Perrine Goulet, de la Ddass à l'Assemblée nationale

La députée LREM de la Nièvre Perrine Goulet est l'un des premiers enfants placés de l'aide sociale à l'enfance à avoir été élu. Un parcours hors norme pour cette novice en politique qui a longtemps voulu mettre son passé sous cloche.

Le 20 novembre 2018, la députée LREM de la Nièvre Perrine Goulet s'exprime à l'Assemblée nationale lors des questions au gouvernement. Elle termine son intervention sur l'aide sociale à l'enfance par ces mots : "Je caresse le doux rêve que d'autres enfants placés comme moi siègent un jour dans cet hémicycle. Aujourd'hui, je vous demande Madame la ministre : que comptez-vous mettre en place pour rendre l'aide sociale à l'enfance égalitaire, réellement efficiente et pour permettre à ces oubliés de la République d'avoir un avenir ?"

Ce jour là, elle sort de l'ombre. Perrine Goulet révèle dans l'Hémicycle qu'elle est une enfant de la Ddass. L'émotion se ressent sur les bancs de l'assemblée nationale, les députés l'ovationnent.

"Au moment où je me suis levée, je ne savais pas encore si j'allais le dire ou pas. L'émotion m'a un peu submergée, je me suis dit 'lance-toi'. Mais ce n'était en aucun cas prémédité", affirme l'élue. "Mes amis n'étaient pas au courant. Mes enfants le savaient mais il y a des choses qu'on a du mal à évoquer. Et ça a bouleversé certaines choses mais je ne le regrette pas aujourd'hui."
 

 

Un accident fait basculer sa vie à 9 ans

Un parcours atypique pour un député. Perrine Goulet a 9 ans, quand sa vie bascule. Sa mère décède dans un accident de la route, son père refuse de la garder. Elle est placée dans un foyer de Nevers. 

"J'étais très pénible, car très en colère. Je pense que je n'étais pas facile à gérer pour les éducateurs, mais c'est un cercle vicieux. Et puis pas de suivi psychologique, donc c'est 'elle est pénible'", raconte la députée.

Promiscuité, violences, de ces neuf années en foyer, Perrine Goulet a peu de bons souvenirs. "La violence, les cris, parce que les éducateurs crient tout le temps… Il y en a qui disent qu'ils aimeraient bien retourner à l'enfance. Moi pas. Ma vie commence à 18 ans et c'est très bien."

Une vie de femme, Une vie professionnelle chez EDF, puis un jour, un engagement politique. Et Perrine Goulet devient la porte-parole de ces oubliés de la République, renvoyée vers le passé en allant visiter des foyers. Nous l'avons suivie à Paris lors d'une de ces visites. "Je ne ressens rien de particulier parce que j'ai vraiment décloisonné ces deux choses là. Là, je regarde si les chambres sont habitées, s'il y a des photos, s'ils ont chacun leurs jouets, comment ils sont organisés. C'est plus ça que je regarde", explique-t-elle.
 

Faire changer les choses

Un vécu, une histoire. Certains seraient tentés de penser un coup médiatique, elle s'en défend. "Je ne veux pas qu'on ramène mon travail à ça. Je fais ce que je pense être bien. Ce que j'essaye de faire, c'est faire changer les choses pour les gens. Alors là effectivement c'est des enfants, ça ne me rapportera rien en électorat parce qu'ils ne votent pas. Mais peu importe, l'essentiel c'est qu'ils grandissent bien et qu'on ait une autre société pour ces enfants derrière."

Est-on à sa place à l'Assemblée nationale quand on vient de la Ddass ? Le 25 septembre 2019, Perrine Goulet remet son rapport sur la protection enfance à Richard Ferrand, le président de l'Assemblée nationale. Pour lui, il n'y a pas de doute. "Les expériences vécues par l'ensemble des députés permettent justement au travail d'être enrichi par le vécu de chacune et chacun. C'est justement ce qu'était à l'origine le grand pari du renouvellement des élus. Que l'on puisse comme ça bénéficier de l'ensemble du vécu de chacun."

Un engagement qui ne gomme pas les fêlures. Avec sa fille Klara, 18 ans, Perrine Goulet regarde désormais son passé en face. "Je pense que je n'ai pas été une très bonne mère tout le temps. Mais je vois sur mes enfants qui grandissent les trous qui leur manquent. Je vois qu'ils ont manqué à un moment quelque chose."

"C'est la seule dans tous les députés qui a eu ce passé là. Je pense que c'est la mieux placée. C'est vrai que ce n'est pas facile en temps qu'enfant de ne pas avoir sa mère autant. Mais je me dis que c'est pour la bonne cause et c'est quelque chose qui lui tient à cœur. Donc je suis fière de ma mère", confie sa fille Klara. Une mère de famille, une élue qui va continuer de se battre pour les enfants. Un dossier parmi tant d'autres devenu son cheval de bataille.
 
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