Elles veulent pouvoir sortir le soir sans subir des agressions verbales ou être suivies dans les rues de Brest. Partant de ce constat, quatre étudiantes de l'UBO viennent de créer l'association Ty Safe. Elles planchent sur un projet d'application de co-piétonnage, "destinée aux filles comme aux garçons".
"On ne veut plus subir". La phrase claque en plein centre-ville de Brest. Naomie pointe les agressions et le harcèlement de rue dont elle et d'autres filles et garçons sont victimes "en journée comme en soirée". "Ça arrive très souvent, trop souvent" dit l'étudiante en master Management de projets internationaux (MPI) à l'Université de Bretagne occidentale.
Insultée en pleine rue
Naomie raconte son premier jour dans la cité du Ponant. Elle part faire quelques courses. Au retour, un homme la suit. "Il m'a insultée, se souvient-elle, comme ça, sans raison. J'étais avec ma mère au téléphone au même moment. Je me suis retournée vers cet homme pour lui dire que ma mère l'entendait. Il est parti en courant".
Quelques jours plus tard, nouvelle agression. "Je suis rentrée chez moi effondrée". Son esprit tourne en boucle, comme le sentiment d'insécurité qui l'accompagne désormais à chaque fois qu'elle pose un pied dehors. "Je ne pensais pas que Brest serait comme cela, affirme l'étudiante originaire de La Rochelle. C'est une chouette ville mais il y a ce contexte qui ne me plaît pas du tout".
Etre sur ses gardes constamment, c'est épuisant
Naomie, étudiante à Brest et co-fondatrice de Ty Safe
Naomie en parle autour d'elle. Constate qu'elle n'est pas la seule à faire des mauvaises rencontres au retour de soirées. Elle finit par proposer à trois autres étudiantes en master MPI de travailler sur un projet d'application "pour rentrer la nuit sans flipper".
L'idée accroche Lisa, Anaïs et Emma. "Etre sur ses gardes constamment, c'est épuisant, souligne Naomie. Je ne trouve pas cela normal de devoir toujours être accompagnée quand je sors le soir ou de me demander si la personne qui arrive en face de moi sur un trottoir va m'agresser".
"Suivie par deux mecs place de la Liberté"
Les quatre jeunes femmes créent tout d'abord une association qu'elles baptisent Ty Safe. Elles distribuent un questionnaire à l'université pour mesurer le ressenti des étudiants en matière de harcèlement de rue.
En 48 heures à peine, elles reçoivent des centaines de témoignages comme celui de cette femme qui raconte avoir été "suivie par deux mecs sur la place de la Liberté. J'ai accéléré, relate-t-elle, mais ils ont continué à me suivre en me traitant de pute parce que je ne me retournais pas".
Ou encore celui de ce jeune homme : "Quelqu'un m'a adressé plusieurs fois des remarques, 't'es mignon' etc. Il a cherché à me suivre deux fois. La deuxième fois, j'ai été au commissariat. On ne m'a pas pris au sérieux".
Ces récits, Ty Safe les poste sur sa page Facebook, "pour alerter et lutter contre ce harcèlement de rue devenu chronique à Brest" note Emma.
Ty Safe, une appli de co-piétonnage
L'appli Ty Safe est en cours d'élaboration. L'idée est simple : proposer du "co-piétonnage" et pas seulement aux femmes. "Nous, nous voulons que cette appli soit utile aux garçons, précise Emma. Car, à Brest, les garçons se font aussi harceler, insulter, agresser".
Via une messagerie instantanée doublée d'une carte interactive, chacun pourra se greffer sur le trajet d'autres utilisateurs. Et pour que cet outil ne devienne pas un moyen pour les agresseurs de cibler leurs victimes, une sécurisation sera mise en place. "On y travaille" disent les quatre étudiantes de l'UBO qui cherchent aujourd'hui un développeur.
Elles vont lancer un appel auprès des écoles d'ingénieurs brestoises et la faculté des Sciences pour que leur appli voit le jour d'ici un an.