avec une personne qui pouvait être accusée d'assassinat", précise Rachel R. Me Cormier s'étonne que seules deux photos de l'accusé aient été envoyées à la témoin en 2017.
15h32 : Les avocats passent aux questions pour la troisième témoin de la journée. Il devra attendre la fin des questions à Rachel R. "Il y avait des cris, comme sur on-off, on-off. Je n'ai pas entendu un cri plus fort qu'un autre mais plusieurs", précise-t-elle toujours au sujet des cris entendus. Les avocats passent aux questions pour la témoin. Me Schwerdorffer, avocat d'Arthur Del Piccolo, interroge la témoin en rappelant la version défendue par l'accusé. Selon Nicolas Zepeda, il aurait eu des rapports sexuels avec Narumi Kurosaki et elle aurait poussé des cris de plaisir intense. La témoin a la mine défaite. Elle répond : "Non, absolument pas. La police m'a posé cette question. Et, non. Ce n'était pas quelqu'un qui était en train d'avoir un rapport sexuel". L'une des soeurs de Narumi, Honami Kurosaki, craque dans un sanglot et sort de la salle précipitamment.
15h14 : Les échanges sont toujours aussi compliqués entre Vesoul et Londres, avec beaucoup de répétitions et de problèmes de compréhension. Rachel R. semble perdre quelque peu patience mais continue à répondre aux questions du président François Arnaud. Concernant les cris entendus dans la nuit du 4 au 5 décembre 2016, la témoin confirme à nouveau qu'il s'agissait de cris de femme et d'une seule voix de femme qui criait. "J'étais complètement terrifiée. C'était très effrayant. J'avais 19 ans, je ne savais pas quoi faire", répète-t-elle. "C'était un cri de douleur ou de peur, mais surtout de douleur à vous glacer le sang", insiste la témoin, qui répète ce qu'elle a dit précédemment. La question de la provenance des cris et de la durée se pose à nouveau. "C'était dur d'identifier exactement d'où venait le bruit dans l'immeuble. Je dirais que ça venait de relativement près, mais je ne sais pas où", répond-elle. Cette dernière a écrit à une camarade de classe à ce moment-là, à 3h21, par sms. Elle lui parle alors "de bruits comme dans un film d'horreur" et emploie même le mot "assassiner". Nicolas Zepeda, toujours assis dans son box avec son casque de traduction sur les oreilles, écoute les débats sans réaction particulière. "J'avais si peur que je suis restée dans ma petite chambre enfermée", rapporte Rachel R.
On dirait que quelqu'un est en train de se faire assassiner.
Rachel R, sur un sms à une camarade de classe
14h40 : "La même semaine, avant la nuit des cris, j'ai vu roder un homme étrange dans les parages de mon immeuble. Il se comportait vraiment étrangement. Je ne l'avais jamais vu avant", poursuit la témoin Rachel R. Elle explique aussi avoir vu un homme derrière la porte de la cuisine, dans le noir, via le reflet dans la fenêtre. Il était dissimulé. Elle confirme elle aussi, comme la témoin précédente, avoir vu Nicolas Zepeda. "Il n'était pas français, il m'a parlé en anglais avec un accent américain", précise-t-elle. "Il ne se comportait pas normalement, il était un peu en transe. J'avais très peur. Je lui ai demandé ce qu'il faisait là. Il m'a répondu 'désolée', il a fermé la porte et est parti en courant", précise la jeune femme. Les enquêteurs français lui ont envoyé des photos par email de Nicolas Zepeda pour lui demander si c'était l'homme qu'elle avait vu. "C'était absolument lui, je n'en ai aucun doute, dit la jeune femme âgée de 26 ans. Je l'ai vu deux fois, une fois dans l'escalier et une fois dans la cuisine". Quand elle avait déposé auprès de la police française, en 2016, elle avait précisé avoir vu l'homme le 2 décembre aux alentours de 17h ou 18h puis à environ 20h.
