Les élections municipales ne ressembleront en rien à ce que les candidats avaient imaginé. A quelques jours du lancement de la campagne du second tour et dans un contexte sanitaire particulier, les candidats devront sans doute faire campagne sur les réseaux sociaux. Mais sont-ils prêts ?
La campagne officielle de ce deuxième tour des élections démarrera officiellement le lundi 15 juin. Et puisque les rassemblements au-delà de 10 personnes sont toujours interdits, que les mesures sanitaires freinent la rencontre avec les électeurs, la campagne devra se jouer en terrain numérique.
Mais en Bourgogne, quels sont les candidats les plus actifs sur les réseaux sociaux, comment communiquent-ils et ont-ils trouvé leur public ? Exemple avec quatre villes : Dijon, Sens, Auxerre et Montceau-les-Mines.
A Dijon, deux concurrents face à un favori très suivi
A Dijon, le maire sortant François Rebsamen (PS) est à la tête de la liste « Dijon c’est Capitale ». Arrivé en tête au 1er tour, il l'est aussi sur les réseaux sociaux. La page facebook de sa liste est suivie par près de 2700 personnes. Mais c'est sur sa page personnelle qu'il rassemble le plus avec environ 15 000 abonnés. Même contraste sur twitter avec 300 "followers" pour la page de son équipe de campagne et plus de 60 000 sur son compte personnel.
Face au maire sortant, Emmanuel Bichot, arrivé deuxième au premier tour des municipales, est aussi le deuxième candidat à la mairie de Dijon le plus suivi sur Facebook, avec 1 244 likes sur la page « Agir pour Dijon », du même nom que sa liste. Avec quasiment autant de followers sur Twitter, Emmanuel Bichot est un candidat assez présent sur les réseaux sociaux.
Troisième qualifiée pour le second tour, la liste « Dijon Ecologique et Solidaire » de Stéphanie Modde est suivie par 329 internautes sur Facebook et semble donc avoir moins d'influence. Sa page de campagne compte également 83 abonnés sur Instagram et un peu moins de 200 sur Twitter.
Le jeu des meilleurs facecam
C'est une solution qui a souvent été utilisée par les candidats pour détailler leurs proposition. Mettre en ligne des vidéos pour expliquer telle ou telle mesure, souvent défendue par l'un des membres de la liste. A ce jeu, François Rebsamen s'est fait avoir appelant par exemple face caméra à l'élection "d'un nouveau maire pour Dijon". La mise en scène psychédélique des écologistes ou les vidéo en vélo du candidat de la droite n'ont pas toujours convaincu.
Pendant le confinement, pour beaucoup de candidats, la campagne a tourné au ralenti. Sur le compte de la liste Dijon écologiste et solidaire, l’activité a repris le 3 juin, avec une photo de l’équipe repartant en campagne. Pendant le confinement, le compte a maintenu une activité régulière en partageant des tribunes ou certaines des propositions la liste.
Très active pendant la campagne du premier tour, la page "Dijon c'est Capitale" partageait des contenus plusieurs fois par jour. Mais pendant le confinement, les publications se sont arrêtées, comme la campagne. Le candidat François Rebsamen a laissé sa place au maire. Il a ainsi cumulé plusieurs milliers de vues à chacune de ses vidéos « point d’information sur l’épidémie ». Des vidéos qui ont également été massivement partagées et commentées.
Tout comme le maire sortant, le candidat Les Républicains aux municipales à Dijon enregistre et met en ligne des vidéos dans lesquelles ils expliquent ses projets pour la ville. Des images visionnées parfois jusqu’à 800 fois. En revanche, sur Instagram, le candidat LR n’a pas proposé de contenus véritablement dédiés au support.
A Sens, la maire sortante en tête dans les urnes… mais dernière sur les réseaux sociaux
A Sens, les réseaux sociaux ont été le lieu de multiples débats et confrontations entre les candidats. La maire sortante, Marie-Louise Fort, n’a pourtant pas de compte Twitter ni de page Facebook à son nom. Pendant la campagne des élections municipales, ce n’est qu’au travers d’une page Facebook et d’un compte Instagram « Sens 2020 » que la candidate à sa propre réélection s’est exprimée. La première (inactive depuis la mi-mars) réunit 650 abonnés contre 60 sur le deuxième (aussi inactif depuis le début du confinement).
