Pollution. A Landunvez, cette association alerte sur "la mauvaise qualité" des eaux de baignade

Elle a beau avoir des airs de lagon breton, la plage de Penfoul à Landunvez, dans le Finistère, présente régulièrement des taux de pollution bactérienne bien plus élevés que ceux de l'agence régionale de santé. C'est ce que vient à nouveau de démontrer la fondation Surfrider dans un récent rapport. Elle appelle les instances sanitaires à améliorer leurs méthodes de prélèvement et à prendre des mesures pour lutter contre cette pollution.

Tout l'été, les eaux cristallines de la plage de Penfoul au nord-ouest du Finistère ont fait le bonheur des surfers, des familles et des touristes. 

Au large, ses rouleaux en font un spot idéal pour les amateurs de glisse. À marée haute, la topographie des lieux permet aux bambins de se baigner dans quelques centimètres d'une eau souvent plus chaude qu'ailleurs et sans craindre les vagues.

"Une eau claire comme ça, on a envie de plonger dedans", s'exclame Maryse, une touriste morbihannaise qui sillonne le GR34 avec deux amis.

Ce petit coin de paradis, certains se contentent pourtant de le regarder de loin. "J'adore cette plage de Penfoul, mais je me baigne sur une autre plage" assure Dominique qui n'habite pourtant qu'à une centaine de mètres de là. Il y a plein de rumeurs, donc je fais attention."

Une mauvaise qualité des eaux pour au moins 4 jours cet été

Car ces eaux ne sont pas si propres qu'elles en ont l'air. C'est ce que vient de démontrer l'association Surfrider dans un récent rapport.

Cet été, à au moins quatre reprises (le 5 juillet, le 27 juillet, le 31 juillet et le 3 août), les prélèvements qu'elle a réalisés présentent des taux de bactéries supérieurs aux seuils fixés par l'Anses. La qualité des eaux de baignade aurait donc dû être considérée comme mauvaise et la plage fermée.

Cet été les eaux de baignade étaient plutôt de mauvaises qualité à chaque fois que nous avons réalisé nos prélèvements

Morgan Chartier

Bénévole de la Fondation Surfrider

Pourtant, sur ces quatre jours de mauvais résultats, la baignade n'a été interdite qu'une seule fois (le 3 août).

Des résultats bien plus alarmants que ceux présentés par l'agence régionale de santé. Le 27 juillet dernier, elle aussi réalise des prélèvements. Elle enregistre des concentrations d'entérocoques et d'Echerichia coli quatre à huit fois moins importantes que celles enregistrées par l'association le même jour. Des résultats qui conduisent à classer les eaux de baignade en qualité moyenne au lieu de mauvaise. 

Morgan Chartier habite à quelques mètres de cette plage. C'est lui qui a prélevé et fait analyser des échantillons d'eau pour la fondation Surfrider cet été. Selon lui, ces différences sont liées aux méthodes de prélèvements choisies :

"L'ARS ne prélève qu'à marée haute ou 2h avant ou 2h après la marée haute. Nous, on va prélever parfois à marée haute, mais aussi à marée basse directement dans le ruisseau, dans la zone de dilution ou dans la zone de surf. Ce qui fait que la dilution est différente."

Les prélèvements de la fondation Surfrider ont souvent été réalisés au lendemain de fortes pluies. Des moments où le risque de pollution est plus fort et pendant lesquels l'agence régionale de santé déconseille la baignade. Mais l'association assure coller au mieux aux habitudes des baigneurs et des surfeurs.

On a cherché à être représentatif d'un individu lambda qui viendrait se baigner à marée haute ou basse, par jour de beau temps, par jour où il a plu la veille ou le matin et qu'il fait beau l'après-midi

Morgan Chartier

Membre de la fondation Surfrider

"Dans une journée de beau temps, à marée basse, vous pouvez avoir des enfants qui se baignent directement dans le ruisseau au fond de la plage, pas vers la mer, parce que l'eau est plus chaude, mais c'est là où la concentration de polluants est maximum, donc il y a vraiment un risque pour eux."

Contacté, Christophe Colin, le maire de Landunvez, assure développer lui aussi des prélèvements complémentaires à ceux demandés par l'agence régionale de santé sur différentes zones de la plage. Coût de l'opération pour la mairie : au moins 30.000 euros chaque année depuis deux ans.

Des mesures de marqueurs sont aussi réalisées pour déterminer si ces bactéries sont d'origine humaine ou animale et trouver des solutions pour limiter la pollution.

Pour les associations locales de défense de l'environnement, il n'y a pas un doute : les coupables, ce sont les grandes exploitations porcines avoisinantes, situées sur le bassin versant du Foul.

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Un riverain lanceur d'alerte

Si Morgan a réalisé ces prélèvements, c'est parce que d'autres avaient déjà sonné l'alerte avant lui :

Fabrice Hamon habite lui aussi Landunvez. Son jardin est traversé par le Foul, le ruisseau qui débouche sur la plage de Penfoul. En juin 2022, il fait analyser les prélèvements réalisés dans le ruisseau. Résultat : la présence de bactéries dépassait de 32 fois le seuil au-delà duquel la baignade est interdite.

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"On voyait qu'il y avait une pollution récurrente dans le ruisseau, mais on ne savait pas ce qui se passait au milieu de la plage, poursuit Morgan Chartier. On se doutait qu'il y avait une pollution. Les résultats de l'ARS nous paraissaient peu cohérents quand on voit le flux bactérien dans le ruisseau."

Car si l'on en croit le panneau d'information à l'entrée de la plage, les eaux de baignade sont de bonne qualité sur la plage de Penfoul cet été, sauf sur deux jours, les 20 et 27 juillet où l'eau est de "qualité moyenne".

Ce n'est pas la première fois que les méthodes de classement des eaux de baignade de l'agence régionale de santé de Bretagne sont remises en cause par des associations. En juin dernier, elle a été condamnée par le tribunal administratif de Rennes à corriger son classement.

LIRE : Eaux de baignade. L'Agence Régionale de Santé condamnée par la justice à revoir son classement

L'ARS aurait faussé le classement des eaux de baignade pour les plages les plus polluées de Bretagne. 10% des plages sont concernées. Notamment en ne prenant pas en compte tous les prélèvements permettant de classer les eaux de baignades.

Le juge précise que "le directeur général de l’ARS de Bretagne a implicitement refusé de procéder à la correction des données de classement des eaux de baignade de Bretagne depuis 2016, pour y intégrer certains prélèvements correspondant à de simples épisodes pluvieux et en exclure les échantillons de recontrôle pris en compte."

À Landunvez, l'association Surfrider appelle désormais à diversifier les sites de prélèvements, mieux informer les baigneurs et surtout à trouver des solutions pour limiter les risques de pollutions.

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