13h56 : L'audience va reprendre, avec Rachel R., une témoin en direct de Londres. Elle s'exprime en anglais. Les échanges sont traduits en direct depuis Vesoul, cela prend donc un peu de temps. Elle était la voisine de chambre de la victime. Elle résidait dans une chambre située dans le même couloir que celle de Narumi Kurosaki. Elle a entendu des cris horribles, la nuit durant laquelle a disparu Narumi Kurosaki. "J'ai entendu crier une femme dans la nuit, aux alentours de 3h du matin, dans la nuit du 4 au 5 décembre 2016. Des cris très forts. Combien de temps ont-il duré, je n'en suis pas sûre mais c'était suffisamment fort pour me faire très peur. J'étais terrifiée. J'ai entendu comme si on écrasait quelque chose. J'ai échangé quelques sms avec des camarades du bâtiment. j'ai éteint mes lumières et verrouillé la porte de ma chambre", explique-t-elle.
L'audience est suspendue jusqu'à 13h50.
12h47 : Me Portejoie enfonce le clou et demande à son client : "Est-ce que Nadia O., ne vous a pas vu dans la cuisine ?", redemande-t-il. "Non", dit Nicolas Zepeda. "Si c'est vous, pourquoi seriez-vous en train de pleurer ? Pourquoi est-ce qu'elle dit ça ? Il n'y a aucun intérêt à contester cela !", s'emporte quelque peu Me Portejoie, contre son propre client. "On y reviendra, merci monsieur", conclut Me Portejoie. Les propos de Nicolas Zepeda sont versés au dossier. Ils sont inédits. "Je voulais voir Narumi à Besançon". Ce dernier est bien venu à Besançon pour voir Narumi Kurosaki et est entré dans la résidence universitaire pour aller frapper à la porte de Narumi Kurosaki le 2 ou le 3 décembre 2016.
12h43 : "Parfois j'ai menti, je le regrette, je le dis", dit Nicolas Zepeda, sans pouvoir préciser sur quels points. " Sur quels éléments avez-vous menti ?" insiste le président. "Ça ne me revient pas tout de suite, mais je vous assure ça va revenir. Je serai là pour vous dire ce que je sais", répond Nicolas Zepeda, dont l'armure semble s'effriter quelque peu en ce 3e jour de procès en appel. La témoin, quelque peu oubliée en cette fin de matinée, est libérée. Étienne Manteaux, avocat général, en profite pour demander à Nicolas Zepeda s'il a erré autour de la résidence à plusieurs reprises comme on l'a vu sur les vidéos de surveillance. "Non, ça c'est pas moi", dit Nicolas Zepeda.
12h36 : Nicolas Zepeda dit être rentré dans la résidence de Narumi Kurosaki, une fois, le vendredi 2 décembre 2016. Cette version est nouvelle. Pour rappel, lors du premier procès, le jeune homme avait dit que l'étudiante japonaise était entrée en contact avec lui alors qu'il stationnait dans sa voiture sur le parking. Il avoue pour la première fois être venu en France pour voir Narumi, pour faire un point sur leur relation. "Vous n'aviez jamais admis ce but dans les nombreux interrogatoires. Pourquoi ?", dit le président. "J'avais un peu honte de vouloir réessayer, répond le jeune homme. J'ai eu peur qu'on construise contre moi une histoire qui n'était pas vraie".
J'ai menti. Je vois qu'il aurait été plus simple de dire la vérité. Aujourd'hui, je n'ai plus peur. Je vous dirai si jamais j'ai menti.
Nicolas Zepeda, accusé
12h21 : Me Schwerdorffer, avocat des parties civiles, souhaite à nouveau poser une question à Nicolas Zepeda. Me Cormier s'oppose. Mais le président reprend la main pour préciser un point concernant la déclaration de Nadia O. "Quelle est votre version aujourd'hui monsieur Zepeda ?", demande finalement Me Schwerdorffer. "Je n'ai jamais été au 4e étage. Ce n'est pas moi qu'elle a vu". "Moi, je suis certaine monsieur", s'adresse la témoin directement à l'accusé. "Il a un visage angélique, il était dans un sale état, j'ai voulu absolument l'aider. Je m'en souviens très bien", insiste cette dernière. Me Cormier, avocat de Nicolas Zepeda, passe à ses questions et décortique le PV de police de Nadia O, en date du 22 décembre 2016. Me Portejoie interroge à son tour son client : "Vous entendez la témoin qui vous reconnaît formellement. Qu'est-ce que vous avez envie de dire ? Manifestement elle ne ment pas. Je vous le dis comme je le pense" , lance Me Portejoie qui essaie d'infléchir la position de son client. "Ecoutez, je... Je suis rentré dans le bâtiment, au premier étage et j'ai frappé à la chambre de Narumi. Mais pas au 4e. Je ne vois pas d'ailleurs à quoi ça sert. Pourquoi se cacher ? Bon bref? Je suis rentré dans le bâtiment le vendredi 2 en fin d'après-midi", répond Nicolas Zepeda, visiblement hésitant. "Je ne peux pas mentir sur ça !, répond Nadia O. Je sais que ce jour-là je l'ai vu. Je me souviens très bien de vous."