Arrivée assez nettement en tête au premier tour (39,2% des voix), Marie-Louise Fort est pourtant devancée sur les réseaux par ses 3 concurents du second tour.
La liste "Le Bon Sens", menée par le candidat sans étiquette Laurent Moinet (16,8%) compte 997 abonnés sur Facebook et 230 sur Twitter. C'est presque autant pour le candidat de gauche Mathieu Bittoun. Arrivé en quatrième place (11,6%), la page de sa campagne Sens Ecologie et solidarité compte un peu moins de 1 200 abonnés.
Mais c'est Julien Odoul qui remporte la course aux followers. Sur facebook, la page de sa liste ChangezdeSens est suivie par 1 050 abonnés. Mais sur ses comptes personnels, le candidat du Rassemblement nationale est suivi par 19 000 personnes sur Facebook, 5 100 sur Instagram et 24 900 sur Twitter. Les contenus, sur les profils de Julien Odoul ou sur ceux de la liste « Changez de Sens » sont souvent très partagés. Le dernier message vidéo du candidat compte par exemple 3 000 vues sur Facebook.
A Sens, la liste de la maire sortante n’a utilisé les réseaux sociaux que pour diffuser ses propositions. Durant le confinement, Laurent Moinet a utilisé sa page Facebook pour s'exprimer directement à ses électeurs, en vidéo et face caméra. Du coté de la candidature de Mathieu Bittoun, les publications n'ont pas non plus cessé durant le confinement. Mais elles ont essentiellement consisté en des partages de vidéos diffusées au niveau national. On y trouve notamment une vidéo de 8 heures où interviennent plusieurs personnalités, mais qui n'a été liké que 2 fois sur la page du candidat.
Comme à son habitude, la tête de liste de « Changez de Sens », n'a pas cessé de twitter pendant l'épidémie. En plus de l’actualité, Julien Odoul a partagé sur ses réseaux sociaux toutes ses interventions dans les émissions télévisées. Pendant la campagne de premier tour, il s’était souvent adressé à ses adversaires via les réseaux.
A Auxerre, des photos, des vidéos et un panda pour appeler aux votes
« Nouvel équilibre » c’est le nom de la liste porté par Guy Férez (divers centre soutenu par En Marche). Le maire sortant (33,1% des voix) s'est récemment allié à la candidate écologiste Maud Navarre (10,9%). Sur la page Facebook du maire, ce sont 2 186 internautes qui le suivent, et 876 sur celle de sa liste.
Arrivé en tête au 1er tour, le candidat de droite, Crescent Marault (37,2) talonne le maire sortant sur les réseaux sociaux. La page de sa liste « Auxerre au coeur » recense 1 632 followers. Troisième homme de second tour : Denis Roycourt (13,3%) compte un peu plus de 900 abonnés à sa page facebook "Auxerre écologie, la ville envie "
Concerant leur présence sur twitter, comme beaucoup d’autres candidats ailleurs, Crescent Marault n’utilise ce réseau que comme un relais de son support numérique principal : Facebook. Le dernier tweet du maire sortant, Guy Férez date, lui... d'avril 2014. Il était consacré à la tenue du premier conseil municipal du mandat qui s'achève. Quant à Denys Roycourt, il n'est semble-t-il as présent sur ce réseau.
Le maire remplace le candidat pendant le confinement
Maud Navarre et Guy Férez, pendant la campagne du premier tour ont adopté la même stratégie : donner la parole aux candidats de leur liste, soit sous la forme de portraits photos, soit sous la forme de vidéos. Une communication qui a fonctionné, puisque plusieurs dizaines d’internautes ont liké ou partagé les contenus.
Tout comme pour François Rebsamen, à Dijon, pendant le confinement, Guy Férez a préféré reprendre son costume de maire. C'est sur sa page personnelle qu'il a multiplié les publication à un rythme quasi quotidien, s’adressant aux Auxerrois sur l’évolution de la pandémie et sur les mesures adoptées dans sa ville. De nombreuses photos du maire en situation ont aussi été postées, suscitant là aussi réactions et commentaires.
La page Facebook de Crescent Marault n’a pas du tout été active pendant la période de confinement.
