Ce mardi 4 avril, se tenait au tribunal correctionnel de Lons-le-Saunier (Jura) le procès d'une assistante maternelle, accusée d'avoir secoué un bébé de 5 mois qu'elle gardait en 2019. Aujourd'hui âgé de 4 ans et demi, le petit garçon vit avec des séquelles. La nounou a été relaxée.
L'audience devait se dérouler le 10 novembre 2022. Mais, face à la complexité du dossier, et en particulier des éléments médicaux, le procès devant le tribunal correctionnel de Lons-le-Saunier (Jura), d'une assistante maternelle accusée d'avoir secoué un petit qu'elle gardait en 2019, avait été repoussé à ce mardi 4 avril.
À l'annonce du verdict, en toute fin de journée, la stupeur a saisi une partie de l'auditoire. La nounou accusée a été relaxée par le tribunal judiciaire. À présent, le parquet dispose de 10 jours pour faire appel.
Quelques heures auparavant, la procureure de la République avait requis 4 ans d'emprisonnement, dont 2 en sursis simple, et une interdiction d'activité professionnelle de garde d'enfant, à l'encontre de la nounou incriminée.
La famille crie à l'injustice
À l’annonce de la relax, la famille de Sami est sous le choc. Les sanglots dans la voix, la maman du jeune garçon, âgé de 4 ans, crie à l’injustice. « Je me sens abattue, je ne pensais pas du tout que ça allait finir comme ça. Tout le long du procès, on était gagnants. La relax, c'est trop. La nourrice a été tout le long du procès coupable. Tout au long, elle se perd dans ses dires et elle a encore aujourd’hui menti (…). Mais on va relever la tête, on va se battre et on en sortira gagnant. Sami, c’est notre force de tous les jours ».
À ses côtés, son avocate prend la parole. Elle aussi ne comprend pas la décision du tribunal au vu des expertises. « La juridiction n’a pas été à l’écoute, n’a pas pris la mesure ni du dossier, ni des déclarations, ni des expertises. Je ne sais pas comment mes clients vont se reconstruire. Ils sont effondrés et je pense qu’il n’y a pas de mot pour décrire leur peine. C’est pour tous un sentiment d’injustice, je suis moi-même en état de choc. La justice n’est pas passée. On espère que le procureur va faire appel et on fera en sorte qu’il y ait appel du Parquet pour l’intérêt civil » déclare Me Rebecca Fisli, avocate de la famille de Sami.
Deux expertises radicalement différentes, un dossier complexe
L'assistante maternelle était poursuivie pour violence sur mineur de moins de 15 ans. Elle était accusée d'avoir secoué le petit Sami, alors qu'il n'avait que cinq mois, en mars 2019.
"Aujourd'hui, on attend que les magistrats puissent démêler les expertises les unes des autres et que la vérité médicale et judiciaire éclate enfin" a déclaré ce mardi matin Maître Rebecca Fisli, avocate de la famille de Sami. La première audience, le 10 novembre 2022, avait donné lieu à un renvoi, face à la complexité du dossier, et notamment celle des termes médicaux et de leur implication.
Deux expertises apportent des points de vue radicalement différents sur le syndrome du bébé secoué : celle du professeur Raul, et celle du professeur Mselati. Ce dernier est connu pour sa dénonciation des recommandations de la Haute Autorité de Santé en matière de diagnostic du syndrome du bébé secoué. Une position dénoncée par la neuropédiatre présidente du groupe de travail responsable de l'élaboration de ces recommandations. L'audition des experts et les questions médicales a pris une large partie de la matinée.
"Je pense que le tribunal est allé très loin dans l'instruction à la barre" a déclaré à la mi-journée l'avocat de la nourrice, Maître Patrick Uzan," le président a été remarquable dans la réflexion, dans le jugement". "J'appelle de mes vœux un jugement de relaxe", "tout dans la personnalité de ma cliente converge pour dire qu'il n'y a pas un seul élément susceptible d'expliquer un acte de violence".
Au contraire, pour l'avocate de la partie civile, Maître Fisli, "les déclarations de la nourrice ne sont pas pour moi convaincantes. Elle ne répond pas à ce qui a pu se passer".
L'assistante maternelle risquait jusqu'à 10 ans de prison et 150.000 euros d'amende. En fin de journée, la procureure de la République en avait requis quatre dont deux en sursis, précisant qu'il n'était pas nécessaire dans ce dossier d'ordonner d'incarcération, et avait surtout demandé une interdiction d'exercer une activité de garde d'enfant.
Le jour où tout a basculé
Cette terrible affaire a éclaté le 29 mars 2019. Ce jour-là, la nourrice de Sami appelle ses parents. Le petit de 5 mois a fait des convulsions. Elle appelle également les secours, qui le transportent à l'hôpital de Lons-le-Saunier. Là-bas, l'état de l'enfant n'est d'abord pas détecté, malgré plusieurs jours d'hospitalisation. Après un retour à la maison, une nouvelle hospitalisation et un scanner révèlent des hémorragies cérébrales. Le bébé est héliporté au CHU de Besançon, il passe plusieurs jours en réanimation. Il est ensuite placé en famille d'accueil pendant plusieurs mois, le temps de l'instruction, et que le parquet inculpe l'assistante maternelle.
Quatre ans plus tard, Sami "va bien". Son père marque une pause, et ajoute : "après...Voilà.". "Ça suit son cours" explique sa mère. Car l'enfant âgé désormais de 4 ans et demi doit vivre avec les séquelles de sa double hémorragie. "On est tout le temps chez les médecins, chez l'orthophoniste", énumère-t-elle, "Il a une assistante tous les jours, on se bat".
La famille de Sami a déjà fait part de sa volonté de faire appel.