12h11 : La police a présenté une planche photographique à la témoin au moment de sa déposition en 2016. C'est grâce à cela qu'elle a "tout de suite" reconnu Nicolas Zepeda. La planche composée de huit photos d'hommes aux cheveux courts et bruns est projetée dans la salle. Nicolas Zepeda apparaît en numéro 5. Une autre photo est projetée dans la salle : celle d'un homme au visage dissimulé, vu aux abords du bâtiment de la victime. La témoin dit que cela peut correspondre à l'homme qu'elle a vu, donc à Nicolas Zepeda. Ce dernier écoute attentivement la déposition, comme à chaque fois. Nadia O. a dessiné un croquis de la cuisine pour que la cour puisse mieux se rendre compte des choses. Elle est émue à la barre et visiblement touchée d'être l'une des protagonistes de cette affaire, malgré elle. Elle répond ensuite aux questions des avocats. Elle précise que la personne qu'elle a vue avait les yeux clairs, de couleur bleue ou verte. Nicolas Zepeda a les yeux bleus.
11h39 : L'audience reprend. Le président fait un point quant à l'organisation de la journée. "L'audience sera tardive", précise ce dernier. La deuxième témoin de la journée est Nadia O. Elle était étudiante à l'époque des faits. Elle vivait dans une chambre universitaire du CROUS dans la même résidence que la victime, dans le bâtiment Rousseau. Elle a découvert la porte de la cuisine de son bâtiment fermée, une chose inhabituelle selon elle. "Je suis entrée dans la cuisine du 4e étage. J'ai vu que les fenêtres étaient ouvertes. Il faisait très froid. J'ai vu un garçon assis par terre derrière la porte, recroquevillé. Il avait la tête sur les genoux. Je ne le connaissais pas. Il s'est levé et m'a demandé de rester, dans une langue que je ne connaissais pas. Il parlait une langue qui ressemblait à l'espagnol, détaille-t-elle. Il avait les yeux gonflés, les cheveux tout décoiffés. Il était dans un sale état. Je lui ai demandé ce qu'il faisait là. Il m'a expliqué qu'il n'avait pas de souci, j'ai trouvé ses explications bizarres, mais il a essayé de me rassurer". C'était entre le 1er décembre et le 5 décembre 2016, vers 16h30-17h, précise la témoin, après une question du président François Arnaud. "Il ne parlait pas français. Il m'a dit qu'il pouvait parler en anglais. Il était perdu dans ses réponses", précise Nadia O, rappelant que l'homme avait des chaussures de type "vert militaire".
La personne que j'ai vu ce jour-là était Nicolas Zepeda. Je ne l'ai jamais oublié. C'était lui.
Nadia O., témoin
« À partir du moment où #Zepeda plaide non coupable il faut un autre coupable. Ils désignent mon client. C’est la stratégie mise en place par la défense. La limite à tout ça c’est que les enquêteurs vont nous expliquer les choses bientôt ». Me Schwerdorffer avocat de Del Piccolo pic.twitter.com/Pazpnqi1MC
— Sarah Rebouh (@srebouh) December 6, 2023
L'audience est suspendue 15 minutes.
