Herbicides, fongicides, insecticides... Il y en a en plus ou moins grande quantité selon la période l'année, dans l'air que nous respirons que ce soit à la campagne ou en ville. La Bourgogne Franche-Comté n'y échappe pas. Une campagne nationale de prélèvement souligne leur présence dans l'air.
Des pesticides, il y en a partout. Mais quels pesticides et dans quelles proportions ? Pour répondre à ces questions une étude a été réalisée, sur un an, de juin 2018 à juin 2019. Une campagne nationale de prélèvements a eu lieu sur 50 sites représentatifs. Elle était conduite par l'ANSES, INERIS, ATMO FRANCE, et la Fédération des associations agréées pour la surveillance de la qualité de l'air (dont ATMO Bourgogne Franche-Comté).
Une liste de 75 substances a été établie sur la base de leurs caractéristiques de danger et de critères d’utilisation, d’émission et de persistance dans l’air.
#Pesticides dans l’#air - La France est un des seuls pays en Europe (avec la Belgique) à avoir engagé ce type de campagne pour mesurer les pesticides dans l’air extérieur à l’échelle nationale.
— Anses (@Anses_fr) July 2, 2020
En Bourgogne Franche-Comté : 39 substances découvertes sur 75
Trois sites ont été retenus dans la région. Tous en zone rurale, mais d’affectations différentes : « Grande culture », « Viticulture », «Elevage ». Ces sites étaient volontairement éloignés des parcelles potentiellement exposées aux substances.• Les Grandes cultures du Val-de-Saône :
C'est entre Dôle et Dijon que les quantités de pesticides les plus importantes ont été découvertes. Surtout des herbicides, mais aussi des fongicides, et des insecticides.
Au total une vingtaine de produits différents ont été identifiés dans l'air. Ces produits sont présents tout au long de l'année, mais en quantité plus importante en octobre/novembre, et de mars à juin, au moment des traitements sur les céréales.
Une présence qui ne diffère pas de la situation nationale. "Les herbicides retrouvés correspondent à ceux observés sur les sites grandes cultures en zone rurale" explique ATMO BFC.
• Une zone de viticulture dans le Mâconnais-Beaujolais :
25 substances ont été détectées, au coeur d'un village dont le nom n'a pas été précisé. Le plus présent est le Folpel, un fongicide. Mais là encore, les niveaux ne sont pas alarmants. "Le folpel est un fongicide qui correspond à ce qui a été retrouvé en zone viticole. Le niveau est plutôt faible. La moyenne annuelle est largement inférieure à celle observée pour les sites de même typologie" détaillent les auteurs de l'étude.
Les pesticides dans l'air sont là aussi plus présents pendant les périodes de traitement de la vigne.
- Au printemps, en mars/avril : des herbicides, avec de faibles concentrations.
- À partir de fin mai et jusqu'à début août : Ce sont des fongicides (notamment contre l'oïdium). La concentration de pesticide est forte mais moins élevée que ce ce qui a pu être observé ailleurs, sur d'autres sites viticoles.
- En octobre/novembre : on retrouve principalement des herbicides.
• Une zone d'élevage dans le Clunisois :
13 substances sur 75 ont pu être quantifiées. 7 l'ont été à plus de 20%
Les pesticides sont présents toutes l’année. Les concentrations sont plus élevées en octobre/novembre, puis en juin/juillet à des niveaux moindres. Elles sont cependant plus faibles que sur les autres sites.
3 substances interdites
Trois substances non autorisées ont été détectés à de faibles niveaux :
• Un insecticide : l'Ethion
• Un traitement antifongique : le Pentachlorophenol
• Un insecticide interdit depuis 1998 : le Lindane, considéré comme une des substances les plus dangereuses (avec des effets cancérogènes, et/ou reprotoxique et/ou perturbateur endocrinien avérés).
Sur les sites de Bourgogne Franche-Comté, le Lindane a été détecté 22 fois en Val-de-Saône, 23 fois en zone viticole, et 3 fois en zone d'élevage.
Détecté sur l’ensemble du territoire, le Lindane a été identifié dans près de 80% des échantillons analysés, alors qu’il est interdit depuis 1998.
En ce qui concerne le Pentachlorophénol, sa présence n’est pas liée spécifiquement à l’activité agricole est peut provenir d’autres sources.
#Pesticides dans l’#air – A terme, les résultats de cette campagne contribueront à définir une stratégie nationale de surveillance des pesticides dans l’air extérieur.
— Anses (@Anses_fr) July 2, 2020
➡️Tous les détails sur nos travaux : https://t.co/pMi93oTKT8 pic.twitter.com/lmlP3FebLJ
Une toxicité à évaluer
32 substances retrouvées dans l'air ambiant vont faire l'objet d'un examen approfondi.
A Dijon, Karine Lefèvre, Chargée d'études ATMO BFC, précise que "ce sont des mollecules qui sont restées dans le sol depuise l'on a épandues il y a de nombreuses années. Elles ressortent en raison des pratiques agricoles, des conditions météo, du vent qui les remet en suspission." Plus globalement, cette étude "montre la rémanence des produits phytosanitaires qui restent dans le sol et qui se libèrent au fil du temps."
En Bourgogne Franche-Comté, "les niveaux des substances non autorisées restent faibles et faiblement détectés" estime le rapport d'étude. Néanmoins, cette présence interroge. "À partir des niveaux qu'on a observés, on n'est encore pas capable de dire si c'est toxique, analyse Karnie Lefevre. L'Anses va reprendre les données, les concentrations, les fréquences de détection pour évaluer la toxicité sur l'homme et sur l'environnement".
A terme, cette étude permettra de définir une stratégie de surveillance pérenne des résidus de pesticides dans l’air.
Intervenants :
- Karine Lefevre, Chargée d'études ATMO BFC
- Stéphane Dupas, président des Amis de la Terre 21
- Thierry Falconnet, Maire de Chenôve (PS)