Retour en 5 actes sur ce mariage contesté à la mairie d’Autun

Un couple autunois a failli ne pas se marier ce samedi 1ᵉʳ juin. Le maire avait reporté leur mariage en raison d'un risque de trouble à l'ordre public. Après une bataille judiciaire sans précédent, le couple a pu célébrer son union.

Jusqu’au bout, ils se sont demandés s’ils allaient monter les marches de l’hôtel de ville. Après plusieurs jours d’incertitude, le soulagement. Tahsin Ardiclik et Linda Cardoso deviennent officiellement mari et femme. Retour sur ce mariage contesté.

Acte 1 : le maire reporte le mariage

Le 24 mai dernier, le maire annonce par un courrier le report de leur mariage. Motif invoqué : un risque de trouble à l’ordre public. "La rencontre avec les mariés nous laissait présager que la présence des forces de l’ordre ne les inquiétait pas et que lorsqu’on louait ce genre de véhicules, ce n’était pas pour rouler à 50 km/h. Donc très clairement pour nous, le code la route était menacé et la tranquillité et sécurité publique également", détaille Cathy Nicolao Verdenet, Première adjointe (Renaissance) au maire d’Autun.

Six jours plus tôt, le 17 mai, le maire avait également pris un arreté pour interdire "le regroupement ou la circulation des véhicules de sport sur les voies publiques de la commune dont la linitation de vitesse est inférieure ou égale à 50km/h" durant le week-end. 

Cette décision du maire intervient après avoir constaté, depuis un certain nombre d’années, des "débordements à l’occasion de ce que l’on peut considérer comme étant une mode de location de véhicules sportifs, de grosses cylindrés, en Suisse. Cela peut mettre, à un moment donné, nos concitoyens en danger et il y a très clairement un manquement au Code de la route lors de ces cortèges", développe la Première adjointe. Pour cette raison, la commune a déjà mis en place une caution et une charte de bonne conduite qui donne la possibilité à l’édile de ne pas célébrer le mariage, ou de repousser le mariage de quelques heures ou d'une semaine, en cas de troubles avant le mariage. 

Acte 2 : le couple saisit le tribunal administratif de Dijon

Ne comprenant pas la décision de Vincent Chauvet, maire d’Autun, le couple saisi le tribunal administratif de Dijon. Ce dernier leur donne raison et suspend l’arrêté du maire. "Le juge du tribunal administratif de Dijon a ordonné la suspension de l’exécution de l’arrêté, au motif d’une atteinte grave et manifestement illégale, à la liberté du mariage", explique Alexandre Ciaudo, avocat du couple.

Acte 3 : le maire saisit le Conseil d’État qui lui donne raison

La bataille judiciaire se poursuit et Vincent Chauvet décide à son tour de saisir le Conseil d’État, soit la plus haute juridiction administrative. La décision a été rendue à quelques heures seulement du mariage. Le Conseil d'État donne raison au maire et ordonne ainsi l'annulation de la décision du Conseil administratif expliquant "qu'il n'est porté aucune atteinte grave et manifestement illégale au droit de se marier et à la liberté d'aller et venir dès lors que le risque de troubles à l'ordre public est suffisamment établi pour justifier d'une part le report du mariage et d'autre part l'interdiction des cortèges liés à la célébration de mariage dans le centre-ville durant la période du 31 mai au 2 juin." 

Acte 4 : le mariage a lieu, le soulagement des mariés

Bien que le Conseil d’État lui donne raison, le maire d’Autun s’est engagé à célébrer le mariage, à condition qu’aucun trouble à l'ordre public ne soit constaté avant et pendant la cérémonie. À 14 heures, le couple a pu célébrer son union. "On a vraiment eu peur qu’ils ne nous marient pas, c’est un gros soulagement. Je n’en dormais plus la nuit. Je me demandais "est-ce que je vais être marié le 1ᵉʳ juin à 14 heures ?" Tous les jours, je me levais, je me posais cette question", raconte Tahsin Ardiclik, après la cérémonie. "Depuis 2021, on a prévu de se marier. On a posé la date du mariage il y a un an. Ça coûte de l’argent, c’est de l’organisation, donc bien sûr que l’on attendait ce jour-là avec impatience", complète sa femme.

Acte 5 : une ordonnance importante pour les maires

Après la décision rendue par le Conseil d’État, la mairie d’Autun souligne l’importance de cette ordonnance historique. "Dorénavant tous les maires de France auront la possibilité de maintenir ou reporter un mariage, s’ils estiment qu’il y a un risque pour l’ordre et la tranquillité publique, explique Cathy Nicolao Verdenet. À partir du moment où nous pensons qu’il peut y avoir un risque de trouble à l’ordre public, alors nous pourrons demander un report du mariage et prendre toutes les garanties pour que le mariage puisse se passer de manière sereine."

Pour Maître Alexandre Ciaudo, avocat du couple, il est encore trop tôt pour dire si cette ordonnance fera jurisprudence. Il redoute qu’elle entraîne une multiplication des contentieux. "Le risque qui me parait résulter de cette décision du Conseil d’État, c’est que les maires puissent penser qu’ils peuvent discrétionnairement refuser de célébrer des mariages alors qu’il n’y a pas suffisamment d’éléments dans le dossier leur permettant de penser qu’il existe un réel risque de trouble à l’ordre public."

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