Ils étaient attendus. Très attendus. C'était leur quatrième fois aux Eurocks et ils ont joué comme si c'était leur dernière. Muse est devenu une énorme machine à sons et à sous. Mais les trois Anglais ont gardé cet esprit qui garantit à leur public des shows dantesques. Le concert de dimanche soir rejoint la collection des grands moments du trio de Teignmouth.

Un set d'une heure et demie que certains trouveront un peu court. C'est ça l'amour. On voudrait que ça dure plus longtemps.

Pour comprendre pourquoi ce concert ne pouvait être que géant, il faut remonter le temps.

Retourner en l'an 2000. Les jean's trop larges, les modems internet et les kebabs à 30 Francs. Il y a 22 ans, déjà, que Matthew Bellamy et ses deux acolytes foulaient pour la première fois une scène aux Eurocks. Les jeunes Anglais potes de lycée se découvraient au monde en même temps que leur rock alternatif qui allait dépoussiérer un genre cannibalisé par le style garage américain.

20 ans plus tard, 30 millions d’albums vendus plus loin, le groupe était la seule tête d’affiche du dimanche de l’édition 2021 des Eurocks. Avant une annulation évidente pour cause de pandémie mondiale qui avait désespéré les fans.

Partie remise à ce dimanche 3 juillet donc. C'était le grand jour. Une soirée quasiment entièrement à l'honneur des Anglais. Avec juste un autre artiste, en première partie pour ainsi dire. Declan Mckenna, un jeune chanteur compatriote qui avait deux ans quand Muse jouait pour sa première aux Eurockéennes. Autant dire que c'était le tapis rouge. Pour des raisons de sécurité, les organisateurs avaient baissé la jauge à 25 000 spectateurs. Toutes les places étaient évidemment parties très vite. La journée allait être belle et la nuit chaude.

Devant les grilles, le soleil tapait fort sur les têtes. Ils étaient déjà une centaine à patienter, à 10 heures du matin. Oui, les calculs sont bons, c’est à dire à 7 heures de l’ouverture des portes. À 12 heures du début du show. Les fans français de Muse ont cet amour chevillé au corps pour des garçons qui le leur rendent bien.

Emil Zátopek électrifié, t-shirt Muse sur son dos tout mouillé

On les a revu, ces fans, à 17h05, grimper la colline de terre ocre façon marathon du Malsaucy. C'était alors à celui ou celle qui arriverait en tête aux barrières de la Grande Scène. On a trottiné aux côté d'un Emil Zátopek électrifié, t-shirt Muse sur son dos tout mouillé pour tenter de comprendre. "Je cours pour être tout devant, parce que c'est très rare qu'il viennent, alors du coup ça me rappelle les premières Eurocks quand ils sont venus, je suis là depuis sept heures du matin, bon concert à toi !" nous a dit Zátopek, le souffle un peu court, fonçant pour les derniers 200 mètres jusqu'à la scène.

Il est maintenant presque 21h. La foule est compacte. Joyeuse. Certains ont leur place depuis deux ans. La scène semble épurée. Au dessus de la batterie de Dominic Howard, un grand signe, le logo du nouvel album à paraître fin août, le dixième, "Will of the People". On ne le sait pas encore, mais cette soirée sera marquée par le signe du feu.

Il est 21h. Muse débarque. Enfin on présume. Les musiciens portent une veste noire à capuche et, surtout, d'inquiétants masques qui cachent leurs visages. Des masques qui font penser à l'univers sombre de la série à succès sud-coréenne, Squid Game. C'est l'ambiance d'un monde moderne en déliquescence qui est le thème central du nouvel album des Anglais, plus sombre et politique que les précédents.

Et c'est "Will of the People" qui ouvre le bal. Ou plutôt le feu. Les premiers riffs surpuissants jaillissent de la guitare de Bellamy. En bonne machine à tube qu'il est, Muse a déjà fait de son nouveau single un nouveau classique. La foule des Eurocks disjoncte immédiatement.

