Le groupe nucléaire Areva va passer en revue les 9 000 dossiers de fabrication de son usine du Creusot, en Saône-et-Loire, depuis 1943. Cette décision fait suite à la détection d'anomalies dans le suivi des processus de fabrication d'équipements. L’audit est étendu à l'usine de Saint-Marcel.
Areva avait annoncé fin avril 2016 que des anomalies documentaires et des écarts méthodologiques avaient été détectés dans le suivi des processus de fabrication d'équipements au sein de son usine du Creusot, où a notamment été fabriquée la cuve de l'EPR de Flamanville.Cette décision de passer en revue un par un plus de 9 000 dossiers de pièces forgées au Creusot depuis 1943 fait suite à la détection de pratiques non conformes dans un échantillonnage prélevé parmi les "dossiers non barrés", a priori non problématiques, a expliqué à l’AFP une source proche du dossier.
"On a pris une décision : on ne va pas se poser de questions, on va relire tous les dossiers", a indiqué cette source alors que l'audit qualité s'est jusqu'ici concentré sur 400 dossiers de fabrication prioritaires dits "dossiers barrés" où des incohérences, des modifications ou des omissions avaient été relevées.
Selon l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), ces irrégularités consistent en "des incohérences, des modifications ou des omissions dans les dossiers de fabrication" de ces 400 pièces produites depuis 1965, dont une cinquantaine sont en service sur le parc nucléaire français.
Combien de temps prendra l'examen des 9 000 dossiers ?
Sur les 9 000 dossiers, 6 000 concernent des équipements pour le secteur nucléaire depuis 1965. "On va tous les regarder un par un", selon cette source. Une méthodologie d'analyse des dossiers fait actuellement l'objet d'échanges avec EDF, qui exploite le parc nucléaire français, et sera présentée à l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN).Un calendrier est également en cours de définition, sachant que la priorité sera donnée aux dossiers concernant les réacteurs en fonctionnement. "Je ne sais pas combien d'anomalies on aura dans les 6 000 dossiers (...) mais ce ne sera pas zéro", a poursuivi la même source. "Ca va durer plusieurs mois."
L'audit mené par Areva sur les 400 premiers dossiers examinés a déjà permis de relever 87 irrégularités sur des réacteurs en fonctionnement en cours d'examen par l'ASN. L'une d'elles concerne la virole basse d’un générateur de vapeur du réacteur numéro 2 de Fessenheim (Haut-Rhin), actuellement arrêté. Mais Areva assure que pas plus que les autres anomalies, celle-ci n'est pas préjudiciable à la sûreté de l'exploitation. L'ASN a toutefois décidé de maintenir à l'arrêt le réacteur dans l'attente des résultats de tests complémentaires prévus jusqu'à la fin de l'année.
L'audit a aussi déjà été étendu à l'usine de Saint-Marcel (Saône-et-Loire), qui assemble les composants lourds équipant les réacteurs, et à celle de Jeumont (Nord), qui produit des équipements mobiles pour réacteurs.
Les anomalies ont-elles disparu à partir de 2012 ?
Areva avait indiqué précédemment dans un communiqué avoir constaté la disparition des anomalies après 2012. Le groupe avait aussi dit avoir "renforcé ses procédures internes de contrôle à l'usine du Creusot et mis en place des mesures pour renforcer la culture de sûreté et de qualité".
Par ailleurs, un programme d'essais est en cours pour démontrer la résistance du couvercle et du fond de la cuve de l'EPR en construction à Flamanville (Manche) et fabriqués au Creusot, où un défaut dans la composition de l'acier a été décelé. Les résultats sont attendus pour fin 2016. "Pour l'instant, les résultats confirment les hypothèses de nos dossiers. Il n'y a pas de surprise", selon la source proche.
Ce défaut a également été détecté sur des générateurs de vapeur équipant 18 réacteurs nucléaire d'EDF, qui mène actuellement des investigations complémentaires à la demande de l'ASN pour démontrer leur sûreté. D'autres pièces seront aussi examinées, comme les plaques tubulaires, selon la même source.