Début mai 2020, la plaque d'identité militaire du soldat Léon Bouchié a été retrouvée en Pologne, près de la frontière allemande. Jérôme Parilla, membre de l'association du Souvenir français, a retracé son histoire et contacté les descendants dans la Nièvre de ce prisonnier de guerre.
Jérôme Parilla est délégué régional du Souvenir Français dans les Pyrénées-Orientales. Il y a quelques semaines, il a travaillé avec un groupe d'archéologues amateur polonais suite à la découverte d'une plaque matricule d'un soldat français.
Avec l'aide des réseaux sociaux, cette collaboration a permis de retracer le parcours de son propriétaire, Antoine Salvat, un prisonnier de guerre catalan, dont France 3 Occitanie relate l'histoire.
A la suite de cette découverte, ce mois de mai 2021, Jérôme Parrilla est cette fois directement contacté par Dorota Bartoszwicz, un membre du même groupe de passionnés qui effectue des recherches sur place. "Elle m’a contacté directement en me disant : "on a retrouvé une plaque dans un jardin. Est-ce que vous pouvez nous aider à identifier ce soldat ?", raconte ce passionné d'histoire.
Cette plaque d'identité militaire, gravée au nom de Léon Bouchié, a été retrouvée dans un jardin par un habitant de Lubięcin près de Nowa Sól, situé dans la province de Lubiskie (Pologne).
Aussitôt, Jérôme Parilla se passionne pour cette histoire. Cet officier de réserve et féru de généalogie réussit à retracer l'histoire de ce soldat et retrouver ses descendants, Gilbert Bouchié et Monique Chevalier, les deux enfants de Léon Bouchié.
Le passé refait surface
Pour ses deux enfants, qui vivent toujours dans la Nièvre à Cosne-sur-Loire, la découverte de cette plaque est une véritable surprise : "ça surprend quand même" reconnaît Gilbert. "Je ne m’y attendais pas tant d’années après. Vous vous rendez compte ?".
L'aîné de la famille était âgé de seulement 2 ans quand son père a été fait prisonnier de guerre. "Il est parti à la guerre alors que je venais de naître. Je ne l'ai connu véritablement que quand il est rentré. Il avait beaucoup souffert surtout et il ne se vantait pas de ce qu'il avait vécu. C’était du mauvais passé qu’il disait," raconte Gilbert. Aujourd'hui, cette découverte fait ressurgir des moments douloureux. "Certains mauvais souvenirs ressurgissent", reconnaît-il.
Sa soeur, Monique, voit elle les choses d'un autre oeil. 13 ans les sépare. Si elle se dit ému et surprise par cette découverte, elle raconte qu'elle est née après la guerre et qu'elle ne se rendait pas compte à l'époque de ce qu'avait vécu son père. Mais il est évident que cette plaque militaire revêt aujourd'hui une importance particulière. "C’est un souvenir quand même", souligne Monique. "Il a vécu 5 ans prisonnier donc il a été quand même malheureux pendant la guerre."
C’est primordial car c’est un totem de famille. On a quelque chose de physique qui rattache à un parent qui a été prisonnier et victime de guerre.
Pour Jérôme Parilla, il est important que cette plaque revienne aux familles. C'est en tout cas la volonté du groupe d'archéologues polonais qui a identifié l'objet. "C’est primordial car c’est un totem de famille. On a quelque chose de physique qui rattache à un parent qui a été prisonnier et victime de guerre."
Prisonnier de guerre pendant 5 ans
Depuis la découverte de cette plaque, Jérôme Parilla tente de retracer l'histoire et le parcours de Léon Bouchié pendant la guerre. Léon Bouchié était réserviste et devait avoir 32 ans au moment de partir à la guerre. Il était cavalier de deuxième classe au 64ème groupe de reconnaissance de division d'infanterie.
Le 14 juin 1940, il est fait prisonnier, avec une grande partie de son bataillon à Saint Loup de Buffigny. Prisonnier au Stagal VIII C, un camp de prisonniers situé à Sagan, il a selon Jérôme Parilla très certainement intégré un groupe travaillant dans une ferme de Lubięcin à une cinquantaine de kilomètres du Stalag. "Ce qui se faisait dans ces stalags, c’est qu’on prenait les prisonniers pour les emmener travailler dans des fermes, dans des usines" raconte Jérôme Parilla. "La plaque de Léon Bouchié a été trouvée dans une maison où il y avait à l’époque une forge. Tout laisse à supposer qu’il a travaillé dans cette forge là."
Reste pour l'historien à déterminer désormais quel fut le chemin parcouru par Léon pour son retour en France. "On sait seulement qu'il fut rapatrié le 25 avril 1945", souligne Jérôme Parilla. "Le camp fut évacué par les nazis début février 45 et la majorité des prisonniers transférés vers l'ouest au fur et à mesure de l'avancée de l'Armée Rouge."
L'historien cherche donc à savoir aujourd'hui ce qu'il lui est arrivé entre les mois de février et avril 1945. "Il est tout à fait important de raconter ces histoires parce que souvent, ces prisonniers de guerre, quand ils sont revenus, ils n’ont rien raconté ou peu de choses."
Retour en pays nivernais
Si la crise sanitaire le permet, la plaque d'identité militaire de Léon Bouchié reviendra dans la Nièvre. C'est ce qu'espère en tout cas Jérôme Parilla ainsi que Monique, la fille du soldat. "On est en train de voir avec les autorités du département," explique Jérôme Parilla. "On essaiera d'organiser une petite cérémonie avec les officiels pour la remise de la médaille à la famille. Ensuite, est-ce que la famille la conservera ou est-ce qu’elle partira dans un lieu de mémoire, je ne le sais pas encore" s'interroge l'historien.
La plaque de matricule de Léon Bouchié pourrait rejoindre si la famille le souhaite une exposition dans un musée et permettre aux nouvelles générations de connaître l'histoire de ce prisonnier de guerre originaire de la Nièvre.
Qu'est-ce qu'une plaque matricule ?
Lorsque le prisonnier de guerre arrive au stalag (camp de prisonnier), il reçoit un numéro de matricule gravé sur une plaque qu’il devra conserver tout le temps de sa détention.