Le son est surpuissant. Et Muse est géant.

Le logo s'enflamme au dessus de Dominic Howard. Des torches de feu jaillissent en mur de flammes aux pieds de Matthew Bellamy et Christopher Wolstenholme. Le son est surpuissant. Et Muse est géant. On a toujours été impressionné par leur capacité à occuper l'espace de scène gigantesques à eux trois (même s'ils sont depuis plusieurs années épaulés sur scène par un quatrième larron).

Fidèles à leurs habitudes, le costaud bassiste reste à Cour. Laissant à Jardin le Bellamy faire le bel amant avec sa guitare diabolique, arpenter l'avancée centrale qui lui permet d'approcher très près de son public. "Madness", "Supermassive Black Hole" ou encore "Time is Running Out"...Les standards s'enchaînent. Si le groupe est un peu sec en matière de communication ( "Vive la France", "Ca va les Eurockéennes ?" et c'est à peu près tout) il compense par une énergie toujours aussi folle.

Muse alterne gros classiques et nouveaux titres. Le son est monstrueux. On a l'impression qu'ils ont poussé le volume de leur mur d'amplis à 11!

Un des moments toujours forts, quand Bellamy fait couiner sa guitare sur l’intro de "Plug in Baby". C'est devenu un tel classique qu'à la première note de larsen, les fans savent immédiatement que le tube va démarrer. Et que le chanteur guitariste va s'élancer dans un sprint digne d'Emil Zátopek et fendre la foule.

Autre grand moment, "Uprising". Depuis qu'il est devenu mastodonte, le groupe a toujours tenu à proposer des shows hyper calés niveau vidéo. Ce qui est mieux pour les gens situés tout au bout de la plaine des Eurocks. Ils ont droit, sur écran géant, à un sacré spectacle. Sur le final de la chanson, Bellamy fait chanter le public en le fixant des yeux dans les écrans géants. Et puis un nouveau mur de flammes, et cette sensation que, cette fois, les potards ont été poussés à 12 ! Le son est juste énorme. Mais on se répète.

"Il était une fois dans l'Ouest", version Muse

Matthew a désormais revêtu un blaze en cuir équipé de clous en LED qui clignotent. On n'a pas le temps de se demander si c'est hype ou ringard qu'il s'installe derrière un piano et entame l'intro de "Starlight", pour une version encore dantesque et un final surpuissant.

Après un break, ils repartent pied au plancher avec "Kill or be Killed", un autre morceau issu du nouvel album. Spoiler: un nouveau tube, avec une démonstration magistrale de tapping de Bellamy, dont le jeu de guitare fait de lui depuis longtemps un des ténors de la six corde.

Moment suspendu. Christopher Wolstenholme rejoue, avec un micro produisant un son d'harmonica, le cultissime thème d'"Il était une fois dans l'Ouest" rejoint lors de l'explosion orchestrale par Bellamy qui a mis tout un orchestre de cordes dans sa guitare avant de lancer un autre tube, "Knights of Cydonia".

On ne le sait pas encore, mais c'est l'ultime morceau du concert. Qui aura duré une heure et trente minutes. On se dit que c'est un peu court, surtout quand on repense aux doux dingues présents depuis sept heures du matin. Mais Muse n'en est plus là. Ils n'ont rien à prouver. Leur présence est déjà un cadeau et c'est la marque des plus grands.

Il était une fois dans l’Est, trois Anglais qui avaient mis à terre les français. Il était 22h30. Au dessus de la Grande Scène, c'était le traditionnel feu d'artifice. On regardait le trio sortir des backstages et s'engouffrer dans d'énormes cylindrées noires et quitter sous escorte de gendarmerie motorisée la Presqu'île du Malsaucy. Ils ont donc filé à l'anglaise. Mais on leur pardonne. C'est ça l'amour.

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