11h09 : Nicolas Zepeda, se lève dans son box, pour répondre à présent à Me Schwerdorffer. Il commence par lui demander de préciser sa question avec une certaine assurance. L'avocat bisontin lui demande pourquoi il n'a pas dit avoir vu Narumi Kurosaki. L'accusé se lance dans sa démonstration et détaille le déroulé des faits depuis l'appel de Jérémie B. lorsqu'il était au Chili. "Je conteste le fait que la question : 'est-ce que tu as vu Narumi' a été posée", dit l'accusé. "Donc il ment ?", demande Me Schwerdorffer. "Non, mais c'est faux", répond Nicolas Zepeda. Le témoin maintient ses déclarations. "Avez-vous des problèmes avec monsieur B. avant cet appel de décembre 2016 ?", poursuit Me Schwerdorffer. "On a un rapport pas si proche, par contre ce qu'il dit, c'est très vrai [...]", déroule Nicolas Zepeda sans oublier, à la surprise générale, de dévoiler une infidélité de la part du témoin et de préciser qu'il a été en colocation avec l'ex-petite amie de ce dernier. Le témoin fronce les sourcils. "Je n'ai aucun contentieux avec lui. Et je ne vois pas le rapport avec la suite", répond le témoin.
10h52 : "Arthur Del Piccolo était très impliqué dans les recherches de Narumi", répond Jérémie B. à la suite d'une interrogation d'Etienne Manteaux, avocat général, concernant le petit ami de l'époque de la victime. Me Cormier, avocat de Nicolas Zepeda, prend le relais des questions. Même stratégie que la veille, l'avocat du barreau de Lyon tente de jeter le trouble sur le rôle d'Arthur Del Piccolo. Pour information, ce dernier devrait témoigner durant ce procès, en visioconférence. Son intervention est particulièrement attendue. Me Schwerdorffer prend la défense de son client Arthur Del Piccolo. "Il ne cache rien", insiste le ténor du barreau bisontin. "Avez-vous le sentiment d'avoir été abusé par monsieur Zepeda ?", demande Me Portejoie, avocat de Nicolas Zepeda. "Oui, bien sûr. Il m'a menti", répond le témoin. L'avocat de Clermont-Ferrand dévoile le fait que le témoin a participé aux émissions TV Sept à Huit et Crimes, au sujet de l'affaire. "Ce n'est pas anodin", dit Me Portejoie, soupçonnant le témoin de "régler des comptes".
10h10 : Les avocats passent aux questions pour le témoin, Jérémie B. Me Galley, avocate de la famille de la victime, l'interroge concernant le couple Zepeda-Kurosaki et lui demande de préciser des notions linguistiques par rapport à la langue japonaise, toujours dans le but de démontrer que Nicolas Zepeda a utilisé le téléphone de la victime pour envoyer des messages à ses proches. Me Schwerdorffer, remplacé par Me Pichoff les deux premiers jours du procès, interroge à son tour Jérémie B. en s'appuyant sur les témoignages de l'époque. "Non, pas vraiment, je n'ai pas de nouvelles récentes de Narumi. J'ai entendu dire par quelqu'un que des personnes se demandaient où elle était", avait répondu Nicolas Zepeda lorsque Jérémie B. l'avait interrogé sur Narumi Kurosaki. "Pourquoi il ment ? Pourquoi il ne m'a pas dit qu'il était avec Narumi la semaine d'avant ? Il ne voulait pas qu'on sache qu'il était avec elle à Besançon", analyse le témoin.
9h43 : La petite amie de l'époque de Jérémie B. était une très bonne amie de Narumi Kurosaki. Le trentenaire, vêtu d'un costume sombre et d'une écharpe bleu ciel, précise avoir eu connaissance du profil de Nicolas Zepeda comme "de quelqu'un de jaloux, possessif. Un peu pesant dans la vie de Narumi". "Mon amie m'a relaté ces traits de caractère de Nicolas Zepeda, effectivement". Nicolas Zepeda semble prendre des notes sur une feuille placée sur ses genoux, en écoutant attentivement le témoin.
