"Il faut qu'on trouve des variétés résistantes à la canicule" : en Bresse, les maraîchers en quête de solutions

Pendant cette vague de canicule, les fruits et légumes souffrent durement de la chaleur. Le ministre de l'agriculture Marc Fesneau s'est rendu sur des exploitations de Saône-et-Loire ce mardi 22 août pour leur apporter son soutien.

À Sornay, près de Louhans dans la Bresse, le mercure affiche 37°C cet après-midi. Dans la serre de Matthieu Gauthier, maraîcher : des plants de tomate marron, comme désséchés, aux feuilles ratatinées. Ils sont victimes de la cladosporiose, un champignon qui se développe avec la chaleur. "Ça se voit, ça fait pourrir les feuilles. Donc, il y a moins de photosynthèse [les plantes absorbent moins de lumières par leurs feuilles, ndlr] et ça entraîne une baisse de rendement de 10 à 20 % sur ces serres", note l'agriculteur. 

"On a le mildiou jusqu'à 26°C-28°C, puis la "clado" arrive lorsqu'il fait excessivement chaud", explique Matthieu Gauthier. "Or, nous, en bio, on n'a rien de concret pour lutter contre. À part trouver des variétés de tomates plus résistantes, il n'y a pas de solution. Mais souvent, les variétés résistantes ont moins de goût."

Trouver des variétés plus résistantes

Ce casse-tête, le maraîcher bressan y fait face depuis son installation en 2016. "La cladosporiose était très peu présente en Bresse il y a 10 ans. Elle est arrivée à cause des chaleurs répétées. De 2000 à 2015, il n'y a eu qu'un épisode de "clado" lors de la canicule de 2003." Mais depuis 2016, la maladie des tomates est revenue tous les ans. 

Comment faire ? "Je pense qu'il y a un coup de pouce à donner sur les recherches variétales", insiste le maraîcher. Trouver de nouvelles variétés de tomates, aussi goûtues, mais plus résilientes face à la chaleur et capable de vaincre les maladies. Mais ce n'est pas la seule aide dont le secteur aurait besoin.

Des dizaines de milliers d'euros pour s'adapter à la chaleur

Pour s'adapter au réchauffement climatique, Matthieu Gauthier a également dû investir. Dans l'irrigation, d'abord. "Ça a été notre plus gros chantier : automatiser l'irrigation pour apporter moins d'eau, mais plus souvent. L'enjeu était de rafraîchir les légumes plutôt que de les arroser. Lorsqu'il fait très chaud, le légume pousse peu ou pas du tout, il a besoin qu'il fasse moins chaud." Coût de cette automatisation sur les 5 hectares de terrain : environ 30 000 euros.

Sous serres, Matthieu Gauthier tente aussi d'apporter de l'ombre à ses légumes. Mi-juillet, il a peint les murs de ses serres avec une peinture à base de chaux blanche. "Ça fait de l'ombre lorsqu'il y a du soleil, et lorsqu'il y a de l'ombre dehors, la paroi devient translucide." Ce système lui permet de gagner environ 5°C de fraîcheur dans la serre, "et on a moins de problèmes de coulures et de brûlures de fleurs de tomates, qui nous font perdre du rendement".

"Sans la peinture on peut facilement monter à 40-45°C sous serre. Avec la peinture, on tourne autour de 30-32°C sous serre."

Matthieu Gauthier

maraîcher

Il faut renoncer à certains légumes

Mais tous ces systèmes ne suffisent pas à endiguer totalement les phénomènes climatiques. "Ce qui m'inquiète, c'est les canicules de plus en plus précoces dans la saison", confie Matthieu Gauthier. "Là, en août, 80% de nos légumes d'automne sont déjà plantés et prêts à résister à la chaleur."

"Mais lorsqu'en plein mois de juin, il fait plus de 30°C alors qu'on commence à planter les carottes, choux et poireaux, ça pénalise vraiment les légumes. Surtout qu'en Bresse, on a pas beaucoup de vent. Moins qu'en vallée du Rhône."

Matthieu Gauthier

maraîcher

Il s'interroge sur les nouveaux visages de l'agriculture dans les prochaines années. "Intérieurement, je me suis toujours posé la question : est-ce que dans 10 ans, je ne serai pas comme en Espagne avec des filets d'ombrage sur tout mon jardin ?"

Matthieu Gauthier a déjà renoncé à cultiver des brocolis, devenus inadaptés aux conditions climatiques de la région. En parallèle, il perd de l'argent car il ne parvient pas à amortir le coût de l'inflation sur son activité. 

Le ministre en déplacement dans la région

Pour affirmer son soutien à la filière maraîchère, le ministre de l'agriculture Marc Fesneau était en déplacement dans une autre exploitation de Saône-et-Loire ce mardi matin. "Ces épisodes de canicule vont se développer. Il y en aura de plus en plus, et il y a des régions comme celle-ci qui seront plus touchées que d'autres. Donc, on a besoin de cette vigilance", a déclaré le ministre.

"Le dérèglement climatique va s'accentuer. C'est durable, et ça va profondément modifier les systèmes agricoles. La question, c'est : comment être plus résilient ?"

Marc Fesneau

ministre de l'agriculture

Ce mercredi 23 août promet d'être encore caniculaire avec 37 départements en alerte orange, dont la Saône-et-Loire. Le Rhône voisin, lui, est placé en alerte rouge. On attend jusqu'à 36°C à Tournus et Chauffailles, 35°C à Louhans, Mâcon, Chalon-sur-Saône et Digoin.

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