Jamilah Habsaoui, maire d'Avallon dans l'Yonne, est en détention provisoire depuis le 7 avril, mise en examen dans une affaire de trafic de drogue dans laquelle l'un de ses frères a reconnu être impliqué. Trois questions restent en suspens.
Cela fait trois semaines que Jamilah Habsaoui, maire d'Avallon, dort en prison. L'élue divers gauche a été placée en détention provisoire après 72 heures de garde à vue et son arrestation, au matin du dimanche 7 avril. Au domicile familal, les gendarmes ont saisi 70 kilos de cannabis, un kilo de cocaïne, des lingots d'or (sur les 20 lingots saisis, seuls deux se sont avérés en or après analyse) et 7 000 euros en liquide.
Dans ce dossier, cinq autres personnes sont mises en cause, dont les deux frères de Jamilah Habsaoui, Rachid et Benaïssa. Rachid a assumé la responsabilité du trafic, et dédouané sa soeur. Benaïssa, lui, a obtenu sa libération sous contrôle judiciaire le 25 avril. Libéré de la prison d'Orléans-Saran, il a en contrepartie l'interdiction de séjourner chez lui à Etaule, village proche d'Avallon.
Jamilah Habsaoui, elle, a déposé une demande de remise en liberté, qui a été rejetée le 23 avril. Elle reste donc pour l'heure en détention.
Pour combien de temps ?
C'est l'une des principales questions aujourd'hui : combien de temps peut encore durer la détention provisoire de Jamilah Habsaoui ? Le dossier est entre les mains du juge d'instruction. Selon l’Yonne Républicaine, une enquête de faisabilité pour une assignation à résidence sous surveillance électronique avait été ordonnée dès l’incarcération de la maire. Officiellement pour l'heure, rien ne filtre.
Mais selon les sources interrogées par France 3 ce 30 avril, les choses pourraient encore stagner pendant un certain temps. "C'est un dossier qui débute, il ne se passe "pas grand-chose" vu de l'extérieur, c'est normal", confie un avocat du dossier. Trois semaines de détention peuvent sembler longues, mais les investigations lors d'une enquête de cette ampleur peuvent durer plusieurs semaines. Voire plusieurs mois.
Nous avons tenté, ce 30 avril, d'obtenir des précisions auprès de l'avocat de Jamilah Habsaoui. En vain. Ce qui amène à un second questionnement.
Qui est l'avocat de Jamilah Habsaoui ?
Dès le début de l'enquête, c'est maître Antoine Audard, avocat d'Avallon, qui est choisi pour défendre Jamilah Habsaoui. Au départ, il donne d'ailleurs quelques brèves interviews dans la presse. Mais au fil des jours, il se fait moins disert... Jusqu'à ce 25 avril : un court paragraphe dans l'Yonne Républicaine nous apprend "qu'il n'assure plus la défense de la maire d'Avallon".
Problème : le principal intéressé ne confirme pas, et n'infirme pas, cette information ! Contacté ce 30 avril, Antoine Audard répond seulement : "Je n'ai pas de déclaration à faire à ce stade. Merci."
Interrogés à ce sujet, les avocats des frères Habsaoui nous répondent la même chose : "On ne sait pas qui défend Jamilah." Le parquet et la gendarmerie disent ne pas avoir l'information non plus. "Pour moi, maître Audard n'est plus son avocat, mais je ne peux pas vous le confirmer", indique un enquêteur. Nébuleux ? "Je vous le concède."
"Ça peut être logique que l'avocat de départ ait été écarté, après le rejet de la demande de remise en liberté la semaine dernière", avance un avocat de longue date du barreau d'Auxerre. Y a-t-il eu litige entre Jamilah Habsaoui et son conseil ? "Peut-être. Le plus probable, dans ce type de dossier, est qu'un avocat parisien, un pénaliste, soit choisi. En tout cas, cela devrait bouger et se clarifier dans les prochains jours."
Que disent les analyses sur les saisies ?
Une question cruciale demeure en suspens : les éléments, factuels, qui pourraient accabler ou disculper la maire d'Avallon. En particulier les traces ADN et les empreintes relevées sur les saisies. La drogue et l'argent étaient en effet cachés dans un coffre-fort, "très minutieusement empaquetés", dans une dépendance de la maison familiale, selon l'avocat de Rachid Habsaoui, maître César Lauwerie.
Si Rachid Habsaoui reconnaît les faits et affirme avoir servi de "nourrice" [une personne qui stocke la drogue, NDLR], il met la maire hors de cause : "Il indique que sa soeur n'était pas au courant que les stupéfiants étaient entreposés dans le domicile d'Avallon", précisait maître Lauwerie le 12 avril dernier.
L'absence de traces génétiques de Jamilah Habsaoui sur les saisies ne suffirait pas à la disculper, mais pourrait jouer en sa faveur. En revanche, si ses empreintes ou son ADN figurent sur les paquets, cela constituerait un lourd élément à charge contre la maire.
Quand connaîtra-t-on les résultats de ces analyses ? La gendarmerie se refuse à tout commentaire, le dossier étant en cours d'instruction. Le parquet d'Auxerre n'en dira pas davantage.