D'un titre de championne de France 2022 à une seconde place sur le podium 2023, la vie de la Costarmoricaine Audray Cordon-Ragot n'aura pas été simple. Un AVC, les fiascos des équipes B&B Hôtel puis de Zaaf... les risques de sortie de route n'auront pas manqué pour la Bretonne. Mais la championne reste en course, et vise avant tout une victoire sur le Ladies Tour, le Tour de France féminin.
"La vie est enfin redevenue normale", avait soufflé la coureuse de 33 ans ce mardi en visioconférence de presse avant de remettre ses deux titres en jeu. Celui de la course en ligne samedi sur le "circuit très difficile" dans le Nord (99,8 km au total) et celui du contre-la-montre que Cédrine Kerbaol lui a ravi ce jeudi pour 18 secondes.
De ces douze mois reste le souvenir "très spécial" du Tour de France féminin, le premier depuis 35 ans, vécu dans le tricot tricolore de championne de France.
"J'ai entendu des +Allez Audrey+ tout le long du parcours du Tour pendant sept jours, "On vous reconnaît", se rappelle "ACR". "Je n'avais jamais vécu ça." Les mois suivants non plus, quand la poisse lui a collé à la roue.
Il y a d'abord eu l'accident vasculaire cérébral tombé sur elle en septembre. Manifesté par des symptômes comme des "vomissements", le "souci cardiaque" n'a été identifié qu'avec une IRM passée avec l'insistance de la Fédération française avant les Mondiaux en Australie.
"J'ai eu beaucoup de chance"
"Sans anticoagulant, j'aurais sans doute refait un AVC", livrait-elle à L'Equipe à l'automne. J'aurais pris l'avion (...) et j'en serais sortie handicapée, ou je n'en serais jamais sortie du tout. J'ai vraiment eu beaucoup de chance".
Son opération, le 20 octobre, pour "boucher un petit trou dans (s)on coeur" n'a pas signé la fin de ses malheurs. Sur le départ de Trek où elle endossait un rôle d'équipière pour rejoindre B&B Hotel où l'attendait celui de leader, la double championne de France sur route (2020 et 2022) s'est prise de plein fouet le crash de la formation bretonne en décembre.
Le partenaire qu'attendait son patron Jérôme Pineau ne s'étant jamais matérialisé, l'équipe masculine a disparu, son pendant féminin n'a jamais vu le jour. Une "prise en otage" a-t-elle dénoncé alors au Télégramme : "Pendant deux mois, on s'est fait balader".
D'autant que son mari, Vincent Ragot, était alors mécanicien de l'équipe B&B Hotel. "Ça a été assez dur à vivre, surtout avec la période où c'est arrivé", témoigne-t-il. On était à deux dans le même bateau, tous les deux sans emploi".
"Le grand n'importe quoi" de Zaaf
Sans équipe à l'aube de la nouvelle saison, la sextuple championne de France de contre-la-montre rejoint la formation espagnole Zaaf. "Du grand n'importe quoi", peste encore Vincent Ragot.
D'abord Audrey Cordon-Ragot effectue sa préparation "à ses frais", ensuite elle n'est plus payée, ce qui la pousse à rompre son contrat fin mars avec l'équipe, depuis disparue.
Avec Human Powered Health, la baroudeuse a retrouvé une formation World Team, le meilleur niveau mondial. Quant à Vincent Ragot, il a obtenu un contrat de deux ans en tant que mécanicien chez Trek, faisant le chemin inverse de sa compagne.
"Ce qui s'est passé m'a renforcée sur plein de points mais aussi fragilisée sur d'autres", souligne la native de Pontivy. Il y a des blessures que j'ai tenté de guérir mais qui sont encore vives".
"Elle a eu un contrecoup, les nerfs ont lâché à un moment", décrit son mari. "Début mai au Tour de Bretagne où sa nouvelle équipe l'attendait".
Elle semble de retour avec sa deuxième place du chrono national jeudi sur un parcours plutôt typé pour une grimpeuse. Comme celui de la course en ligne samedi où Juliette Labous et Evita Muzic font figures de favorites.
"Sur le papier les Championnats de France ne sont pas mon objectif numéro un", explique "ACR" Il s'agit plutôt du bloc du mois de juillet avec le Giro puis le Tour de France où j'envisage des victoires d'étape".
"Il me fallait faire un choix", ajoute-t-elle. "Je ne suis jamais arrivé en électron libre dans ces courses à étapes comme cette année".