Pêcheurs à Erquy. Entre passion, inquiétude et espoir

A l'Est de la baie de Saint-Brieuc, la ville d'Erquy vit au rythme de son port de pêche, le quatrième de France. Sur les quais, rencontre avec des pêcheurs partagés entre leurs rêves et les obstacles auxquels ils sont confrontés.

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Grand bleu et grand calme sur le port d’Erquy. L’essentiel de la centaine de navire du quatrième port de pêche français sont en mer, sillonnant la Manche pour traquer poissons, coquillages et crustacés débarqués à la criée du matin.  
A l’Est de la Baie de Saint-Brieuc, Erquy est aussi considérée comme la capitale de la coquille Saint-Jacques. Autant que le temps n’est pas tant que ça au beau fixe pour les professionnels du coin.

Parmi eux, Mickaël Lepretre, patron-pêcheur de 42 ans. Né à Erquy, il est naturellement tombé dans ce monde quand il était petit. "Mon  père était pêcheur, j’ai tout de suite aimé ca.  A 17 ans, je suis sorti du lycée maritime de Paimpol. Après j’ai été matelot. Ca fait maintenant 17 ans que je suis à mon compte".

Mickaël a un armement de trois bateaux, qui font la coquille Saint-Jacques, les amandes, les bulots, etc… Le patron-pêcheur a aujourd’hui six matelots qui embarquent avec lui.

Vent debout contre le parc éolien en mer

Comme la plupart de ses collègues, il est fortement remonté contre le projet d’éoliennes en baie de Saint-Brieuc. Il a même écopé d’une amende de 2000 euros pour avoir manifesté contre ce projet, en juin 2021. "Quand on manifeste dans la rue, on ne prend pas d’amende ! ", se lamente-t-il.

Face au projet de parc éolien en mer, je pense qu’on  est mal parti. Depuis le retour du bateau Aeolus qui fait les travaux du futur parc on est mal barré surtout avec le contexte actuel favorable aux énergies renouvelables ! Pour la ressource, ça fait peur. Il n’y a eu aucune étude en lien avec les travaux de forage et il n’y a pas de recul 

Mickaël Lepretre, patron-pêcheur à Erquy

En revanche, pour la coquille, il trouve que les prix sont justes. A la criée, Mickaël vend au prix de retrait. "Ca reste rentable mais il y a un manque à gagner quand même du fait de la baisse des quotas".

Le quota de pêche à la coquille Saint-Jacques, dont la saison s'étale d'octobre à avril,  a baissé de 200 kilos par jour depuis fin janvier. Depuis, ils ont droit à une tonne par jour. Mickaël vend la coquille en direct à un mareyeur de Lorient. Pour le reste, il vend à la criée d’Erquy.

Les yeux rivés sur les comptes

Ses deux premiers bateaux datent de 2005 et 2007.  "Ils ont a peu près 50 ans, ca fait vieux pour des bateaux. Ils sont en bois, donc il y a un coût car il faut entretenir la coque en bois".
Mickaël a quand même pu investir dans un nouveau bateau, en 2019 : le Kadarn, un coquillier. Un gros investissement de 750 000 euros. "Là-dessus, nous n'avons pas d'aide, donc il y a des prêts à rembourser sur plusieurs années".

L'angoisse de la hausse du gazole

En parlant de gros sous, la hausse du prix du carburant a bien sûr fait la une des médias autant qu'il a rendu fou de colère et d'inquiétude bon nombre de pêcheurs en Bretagne. A Erquy, les pêcheurs pourraient aussi se faire entendre après la saison de la coquille, si les prix du carburant n'ont pas baissé de façon conséquente.


"On a du gazole bleu détaxé, précise Steeve André. Pour le moment on arrive à s’arranger avec la coopérative qui achète à l’avance le carburant et lisse un peu les prix mais on n’est pas tranquille. Avec tout ce qui se passe et alors que je commence mon activité en tant que patron avec un bateau neuf, c’est pas le mieux ! Il faut savoir que pour un bateau comme le mien, on consomme entre 900 et 1000 litres pour 24 heures !"

Mais l'homme de 48 ans préfère parler de la pêche comme d'une passion. Il a commencé comme mousse à 13 ans, et a travaillé à Erquy et Saint-Malo.

J’ai eu une enfance un peu compliquée, la mer m’a sauvé.

Steeve André, patron-pêcheur à Erquy

"J’ai eu la chance de rencontrer André Rodde, un armateur d’Erquy qui est devenu mon père spirituel et mon patron, je suis presque de la famille. J’ai travaillé pour lui sur deux de ses bateaux, le Sirocco 9 et le Louise Elisa."

Les deux hommes travaillent ensemble depuis 24 ans. Aujourd’hui, Steeve est  à son compte. Avec le même André Rodde, il est en train de créer une société en commun qui va lui permettre d’acheter à terme Le Grand Bleu dont il a actuellement 49 % des parts.

"Le Grand bleu c’est mon rêve, c’est le dernier nouveau bateau mis à l’eau à Erquy en décembre 2021, s'enthousiasme-t-il. Un chalutier en polyester de 12,94 mètres de long et 5,90 mètres de large. Je pêche avec lui la coquille, et des poissons, raies, soles, barbues, seiches, encornets, etc, selon les saisons".


Avec ses trois marins, Steeve travaille sur plusieurs zones, en baie de St Brieuc, Baie de Grandville, Nord Ouistreham, port-en-Bessin, le Havre.

Un port pas très bien adapté, selon les pêcheurs

Portés par leur passion, les pêcheurs ont toujours et luttent encore pour préserver leur métier, leur activité. 
Finalement, au-delà du parc éolien en baie de Saint-Brieuc, au-delà du prix du gazole, c'est le sous-équipement du port, notamment depuis le réaménagement en 2008, qui les agace presque plus. 

C’est le quatrième port de France mais il n’y a qu’une grue pour faire la débarque, donc en fonction des marées, on doit livrer à la cale voire utiliser des plates. C’est dangereux pour nos matelots!

Mickaël Lepretre, pêcheur


Les professionnels du secteur réclament un ponton le long du quai, plus sécurisé pour les marins, "qui risquent de tomber des échelles, comme c'est déjà arrivé, pour qu’ils descendent sur les bateaux", regrette Mickaël Lepretre.

Une ville fière de ses pêcheurs

Nous sommes allés à la rencontre de quelques Réginéens, tel que l'on nomme les habitants d'Erquy. Tous ont un contact, une relation plus-ou-moins directe avec le milieu de la pêche. 

La pêche, incontournable et essentielle à Erquy. ©T. Peigné - FTV

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