Les agriculteurs rentrent de la manifestation à Paris déçus et en colère

Des agriculteurs venus de Bourgogne et de toute la France ont manifesté à Paris jeudi 3 septembre 2015. Ils voulaient exprimer leur désarroi face à la chute de leurs revenus. Mais les aides annoncées par le gouvernement ne les ont pas convaincus.


Qu’a promis le gouvernement aux agriculteurs ?

Ils étaient montés avec plus de 1 500 tracteurs à Paris pour dénoncer les charges, les normes, les contrôles sociaux et environnementaux, la fiscalité… Ce sont autant de poids qui nous entravent face à la concurrence européenne, disent-ils.



Le Premier ministre Manuel Valls leur a promis une nouvelle série d'aides destinées aux agriculteurs en difficulté. Cela permettra dit-il de répondre aux besoins d'investissement de la filière. "C'est un message d'amour, c'est un message fort et sincère : vous avez le soutien de la Nation", a lancé le Premier ministre.

Le gouvernement a promis :
  • une rallonge de 85 millions d'euros par rapport au premier plan d'urgence dévoilé en juillet, sous forme d'effacements et d'allègements de cotisations et charges sociales.
  • une "pause" dans les normes, notamment environnementales, imposées aux agriculteurs
  • une "année blanche" en 2015 pour le remboursement des dettes bancaires des agriculteurs en difficulté qui en feront la demande.
  • Enfin, les aides versées par l'État, les Régions et l'Union européenne seront portées "à 350 millions d'euros par an pendant trois ans". En intégrant un effet de levier financier, cela doit permettre selon le gouvernement d'atteindre un milliard d'euros d'investissement par an, donc trois milliards en trois ans.

Pourquoi les agriculteurs sont-ils en colère ?

Mais, les annonces du Premier ministre n'ont pas calmé la colère paysanne. "On n'a rien obtenu, pas de prix, aucune garantie", estiment de nombreux agriculteurs.

Conséquence : quand le patron de la FNSEA, Xavier Beulin, a pris la parole en milieu d'après-midi depuis le podium dressé place de la Nation, les cornes de brume ont retenti pour couvrir sa voix, les pétards et les noms d'oiseaux aussi : "Vendu, Fumier, ouuhhhhh".

Les aînés ont tenté de calmer les plus jeunes : "Qu'est-ce que vous allez voir ce soir au 20H : que la FNSEA est divisée ?" tente un homme. Mais, les médiateurs se sont fait siffler.

"On sait que les mesures annoncées ne sont pas satisfaisantes et les mecs désespérés", soupire Guillaume Gauthier, représentant des JA de Saône-et-Loire.
"Mais il y a du mieux. Ils voulaient des garanties sur les prix? Sauf qu'on est dans un marché européen, et même mondial", raisonne-t-il. "Il faut rentrer et examiner calmement ce qui a été dit."

"Même si on fait ce métier par passion, on a besoin d'un revenu", plaide Jean-Philippe Nivost, éleveur près du Creusot, qui redoutait jeudi matin l'annonce d'un pansement de plus sur une jambe de plus en plus en bois".
A Civry, dans l'Yonne, dans le hameau de Massangis, Marie-Cécile Trespallé (éleveuse) s'apprête à reprendre l'exploitation de ses parents. Elle connaît leurs énormes difficultés, mais elle ne se décourage pas même si elle et s'attend à devoir vivre la même situation.

De son côté, Laurent Tavoillot, céréalier, dit lui aussi qu'il y a urgence. De très nombreux agriculteurs ne pourront plus continuer si rien ne change. Beaucoup vont se trouver contraints de cesser leurs activités d'ici la fin de l'année pour cause d'insolubles difficultés financières. Il pense que le plan d'aides aux agriculteurs annoncé par le gouvernement n'y changera rien. 

Reportage: Stéphane Robert et Jean-François Guilmard
avec : Marie-Cécile Trespallé (éleveuse) - Jean-Yves Caullet (Député-Maire d'Avallon-PS) - Laurent Tavoillot (céréalier)




Comment s’est terminée la manifestation ?

Stoïque, Xavier Beulin a laissé passer les insultes : "Je suis un salaud pour les industriels parce que j'exige trop, un salaud pour les éleveurs qui trouvent que ce n'est pas assez." "Il y avait des attentes sur les prix parce que certains sont dans des situations dramatiques",  reconnaît-il. "Mais je suis pragmatique : ça fait deux mois qu'on se bat. Là, le Premier ministre s'est engagé personnellement", en matière de trésorerie notamment et sur une "pause" concernant les normes et règlements jusqu'en février.  

A noter qu'u
n conseil européen extraordinaire des ministres de l'Agriculture aura lieu lundi 7 septembre. La FNSEA a déjà prévu une autre mobilisation ce jour-là à Bruxelles.


En fin d’après-midi, à partir de 17h30, les agriculteurs, parfois en larmes, ont progressivement commencé à lever le camp dans un grand concert de klaxons.
Certains sont repartis avec les drapeaux de la FNSEA en berne sur leurs tracteurs, symbole de leur désaccord avec les dirigeants du syndicat.
La préfecture de police de Paris a recensé 1 580 tracteurs, 4 500 manifestants et 91 cars sur le cours de Vincennes. Selon la FNSEA, près de 1 800 tracteurs ont participé au mouvement.

Alors que des embouteillages monstres étaient redoutés, les automobilistes semblaient avoir anticipé en prenant les transports en commun. Le trafic est resté assez fluide, voire meilleur que d'habitude.
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