Documentaire. Avec Colères d'affiches, un portrait d'Alain Le Quernec haut en couleur

L'homme est discret. C'est un solitaire qui a pourtant marqué de sa patte les luttes sociales des 50 dernières années. Pierre-François Lebrun a délicatement tourné sa caméra sur Alain Le Quernec, dans un documentaire haut en couleur. A voir ce lundi 16 novembre après le Soir 3.

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C'est l'un des plus grands affichistes français. Et pourtant, le grand public ne connaît guère le quimpérois Alain Le Quernec, même si l'est une figure des arts graphiques. Ses affiches, comme Bécassine levant le poing, sont aujourd'hui dans les manuels d'histoire. 

Car elles ont accompagné les combats politiques et la vie culturelle de ces 50 dernières années, en Bretagne et bien au-delà.

A travers des histoires d'affiches, et une tangible proximité, le documentaire "Colères d'affiches" dresse le portrait d'un créateur libre et provocateur. Trois questions à son réalisateur, Pierre-François Lebrun.
 

Ci-dessous, le replay de votre film "Colère d'affiches", réalisé par Pierre-François Lebrun



Dans ce portrait, il est beaucoup question d'histoire des luttes. Est-ce qu'Alain Le Quernec pense avoir eu une quelconque influence sur celles-ci ?

Pierre-François Lebrun : "Je ne pense pas qu'Alain Le Quernec ait le sentiment d'avoir influé sur les événements et les luttes qu'il a accompagné par ses affiches. Il reste très modeste sur le pouvoir de l'affiche. 

Mais on constate que certaines de ses images, comme Bécassine levant le poing ou les bigoudènes au drapeau rouge, sont aujourd'hui régulièrement utilisées dans les livres sur l'histoire de la Bretagne. Alors on peut se dire qu'elles ont eu un rôle important pour illustrer le réveil culturel et politique de la région dans les années 70-80.


Aujourd'hui, on a tendance à oublier l'importance de l'affiche dans les années 70-80. À l'époque, on affichait partout. Il y avait des bagarres de colleurs d'affiches. Les affiches d'Alain avaient une présence très forte dans le paysage breton."


Comment Alain Le Quernec a-t-il fait pour produire autant, être reconnu dans le milieu de l'art, tout en restant dans l'ombre ?

Pierre-François Lebrun : "C'est le paradoxe du personnage, mais aussi de beaucoup de créateurs. Je ne dis pas "artiste" parce qu'il n'aimerait pas. Alain est plutôt quelqu'un d'assez solitaire. Par nature, il n'aime pas trop les événements collectifs, les foules et les manifs. En même temps, il n'est pas du tout misanthrope. 

Il a une sensibilité extrême, une attention au monde, un vrai regard sur la société. Tout cela lui permet de trouver la manière la plus juste pour mettre en image un combat, une idée, un message. 

Il y a aussi le fait qu'en France, le graphisme n'est pas une discipline très populaire, contrairement à des pays comme la Suisse ou la Hollande. On s'intéresse peu aux créateurs d'images alors que l'image est omniprésente dans notre environnement. 

Les arts plastiques sont peu valorisés dans le cursus scolaire. Ce film est aussi là pour faire la lumière sur ces pratiques.
"


En tant que réalisateur, vous avez réalisé une douzaine de documentaires autour de l'histoire. Aimez-vous la raconter par le petit bout de la lorgnette, comme avec Colères d'affiches ?

Pierre-François Lebrun: "Raconter le parcours d'Alain Le Quernec, c'est inévitablement raconter l'histoire des cinquante dernières années. Cela m'intéressait de faire un film qui ne soit ni un documentaire historique, ni un film d'art, ni une biographie, ou plutôt, qu'il soit les trois à la fois et cherche à montrer comment création et Histoire se nourrissent mutuellement dans les affiches d'Alain Le Quernec. 

Le film est un perpétuel va-et-vient entre la parcours personnel du créateur et l'histoire collective d'une région, d'un pays, du monde.

Revenir sur le parcours d'Alain Le Quernec, c'était aussi s'interroger sur le destin des idéaux défendus et des combats menés. 

Des utopies des années 70 à la disparition actuelle d'une bonne partie des engagements traditionnels de la gauche. De la liberté d'expression politique et artistique à la terreur fanatique. Les murs désormais vides et muets sur lesquels seul ose aujourd'hui s'afficher le Front national, me laissent un goût amer. 

En retrouvant les commanditaires de ses images, en racontant les circonstances de leurs créations, je voulais aussi avec ce film dessiner en filigrane le portrait d'une génération.
"

 
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