Dans son "monde enchanté" qu'il a crée depuis plus de 25 ans au milieu des marais de Brière, Eric Guérin aime se présenter comme le meneur d'une équipe de "petits piafs". Chef atypique, il a développé une méthode de fonctionnement basé sur l'épanouissement de toute sa brigade. Rencontre.
Quand il parle de sa cuisine mais surtout de ce qu'il a créé et généré dans son restaurant étoilé, Eric Guérin est débordant d'enthousiasme. A l'occasion de la diffusion d'une émission Littoral inédite qui lui est entièrement consacrée, voici cinq questions-réponses pour mieux le découvrir.
Comment l’envie d’être cuisinier est-elle née ?
Enfant, j’ai su très tôt que je voulais faire un métier artistique. Mes parents ont essayé de m’en dissuader. Finalement, je me suis tourné vers la cuisine avec l’idée de créer une « maison d’accueil » dans laquelle je pourrais exprimer ces besoins et ces envies artistiques. C’est cette dimension qui me plait. C’est très complet finalement. Ma maison d’accueil va du jardin, à l’aménagement des espaces intérieur, la création de plats, des assiettes…et bien sûr tout ce qui va se passer dans le lieu avec les rencontres, ce que l’on partage avec les gens. A travers toutes ces petites choses, je trouve l’essence de ma créativité.
Comment pourriez-vous définir votre cuisine ?
Ma cuisine raconte ma vie, mes émotions, elle exprime des contrastes. Elle est à l’image des cultures que j’ai pu rencontrer. Elle me ressemble. J’essaye de ne pas me laisser embarquer dans des phénomènes de mode même si je suis beaucoup dans l’image. Je veux qu’elle soit fidèle au territoire où je vis, qu’elle raconte cette région que j’aime, la Brière.
Pourquoi vous êtes-vous installé en Brière ?
J’ai tout quitté à l’âge de 25 ans pour m’installer ici, au milieu des marais, sur cette ile [l’ile de Frétin sur la commune de Saint Joachim, NDLR]. Je voulais être au plus près des oiseaux. Ici, on vit au rythme des saisons et des migrations. J’avais envie d’avoir mon restaurant dans ce monde enchanté…Le nom de "La Mare aux oiseaux" vient de là.
Très tôt, j’ai travaillé avec des producteurs locaux. Depuis le confinement, on s’est encore plus enraciné et on a renforcé ce mode de fonctionnement en passant de 12 à 40 producteurs installés dans la région. Tout cela répond complétement au sens de ma cuisine.
Pour vous, quelle différence existe t’il entre la cuisine gastronomique et une cuisine plus traditionnelle ?
Ce qui fait la différence, c’est le nombre de personnes et l’attention qui est portée à la fabrication de chaque assiette. Il faut voir toute une équipe se mettre en action en cuisine. Il y a des personnes spécialistes pour les sauces, les entrées, les légumes, les viandes, les poissons, les amuses-bouches… Chaque détail est important, un peu comme avec la haute-couture. Et puis il y a ensuite l’histoire que l’on va raconter en salle pour présenter l’assiette. A chaque étape, on prend le temps qu’il faut, c’est ça qui est extraordinaire. Avec la gastronomie, on cherche l’harmonie parfaite et on se donne les moyens de nourrir le corps et l’esprit.
Il n’est pas toujours facile d’être « chef étoilé », cela suppose beaucode pression. Votre objectif est aujourd’hui de gravir encore un échelon en essayant de décrocher une étoile supplémentaire ?
On y travaille oui. Après on n’a pas forcément tous les codes…on verra bien. Pour moi, la plus grande réussite de "La Mare aux oiseaux" c’est de voir mon équipe s’épanouir. L’essentiel est là. Dans un collectif, il faut que chacun puisse exprimer ce qu’il est. Que le travail ne soit pas pénible. Je ne suis pas un requin. Ici, on n’est pas dans un schéma avec un patron, des employés qui s’opposent. Je me suis construit une famille de cœur. On est tous concerné par ce petit groupe qui vit au milieu de la Brière mais aussi des gens, des artisans, des paysans qui sont à nos côtés. C’est pour cela que l’aventure a du sens.
Littoral, Eric Guérin, voyage sensoriel en Brière, c'est dimanche 18 septembre à 12h55 sur France 3 Bretagne.