Ce n’est que pour rendre hommage aux « héros qui ont sauvé la France » le 8 mai dernier que le candidat à la mairie d’Auxerre a repris la parole. Plus récemment, c’est à Jean-Claude Hamel, ancien président de l’AJA décédé le 02 juin dernier que Crescent Marault a adressé un message. Mais malgré des mises en scène en vidéo travaillées et scénarisées pendant le premier tour adressées aux électeurs, toujours aucun signe d’un retour en campagne sur le numérique pour la liste de droite…
Enfin, Denis Roycourt et sa liste verte « Auxerre écologie » ont misé sur une mascotte aux allures de panda pour diffuser leurs messages sur Instagram. La peluche s’affiche en photo de profil, mais aussi dans les bras des candidats qui se présentent face-caméra. Tout un symbole…
La communication sur la plateforme photos/vidéos semble avoir été rigoureusement pensée puisque les publications s’accordent par des couleurs et typographies communes, ou par une affiche soigneusement découpée en 15 posts différents, à la façon des influenceurs les plus actifs du réseau social. Une stratégie qui paye par plusieurs dizaines de likes. Sur Facebook, la page sert de relais à des pétitions, des communiqués ou des partages d’initiatives citoyennes.
A Montceau, la campagne repart sur le numérique
A Montceau-les-Mines, la maire sortante Marie-Claude Jarrot (40% des vois - diver droite) est en ballotage face à Eric Commeau (18,8%) et Laurent Selvez (24,4%) qui viennent d’unir leurs forces sur la liste Montceau2020. Lilian Noirot arrive en troisième position avec sa liste « Ensemble, le meilleur pour Montceau ». Aucun des trois candidats au second tour des municipales n’a investi Instagram. La campagne numérique se fera donc sur Twitter et surtout sur Facebook.
Marie-Claude Jarrot et « Aimer Montceau » réunissent 1 220 personnes sur Facebook et un peu moins de 700 sur Twitter. Son opposant de gauche, Laurent Selvez affiche un peu plus de 440 abonnés quand Lilian Noirot en compte une centaine de moins sur la page de sa liste. A noter que ce dernier devance de loin tous ses adversaires sur Twitter avec un peu moins de 2 500 abonnés.
La maire sortante ne tweete que pour rediriger vers Facebook. C'est là que se concentre la campagne de Marie-Claude Jarrot. Depuis debut juin, les contenus s'y sont multipliés : interventions de ses collistiers, illustration de ses déplacements, facebook live pour débattre. La candidate y ajoute également des contenus moins politiques comme un dessin humoristique ou un bouquet de fleurs pour la fête des mères.
Sur le réseau social Facebook, conduite par Laurent Selvez s'attache à commenter les sujets très concrets du ramassage des ordures à la réouverture des écoles en passant par les ouvertures et les actions des commerçants.
Lilian Noirot partage activement les publications (plusieurs fois par jour) de son chef de file, Nicolas Dupont-Aignan. Sur sa page Facebook, la tête de liste d'« Ensemble, le meilleur pour Montceau » réagit à l’actualité de sa commune en partageant des articles de presse et en y ajoutant ses commentaires… souvent sur des faits d’incivilité ou de voitures brûlées. Une activité en ligne, qui là aussi, ne suscite que peu de commentaires et de partages.
Une campagne en ligne mais une décision dans les urnes
L’art du tweet ou de la story n’est pas encore acquis par tous les candidats qui peinent parfois à toucher leurs électeurs sur les réseaux sociaux, surtout dans des villes de taille moyenne. Dans les plus grandes ville, la communication sur les réseaux sociaux paraît mieux pensée : plus de couleurs, outils multimédias... Certains semblent avoir compris qu'il fallait être présent sur Instagram par exemple pour parler d'écologie, un sujet dont les jeunes électeurs se sont emparés.
Cette élection ne ressemblera à aucune autre. Et dans ce contexte de crise sanitaire, certains électeurs passent plus de temps sur les réseaux sociaux qu’au marché du coin. De quoi faire réfléchir les candidats sur la stratégie de communication à adopter… Même si, le 28 juin prochain, l’élection ne se jouera pas à coup de « thumbs up », mais bien dans les urnes.