9h29 : Ce dernier est entré en contact directement avec Nicolas Zepeda, en décembre 2016, pour savoir s'il avait des nouvelles de la victime, après sa disparition. "J'ai fait le rapprochement entre l'absence de Nicolas Zepeda sur Tsukuba et le manque de contact avec Narumi. Je me suis dit que peut-être Nicolas pouvait avoir de ses nouvelles", indique Jérémie B. "Il m'a expliqué qu'il était au Chili. Il m'a envoyé de son initiative une photo de lui sur un fond blanc avec le drapeau du Chili. Je me suis demandé pourquoi il m'avait envoyé cette photo. J'ai eu un doute sur le fait qu'il soit vraiment au Chili", détaille Jérémie B. Le Chilien est bien à Santiago et le prouve en faisant une vidéo avec des passants. À ce moment-là, Nicolas Zepeda ne lui parle absolument pas de sa rencontre récente avec Narumi Kurosaki et lui dit même qu'il ne l'a pas vu depuis longtemps. Il l'avait pourtant vue la semaine d'avant, à Besançon. Nicolas Zepeda lui explique aussi que Narumi Kurosaki a tendance à disparaître. "Il m'expliquait le caractère parfois difficile de Narumi". L'accusé lui a aussi confié que Narumi Kurosaki le "tapait".
J'ai eu un doute sur la véracité de ce qu'il me disait. C'était une intuition. Je suis le premier à avoir pensé que ça pouvait être lui, dès le début. Apparemment, je ne m'étais pas trompé.
Jérémie B., proche des étudiants japonais
9h09 : Jérémie B. se présente à la barre. À l'époque de la disparition de Narumi Kurosaki, il était professeur référent pédagogique pour les échanges entre l'université de Tsukuba (Japon) et celle de Besançon. Il était au Japon. Il est de nationalité française et s'exprime donc en français, en direct à la barre. Ce dernier connaissait Nicolas Zepeda. "J'ai eu l'occasion de le côtoyer dans des moments de festivités. Il m'est apparu être quelqu'un de tout à fait sympathique. Et je connaissais sa relation avec Narumi", explique l'homme. Il a échangé avec plusieurs protagonistes de cette affaire au moment de la disparition de Narumi Kurosaki : Arthur Del Piccolo, petit ami de Narumi Kurosaki et Shintaro Obata, ami de Narumi, par exemple. Jérémie B. dit avoir eu vent des "difficultés de la relation entre Narumi et Nicolas". C'est une amie proche de Narumi Kurosaki qui lui a confié ces faits.
9h06 : L'audience reprend. Nicolas Zepeda multiplie les interpellations à ses avocats, installés juste devant son box d'accusé. Il semble leur donner des consignes.
L'audience doit débuter à 9h avec notamment deux nouveaux témoins avancés par la défense. Ces derniers n'avaient pas témoigné en première instance.
La deuxième journée du procès de Nicolas Zepeda, accusé de l'assassinat de son ex-petite amie japonaise Narumi Kurosaki à Besançon en décembre 2016, a été consacrée à l'audition de plusieurs témoins. Des anciens camarades de classe et voisins de chambre, en visioconférence depuis le Japon, ont parlé des cris "féminin" entendus la nuit de la disparition dans la résidence Rousseau du Crous de Besançon, sans pouvoir les localiser précisément. Deux amies de l'étudiante japonaise ont confirmé le fait que Nicolas Zepeda exerçait une pression sur sa petite amie en piratant son compte Facebook par exemple. "Il la harcelait. Nicolas Zepeda s'acharnait à rester en relation avec elle", a par exemple confié l'une d'elle. Une amie de Nicolas Zepeda a également témoigné. Elle a dressé un portrait exemplaire du Chilien, participant activement à humaniser l'accusé : "tranquille, solidaire, attentionné et très empathique", selon ses mots.
Pour rappel, Nicolas Zepeda a été condamné à 28 ans de réclusion en première instance en 2022. Il risque la réclusion criminelle à perpétuité. Le corps de la victime n'a jamais été retrouvé par les enquêteurs, malgré des moyens considérables déployés durant deux ans pour retrouver sa trace.
► (Re)lire le déroulé complet de la deuxième journée du procès, le mardi 5 décembre 2023.
ARCHIVES. De la disparition de Narumi Kurosaki à la condamnation en première instance de Nicolas Zepeda pour assassinat :
Du 4 au 22 décembre 2023, suivez en direct les débats en cours à l'intérieur de la salle d'assises du procès en appel de Nicolas Zepeda à Vesoul. Rendez-vous chaque matin sur l'article "DIRECT" de notre site internet.
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