Au lendemain de l'accident qui a coûté la vie à quatre lycéens au Lac de Chalain dans le Jura, l'émotion est très vive au lycée Paul Emile Victor de Champagnole, où ils étaient tous internes. Élèves, enseignants et équipe pédagogique, sont sous le choc.
Ce jeudi 20 janvier au matin, devant les grilles du lycée Paul Emile Victor, à Champagnole dans le Jura, les visages sont graves, fermés. Les élèves ont le pas et le cœur lourds. "C’était assez compliqué de venir ce matin" reconnaît Louka. "On est tous sous le choc d’avoir appris la nouvelle".
La veille, en fin d’après-midi, cinq de leurs camarades ont été impliqués dans un tragique accident. Après une sortie aux abords du lac de Chalain, et alors qu’ils s’apprêtaient à revenir au lycée, où ils étaient tous internes, pour répondre présent à l’appel de 17h30, leur voiture a vraisemblablement glissé sur une importante plaque de verglas, avant de quitter la route et de finir dans les eaux glacées du lac. Un seul des cinq jeunes, en hypothermie, a réussi à s’extraire à temps du véhicule. Les quatre autres sont décédés. Natacha, Nathan, Noé et Sarah ne retrouveront plus jamais les couloirs de leur lycée.
Les quatre victimes étaient internes au lycée
La nouvelle a d’abord profondément secoué les élèves de l’internat, où les quatre lycéens étaient attendus à 17h30. Lorsque la nouvelle de l’accident a été rendue publique, dans la soirée, les lits restés vides ont laissé peu de doutes à leurs camarades sur l’identité des victimes. Une cellule d’écoute psychologique a immédiatement été dépêchée sur place.
Bien avant les premiers cours, ce matin, plusieurs internes attendaient devant le lycée. "Ils nous ont appelés hier soir, pour dire qu’ils voulaient rentrer" explique ce parent d’élève, venu récupérer deux internes. Profondément choqués, les deux adolescents peinent à trouver leurs mots. "Ça fait bizarre… C’est… Ils vont nous manquer".
C’est Stéphane Arru, le proviseur de l’établissement qui les a directement prévenus. "L'établissement vit une immense tristesse et une douleur incommensurable" a-t-il déclaré ce matin, au cours d’une conférence de presse. "Certains lycéens ont souhaité rentrer dans leur famille dès hier soir, d’autres ont préféré rester dans l’établissement et bénéficier de cette cellule d’écoute qui a été mise à leur disposition". "Nous faisons face en accueillant la parole des jeunes gens, en leur permettant de d’exprimer" a-t-il ajouté. "Certains auront besoin de rentrer chez eux, on l’organisera, d’autres de nous rejoindre, et on l’organisera".
"Ça fait bizarre de me dire que je ne les reverrai plus jamais"
Pour permettre aux émotions de s’exprimer, et aux élèves de verbaliser ce qu’ils ressentent, une dizaine de personnes resteront mobilisées au moins jusqu’à samedi dans cette cellule d’écoute. Dans l’établissement d’un peu plus de 700 élèves, la plupart des lycéens se connaissent, et ce matin, tous avaient en tête les visages de Natacha, Nathan, Noé et Sarah.
"Ça fait bizarre de me dire que je ne les reverrai plus jamais" confie un jeune lycéen. "Natacha, qui conduisait, je la connaissais depuis que j’étais en primaire... C’étaient des potes, ils étaient sympas". "J’ai fait de la gym avec elle quand j’étais petite" raconte une autre élève. "Je la connais de loin, mais c’est triste. C’est le choc". Parmi les lycéens, beaucoup ont encore du mal à réaliser qu’il faudra désormais parler de leurs camarades au passé. "On a envie d’appeler nos parents, pour avoir des paroles réconfortantes"
Un thème revient souvent dans la bouche de ces adolescents, dont le drame a violemment brisé la routine quotidienne : "Ça fait un choc, quand on sait qu’ils sont venus au lycée hier, et puis aujourd’hui, ils ne viennent pas".
"On s’est pris une énorme claque"
Philippine, élève en terminale, comme Natacha, partageait des cours avec elle. "C’était une élève très dynamique, elle apportait beaucoup de joie dans les cours… Ça va créer un manque". "En philosophie, justement, on étudie la mort en ce moment, et on se disait que c’était loin, qu’on était jeune et qu’on avait envie de profiter de la vie et on ne comprenait pas trop tout ça" raconte la lycéenne. "Et là, on s’est pris une énorme claque". "Hier, on avait la même vie qu’eux, et ce matin, ils ne viennent plus en cours". "Heureusement, on a accès des psychologues, mais c’est très compliqué".
Comme d’autres élèves, elle avait eu vent des projets de balade des jeunes disparus. "On avait eu l’information qu’ils partaient au bord du lac pour faire une promenade, ils proposaient de venir" raconte la lycéenne. "J’ai même des amis qui ont dit ‘mais vous savez qu’il fait mauvais temps, c’est peut-être risqué d’aller là-bas ?’ Et voilà… On est sidérés".
Au cours de la matinée, de nombreux élèves ont finalement fait le choix de rentrer chez eux, retrouver leurs proches.