La France a interdit mi-mars les importations de cerises venant de pays qui utilisent du phosmet, un pesticide pour combattre les mouches qui gangrènent les cultures. Dans l'Yonne, les producteurs saluent une décision "équitable"... mais craignent toujours de ne plus pouvoir défendre leurs productions.
Elle ne dépasse pas les trois millimètres mais est l'ennemi numéro 1 des cerises. La "Drosophila suzukii", ou drosophile des cerisiers, cause des ravages dans les cultures de fruits, notamment dans l'Yonne. "Maintenant c'est tous les ans, on en voit de plus en plus", alerte Philippe Richard, producteur à Augy, non loin d'Auxerre.
Originaire d'Asie du sud-est, cet insecte ravageur est apparu dans l'hexagone il y a une dizaine d'années. Pour le combattre, les agriculteurs utilisaient auparavant un pesticide du nom de phosmet. Mais jugé dangereux pour la santé, l'Europe en a interdit l'usage début 2022. Désormais, c'est au tour des cerises provenant de pays qui utilisent ce pesticide d'être bannies en France, selon un arrêté du 16 mars publié au journal officiel début avril.
Les règles "sont équitables"...
Une décision plutôt bien accueillie par les agriculteurs que nous avons rencontrés. "C'est une bonne nouvelle parce que c'est une reconnaissance", juge Jean-Baptiste Thibaut, vice-président de la chambre d'agriculture de l'Yonne. "Produire des cerises, c'est un travail dur. Se dire qu'on va être concurrencé par des produits de l'étranger qui n'ont pas les mêmes conditions de production et la même qualité, forcément ça sape le moral des producteurs. Là, les règles sont équitables."
"Si on ne peut plus utiliser ce pesticide, c'est normal que ce soit pareil pour tous en France. C'est un juste milieu", abonde Philippe Richard.
... mais le problème des mouches persiste
Reste que cette interdiction, si elle règle la question de la concurrence, n'empêchera pas les mouches de ravager les cultures. "Avec le réchauffement climatique et les fortes chaleurs, ça ne va pas s'arrêter", déplore l'agriculteur. "Quand la mouche pond dans une cerise, ça donne un ver qui la rend impropre à la consommation. Sans produit, c'est difficile à traiter."
Il ne faut pas se voiler la face : ça devient de plus en plus compliqué de produire des cerises.
Jean-Baptiste Thibaut,vice-président de la chambre d'agriculture de l'Yonne
Conséquence, les consommateurs risquent de trouver moins de cerises sur les étals... et à des prix moins accessibles. "Ça va devenir moins facile de manger des cerises partout, tout le temps", avertit Jean-Baptiste Thibaut. "Il ne faut pas se voiler la face : ça devient de plus en plus compliqué d'en produire."
Pour rappel, l'Yonne compte environ 250 hectares de cerisiers, répartis entre une quarantaine de cultivateurs.