Coronavirus Covid-19 : une auxiliaire de vie de Vesoul écrit à Emmanuel Macron au sujet de la prime de 1000 euros

Après le rejet par le Gouvernement d'un amendement qui prévoyait le versement d'une prime de 1000 euros à chaque auxiliaire de vie, une jeune AVS de 25 ans écrit au Président de la République Emmanuel Macron pour demander plus de reconnaissance dans cette crise sanitaire.


Elle s'appelle Emilie Humbert et est âgée de 25 ans. Depuis six ans, elle exerce le métier d'auxiliaire de vie dans une entreprise d'aide à domicile de Vesoul. Malgré la crise sanitaire sans précédent, la jeune femme continue d'enchaîner les toilettes, les repas... à un rythme effréné. Parfois, jusqu'à dix heures de travail par jour.
 

Avoir un peu de reconnaissance


Quotidiennement, elle côtoie des personnes potentiellement malades. « On porte des gants, un masque, on a du gel hydroalcoolique et une surblouse si on vient à être en contact direct avec une personne infectée mais la proximité est telle qu'on prend des risques.»

Alors, lorsqu'Emilie apprend la semaine dernière que les auxiliaires de vie ne bénéficieront pas de la prime Macron de 1000 euros, elle a pris son stylo pour écrire au Président de la République afin de lui demander « un peu de reconnaissance. »
 

Lettre au Président de la République, Emmanuel Macron


Amendement rejeté, les auxiliaires de vie privés de la prime de 1000 euros

Dans la dernière loi de finances rectificative débattue le vendredi 24 avril à l'Assemblée, le Gouvernement a manifesté une fin de non-recevoir à l'amendement présenté par le député socialiste de l'Aisne, Jean-Louis Bricout.


Chaque jour, je vais travailler la boule au ventre, j'ai peur d'apporter le virus chez moi


Cet amendement proposait le versement d'une prime de 1000 euros par auxiliaire de vie sur le modèle de celle prévue pour les soignants dans le budget de crise adopté le 23 avril.

« Nous n'avons pas arrêté le travail. Pourquoi certains travailleurs, qui sont confinés chez eux, seraient indemnisés et pas nous ? Pourtant, nous sommes en contact régulier avec d'autres personnes comme les infirmières. Chaque jour, je vais travailler la boule au ventre, j'ai peur d'apporter le virus chez moi, de contaminer mon conjoint. Certaines de mes collègues, craignent aussi pour leurs enfants. »

Emilie Humbert aurait aimé que ce maillon essentiel dans la prise en charge des personnes âgées, reçoive une reconnaissance du travail effectué et des risques encourus. « Pas forcément les 1000 euros, mais au moins une petite reconnaissance sociale et financière. »


 
La lettre au Président de la République Emmanuel Macron

Monsieur le Président, 

Si je me permets de vous écrire aujourd'hui ce n'est pas pour m'en prendre à vous. J'aimerais vous expliquer ma situation et vous exprimer mon ressenti. Je serais très honorée si vous preniez le temps de lire cette lettre autant que le coeur que j'y ai mis pour l'écrire. 

Je m’appelle Émilie Humbert, j’ai 25 ans. Je suis auxiliaire de vie depuis 6 ans maintenant. Bien sûr, je compte évoluer dans ce secteur d’activité. Il est prévu que je monte en grade d’ici quelques temps, et je mets tout en oeuvre pour y arriver. Je ne me suis jamais plainte de mon salaire ni de mes conditions de travail. Ce que je touche actuellement me convient même si je dois faire des journées de 11h d'amplitude pour pouvoir dégager un salaire convenable. 

De ce salaire, j’en déduis des charges fixes comme tout un chacun : l'entretien de ma voiture personnelle que j'utilise pour travailler, le gazoil, le loyer de l’appartement, les courses, et j'en passe... Croyez au fait que je ne me suis jamais plainte de quoi que ce soit, monsieur le Président. Je n'ai pas souhaité poursuivre mes études au-delà du CAP, donc je suis parfaitement au clair avec le fait que je ne gagne pas 2000€ chaque mois. 

Comme je vous l'ai dit plus haut, je travaille pour pouvoir évoluer et m'épanouir car je sais que j'en ai les capacités. J’ai toujours fait mon travail avec fierté et dévouement. 

Quand la crise du coronavirus est arrivée, j’ai été sollicité par mon entreprise pour continuer à m’occuper de nos patients, assurer les toilettes, les repas, le maintient à domicile, etc, alors que nombre de mes collègues ont été mis au chômage partiel. J’ai été très fière et reconnaissante d’avoir pu garder mon poste alors que la crise sanitaire bat son plein. 

Comme vous vous en doutez, je suis en contact direct avec les personnes fragiles, tout comme n'importe quelle soignant. Sans compter qu’une partie des personnes sorties d'hôpitaux seront également à notre charge. Nous serons sollicités pour nous occuper des personnes qui reviennent de loin. Ce qui est normal, nous nous sommes engagés pour. 

Mais voilà, coup de massue la semaine dernière. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque j’apprends au journal régional que les députés ont voté « non » à la prime pour les auxiliaires de vie et aides à domicile !

Depuis presque 2 mois, nous travaillons toutes et tous jusqu’à 11h par jour avec un masque sur le visage, à prendre le risque d'être infectés à chaque instant, de ramener le virus à la maison, et de le transmettre à celles et ceux qui vivent à nos côtés. Comprenez donc qu’une certaine angoisse nous assaille lorsque nous prenons le chemin du travail et lorsque nous rentrons chez nous. 

De ce fait, j’aimerais comprendre : Comment expliquez-vous que des personnes qui restent chez eux, sans prendre de risques, auront des aides, et pas nous qui sommes « en première ligne », comme vous le rappelez parfois ? Je ne suis pas contre aider les plus démunis bien au contraire, mais comprenez que je ne puisse admettre que nous, qui sommes exposés en permanence, n'aurons rien. 

Bien que le pays est, et sera reconnaissant pour tout le travail que nous avons accompli, que nous accomplissons, et qui nous reste à accomplir, cette reconnaissance seule n’est pas proportionnée par rapport aux risques que nous prenons, selon moi, et sans aucun doute selon tous mes collègues. 

Nous sommes très fiers du travail que nous faisons, chaque jour qui passe, nous donnons énormément en ces temps difficiles, et l’effort collectif doit se faire dans les deux sens. 

Monsieur le Président, je vous écris cette lettre non sans me laisser envahir par une certaine émotion. 
Je suis partagée entre la fierté de mon métier, l’empathie pour les personnes souffrantes, et la colère de cette décision politique et économique. 

Je serais très honorée d'une réponse de votre part. 




 
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