Le maire de Chalon-sur-Saône avait invoqué le "principe de laïcité", pour supprimer le menu de substitution proposé quand un plat avec du porc était servi à la cantine. Pour le Défenseur des droits, la décision de la municipalité "pourrait être susceptible de revêtir un caractère discriminatoire".
Pourquoi le menu de substitution a-t-il été supprimé à Chalon ?
Depuis 1984, un menu de substitution au porc était servi dans les cantines scolaires de Chalon-sur-Saône, deuxième ville de Bourgogne qui compte environ 44 500 habitants. Environ 2 000 enfants fréquentent chaque jour les cantines scolaires communales.Le 29 septembre 2015, une délibération du conseil municipal a supprimé ces menus de substitution, au motif du respect des principes de laïcité et d’égalité devant le service public.
La Ligue de Défense Judiciaire des Musulmans (LDJM) avait saisi la justice et déposé un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif de Dijon.
Pourquoi le Défenseur des droits a-t-il été saisi ?
C’est le tribunal administratif de Dijon qui a saisi le Défenseur des droits d’une demande d’observations.Le Défenseur des droits est une institution de l’Etat complètement indépendante, qui a été créée en 2011. Elle a deux missions :
-défendre les personnes dont les droits ne sont pas respectés ;
-permettre l’égalité de tous et toutes dans l’accès aux droits.
Jacques Toubon, qui préside cette institution, vient de faire connaître sa position.
Quelle est l’argumentation du Défenseur des droits ?
Le Défenseur des droits estime que la délibération du conseil municipal de Chalon-sur-Saône ne peut être considérée comme une simple mesure de réorganisation des services."Cette décision est intervenue dans un contexte bien précis", le maire ayant lui-même annoncé son adoption et visé la pratique de la religion musulmane dans une tribune parue dans la presse un mois auparavant le 21 août 2015", rappelle le Défenseur des droits.
Evoquant la campagne de communication qui a accompagné la décision de revenir au menu unique, le Défenseur des droits déclare que le maire a souhaité "donner une signification particulière à la suppression des menus de substitution".
"Au regard de ces éléments, ajoutés à l’absence de fondement juridique tenant à des contraintes d’organisation et de fonctionnement du service, la délibération contestée pourrait être susceptible de revêtir un caractère discriminatoire à raison de l’appartenance religieuse, au sens des articles 9 et 14 de la CEDH", conclut le Défenseur des droits en invoquant la Cour européenne des droits de l'homme.
Que va-t-il se passer maintenant ?
Il appartient maintenant au tribunal administratif de Dijon de fixer une audience.La Ligue de Défense Judiciaire des Musulmans se réjouit de cet avis et se dit confiante pour la suite de la procédure judiciaire.
De son côté, Gilles Platret, maire de Chalon-sur-Saône (Les Républicains) déclare que cet avis ne le fera pas fléchir. Le maire estime que "le Défenseur des droits est ignorant des enjeux très, très lourds qui sont ceux de la restauration scolaire".
Intervenants :
-Jean-Baptiste Jacquenet-Poillot, avocat de la Ligue de défense judiciaire des Musulmans (LDJM)
-Gilles Platret, maire de Chalon-sur-Saône (LR)