Tour de France : sur les routes du Morvan, "je comprends enfin pourquoi le Tour passionne tant"

A l’occasion du passage du Tour de France en Bourgogne vendredi 2 juillet, France 3 s’est glissée parmi les supporters à la côte de la Croix de la Libération vers Autun. L’occasion de comprendre pourquoi la Grande Boucle passionne tant le public.

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Chaque année, des milliers de supporters investissent les bords des routes où la célèbre course cycliste passe. Chaleur de plomb ou mauvais temps, rien ne les arrête ! Mais pourquoi les gens sont si passionnés par le Tour de France ?

C’est avec cette interrogation en tête que je me dirige vers la côte de la Croix de la Libération, à proximité d'Autun (Saône-et-Loire). Ce vendredi 2 juillet, le ciel est dégagé et le soleil brille pour le passage des coureurs sur les routes du Morvan. C'est la septième étape, avec 249 kilomètres, la plus longue depuis 20 ans, parait-il. 

Montée de la côte en avant-première

J'arrive à 11h30. Lorsque je monte la côte de la Croix de la Libération (en voiture), les accotements sont déjà bien remplis. Pourtant le peloton est attendu dans plus de 4 heures ! Des spectateurs de tous les âges cassent la croûte ou prennent l’apéritif.

"On a prévu sandwichs et rosé !", déclare Roger, retraité et ancien cycliste amateur. Sur place depuis huit heures, il est venu essayer de récupérer une casquette jetée par la caravane pour son petit-fils.

Parmi les plus jeunes, des élèves du lycée du Vallon d’Autun klaxonnent tous les véhicules qui passent, motorisés ou non. Je croirais presque faire partie du peloton ! "Il a même pris le micro !", plaisantent certains sur le bord de la route en me voyant passer, équipé de tout mon matériel. Le ton est donné. Sur le tour, on n'hésite pas à s'interpeller et à faire connaissance. 

L'émerveillement de Jacques

"Vous écrivez quoi, le roman du Tour de France ?", s’amuse à son tour Jean-Michel, qui vient du sud de la Saône-et-Loire. Confortablement installé dans sa chaise pliante, il raconte volontiers ses expériences à vélo "lorsqu’il était jeune". "Une fois, j’ai couru à Pouilly-en-Auxois. J’ai d’ailleurs pris une sacrée gamelle là-bas. C’est pour ça que je m’en souviens !", rit-il.

De son côté, Jacques est plus réservé. "Vous venez pour France 3 ? Oh, c’est pas n’importe quoi ça, France 3…" Et puis petit à petit, les langues se délient. Fan de sport lui aussi, il me raconte l’histoire de toutes les étapes de la Grande Boucle dont il se souvient. Comme un enfant, il s’émerveille. "Aujourd’hui les coureurs sont vraiment impressionnants. Quand on voit les étapes qu’ils font, et même après la fin encore une heure de vélo pour se décrasser… Je vous le dis, ce sont des surhommes !" Selon lui, le Tour de France est une bénédiction pour les retraités. "Ça nous occupe les après-midis !", lance-t-il avec une pointe de malice.

Benjamin, lui, est professeur d’EPS. En attendant les coureurs, il profite sereinement d’un barbecue installé dans un chemin. Avec son fils Tom, ils sont venus depuis Saint-Léger-sous-Beuvray assister à la course. "Je viens quand je peux", témoigne-t-il. "J’aime bien le vélo, mais le mieux c’est de pouvoir discuter avec les gens. Tout à l’heure par exemple, on a discuté pendant 15 minutes avec deux Bretons qui suivent toutes les étapes. C’est ça qui est génial : de rencontrer les gens."

En attendant la caravane

La caravane du Tour est prévue pour 14h45 à la côte de la Croix de la Libération. Les enfants commencent à s’impatienter après le repas. "C’est quand la caravane ?", entend-on entre deux coups de trompettes des supporters. Une étape du tour, c'est aussi une longue après-midi d'attente. 

En prévision de l’arrivée de la procession publicitaire, un gendarme fait des aller-retour sur la chaussée pour rappeler les règles de sécurité. "Pas trop près de la route !", martèle-t-il. Il est interpellé par Patrick, retraité, qui lui demande l’air taquin s’il doit parcourir toute la montée de cette façon. "Je suis en service en haut de la côte donc je ne fais que le sommet", lui répond-il, amusé. Sur le bord de la route, tout le monde se parle. "Mais vous savez, un Gaulois est un Gaulois, il faut tout le temps qu’on leur rappelle d’être discipliné !" "C’est pour ça qu’on s’est fait envahir par les Romains", plaisante à son tour Gilles, lui aussi retraité.

Musique, klaxons, casquettes et saucissons

Et soudain, la délivrance. La caravane arrive à l’horaire prévu avec tambours et trompettes en grande pompe. Ou plutôt sono et klaxon… Ajoutez à cela les trompettes des supporters et c’est une véritable symphonie qui se joue pour le public. Pendant plus de 20 minutes, c’est l’équivalent d’une petite concession automobile qui défile sous les cris d’un public exalté. Chacun se lève et applaudit le cortège, tout en essayant de récupérer quelques goodies.

Vous non plus vous n'y aviez jamais assisté ? Alors regardez !

Krys, Vittel, Senseo ou même Le Journal de Mickey… Autant de marques qui ont envoyé des chars défiler. Sur le toit de ces véhicules, des jeunes femmes fermement harnachées envoient à tour de bras des casquettes ou des petits saucissons emballés. Chanceux, j’attrape quelques échantillons, dont un bob bleu que j’arborerai fièrement jusqu’à la fin de la course.

Un instant au coeur de la course

Le moment que tous attendent arrive quelques dizaines de minutes après la fin de la caravane. Aujourd'hui, c'est jour de chance. Dans une étape au relief accidenté, les cyclistes sont séparés en plusieurs groupes. Une grande satisfaction pour les spectateurs qui peuvent ainsi rentabiliser une journée d’attente.

Le signal d'alerte, c'est un bruit d'hélicoptère. Les connaisseurs ne s'y trompent pas. C'est celui de France Télévisions qui survole le peloton dans l'ascension. Arrivent alors les premiers échappés au détour d’un virage. Les encouragements et applaudissements fusent de toutes parts. A travers les ovations, les spectateurs espèrent bien redonner des forces aux coureurs à bout de souffle.

Puis d’autres sportifs suivent petit à petit. Parfois seuls, parfois en petits groupes, toujours au milieu d’un cortège de voitures estampillées de logos officiels. Un sourire éclaire parfois les visages des coureurs, vite repris par une expression de souffrance. "Aller Julian ! Aller Peter ! Aller Christophe !" lancent les supporters à un rythme effréné. Et puis soudain, tout s’arrête. Les klaxons et trompettes se taisent et les discussions reprennent, comme si de rien n’était.

Fin de course

En une petite dizaine de minutes, l’ensemble de la course est passée. Avec une rapidité surprenante, certains spectateurs replient leurs chaises, attrapent leurs glacières et s’en vont. On croirait assister à la fin d’un tournage par une équipe de télévision pressée par le temps. L’exaltation retombe progressivement. "Voilà, ça faisait six heures qu’on attendait", ironisent plusieurs jeunes.

Six heures d'attente sur la côte de la Croix de la Libération qui donnent l’impression d’appartenir à la grande histoire du Tour. L'histoire d'une course forgée par les légendes du cyclisme au fil des ans et par l'amour que lui porte le public. Sans que l'on sache vraiment s'il est venu retrouver les coureur... Ou se retrouver. Je comprends enfin pourquoi le Tour de France passionne tant les gens.

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