Les groupes RN et LFI ont décidé de voter contre la réforme des retraites proposée par le gouvernement. En Franche-Comté, le député Ian Boucard ne suivra pas le vote de son groupe, Les Républicains, il votera contre également. Explications.
Elisabeth Borne, Premier ministre a annoncé le 10 janvier la réforme des retraites avec le report de l'âge légal de départ de 62 ans à 64 ans en 2030.
Chacun avance ses chiffres, ses arguments avec un point commun qui relie les députés Rassemblement National de Haute-Saône, Antoine Villedieu et Émeric Salmon, les deux élus à l’Assemblée du Territoire de Belfort Florian Chauche, LFI – Nupes, et Ian Boucard, Les Républicains : ils voteront tous les quatre contre la réforme des retraites. La gauche et le RN comme un « seul homme ». En ce qui concerne les Républicains, Ian Boucard va à l’encontre de la décision de son groupe, Les Républicains, qui a prévu de voter pour cette réforme.
"Une trahison démocratique"
En premier lieu, certains font déjà un petit retour en arrière. Antoine Villedieu, élu RN de Haute-Saône, s’emporte contre le président de la République : « Emmanuel Macron nous avait dit en 2019 qu’il ne souhaitait pas revenir sur le départ en retraite à 62 ans ! Il le fait aujourd’hui. C’est une trahison démocratique ! »
Il fait remarquer également que l’ancien président, Nicolas Sarkozy, avait lui aussi promis de ne pas reculer l’âge de départ et que, par la loi Woerth, en 2007, l’âge de départ possible était passé de 60 à 62 ans.
Des prévisions du COR mises en doute
Les élus qui voteront contre cette réforme des retraites mettent également en doute les scénarios du COR, le Conseil d’Orientation des Retraites.
Antoine Villedieu, Rassemblement National de Haute-Saône, affirme avec véhémence : «Dire que le système des retraites est déficitaire, c’est un mensonge ! Le COR prévoit que les retraites, qui représentent 14% actuellement du PIB, représenteront le même pourcentage en 2070. »
Le COR s’est déjà trompé les années précédentes
Émeric Salmon, député RN de Haute-Saône
Son collègue de la circonscription voisine, Émeric Salmon du RN également justifie son opposition à la réforme : « Avec le COR, ce ne sont que des prévisions. Le COR avait affirmé que cette année le système serait déficitaire, il est bénéficiaire… »
Justement, le chiffre de ce « bénéfice » est avancé cette fois-ci sur les bancs de la gauche : 3,2 milliards. Et c’est Florian Chauche, LFI-Nupes du Territoire de Belfort, qui l’affirme : « 3,2 milliards, c’est le bénéficie du système des retraites pour 2002. Il n’est pas en déficit. Et de toute façon, même s’il l’est durant quelques années, il sera de nouveau bénéficiaire à partir de 2050. »
"Un choix de société"
Pour les deux députés Rassemblement National, c’est clair : même s’il manque 10 milliards pour équilibrer les comptes, ce n’est pas forcément difficile de trouver cette somme. Il suffit de faire des économies sur d’autres secteurs. Émeric Salmon le clame : « Le système actuel est correct. Partir à 62 ans à la retraite, c’est un choix de société. » Son collègue Antoine Villedieu renchérit : « Je ne veux pas que les Français travaillent plus longtemps et réduisent leur espérance de vie. C’est la France qui se lève tôt qui est pénalisée, les plus modestes qui sont concernés. Actuellement, 42 % des personnes qui arrivent en retraite ne sont déjà plus en activité professionnelle. »
La qualité de vie : c’est le credo de ces élus RN et aussi de Florian Chauche, LFI-Nupes, du Territoire de Belfort, très remonté contre la réforme d’Emmanuel Macron : « On va travailler jusqu’à quand ? Jusqu’à la mort ? Jusqu’à ne plus être en bonne santé ? Je veux profiter de la vie et de mes petits-enfants. » Il étaye son propos : « Aujourd’hui, l’âge moyen pour être encore en bonne santé, c’est 64 ans pour les femmes et 62 pour les hommes… »
Et il ajoute que le milieu associatif sera très pénalisé si l’âge de départ en retraite est reculé : les associations perdront nombre de leurs bénévoles.
Le cas "Ian Boucard"
Les trois précédents députés voteront comme leur groupe. En revanche, Les Républicains ont annoncé qu'ils voteraient pour cette réforme. Le LR Ian Boucard du Territoire de Belfort va rejoindre ses « opposants politiques »… sans aucun état d’âme en votant contre.
S’il partage, en partie, les arguments de ses collègues, il insiste, lui, sur d’autres points : une démographie pas forcément très claire, la pénibilité peu ou mal prise en compte et surtout le fait que cette réforme, selon lui, « pèse uniquement sur les travailleurs. »
Je ne serai pas le seul député Républicain à voter contre.
Ian Boucard, député LR du Territoire de Belfort
Ian Boucard fait partie de cette droite qualifiée de « sociale » ou encore « populaire ». Il souhaite que « le système soit revu dans sa globalité, que le travail soit mieux rémunéré, que le cumul des minima sociaux soit toujours inférieur au Smic. » Et il ajoute : « Avec 3 millions de chômeurs et 400 000 emplois vacants, il suffirait que des emplois soient pourvus. Ainsi, on aurait moins de déficit, davantage de rentrées de cotisations sociales… » Et pas "obligé" de réformer le système des retraites...
Les députés LR réagissent-ils mal à cette prise position ? « Ils me disent que je vais me faire attraper par notre électorat. On me dit, aussi, que notre candidate à la présidentielle, Valérie Pécresse prônait la retraite à 65 ans. Je n’ai jamais dit que j’étais d’accord avec cette proposition… De plus, je suis félicité par tout le monde, surtout par des électeurs de droite. Je ne serai pas le seul député de notre groupe à voter contre la réforme… » dit-il.
Le groupe de la majorité présidentielle n’a pas la majorité absolue à l'Assemblée Nationale, il lui manque environ 40 voix. Il compte sur les 62 députés des Républicains pour faire voter sa réforme…
Mais, a priori, 13 députés Républicains devraient ou voter contre ou s’abstenir le jour du vote… Et Justine Gruet députée LR du Jura s'interroge encore. Elle attend le texte définitif pour se prononcer.
Début des débats à l’Assemblée nationale le 6 février pour une ou deux semaines puis passage par le Sénat et retour à l’Assemblée. Les débats au Parlement sur le projet de réforme des retraites devraient s'achever le 26 mars, date limite pour une adoption définitive du texte au bout du délai de 50 jours.