Santé. "Où on ira si on est malade la nuit ?" : à Carhaix, les urgences restent fermées entre 18h30 et 8h30

À Carhaix, les urgences resteront finalement régulées la nuit entre 18h30 et 8h30, suite à une décision de la direction de l'hôpital. Syndicats, élus et usagers sont en colère. Un préavis de grève et une manifestation sont prévus lundi 4 septembre.

À Carhaix, les habitants sont plongés en plein désarroi. Initialement annoncée au 1er septembre, la réouverture des urgences 24 heures sur 24 a finalement été repoussée à une date encore inconnue. Les urgences restent donc fermées le soir et la nuit, contrairement aux engagements de l'Agence régionale de santé.

Des urgences toujours régulées à partir du 4 septembre

Après la maternité, c'est un nouveau service qui est en péril selon les syndicats."Les organisations syndicales se sont réunies la semaine dernière et ont été reçues par l’ARS qui a annoncé la réouverture 7 jours sur 7, 24 heures sur 24. Il y a un décalage entre ce qu’annonce l’ARS et ce qu’applique la direction", déplore Sophie Levenez, membre de l'intersyndicale de l'hôpital de Carhaix.

C’est insupportable, intolérable, on trouve ça très injuste.

Sophie Levenez

Membre de l'intersyndicale de l'hôpital de Carhaix.

"En tant qu’hôpital public, nous devons soigner tous les patients, et en raison de notre éloignement, nous sommes au moins à 45 minutes d’un autre hôpital", ajoute-t-elle. Entre 18h30 et 8h30, les patients doivent en effet appeler le 15 pour être redirigés vers un autre service d'urgences. Il faut compter au moins 45 minutes en voiture, vers les centres hospitaliers de Brest, Guingamp ou Morlaix.

Annie Le Guen, membre du Comité de défense de l'hôpital, se souvient du cas d'une dame de 82 ans. "Habitante de Pléven, elle a appelé le 15, mais Morlaix et Guingamp étant débordés, elle s’est retrouvée à aller à Pontivy, en voiture, avec une embolie pulmonaire !" Selon Annie Le Guen, dans ce genre de situations, "il vaut mieux avoir un problème de santé entre 8h30 et 18h30."

Marie-Viviane Scieller, une habitante de Cléden-Poher, a vécu une situation similaire cet été. Après une glissade et un poignet cassé, elle vient consulter le médecin de garde de Carhaix qui la redirige vers Quimper. "Je ne pouvais pas conduire, j'ai dû appeler ma fille, qui habite à Quimper, pour qu'elle m'y amène", se désole-t-elle. "Avoir un bel hôpital à Carhaix, et ne pas pouvoir le garder, c’est triste."

Où on ira si on est malade la nuit ?

Marie-Viviane Scieller

Habitante de Cléden-Poher (29)

La direction de l'hôpital Brest-Carhaix se défend en rappelant les problèmes de recrutement. Selon la directrice du site, Julie Chollet, "des prolongations d'arrêts-maladie et des manques, qu'on ne connaissait pas à la mi-août, nous ont empêchés de rouvrir les urgences 24 heures sur 24."

Le docteur Quérellou, responsable du département de médecine d'urgence du CHRU de Brest, ajoute que "l'an dernier, certains médecins ont travaillé 380 heures dans le mois. Ça ne peut pas durer longtemps parce que les collègues s’épuisent. Aujourd’hui, il y a toujours des heures supplémentaires, moindres et acceptées par les collègues, mais le déficit de personnel est structurel."

"La régulation, c’est plus ni moins qu’une fermeture"

Les élus locaux sont en tout cas vent debout contre cette régulation des urgences. "La régulation, c’est ni plus ni moins qu’une fermeture", affirme Alain Gueguen, maire de Plouguernével (Côtes-d'Armor) et représentant des Côtes-d’Armor au conseil de surveillance du CHRU Brest-Carhaix.

"Nous sommes dans un secteur hyper-rural, dans le pays du centre-ouest Bretagne. Sur 90 000 habitants, 25 000 sont vulnérables", détaille l'élu. "Au mieux, vous décalez votre besoin de soins, au pire vous y renoncez, et c’est toujours les plus vulnérables qui sont les premières victimes. Le 15, aux centres d'appels saturés, redirige les patients vers d’autres centres, eux aussi sous tension par manque de ressources humaines." 

L'élu costarmoricain demande des réponses pour proposer une offre de soins de qualité : "Nous demandons à bénéficier d’établissements de plein exercice, que les problématiques de santé non-complexes puissent être faites en proximité, sans emmener les plus vulnérables à plus de 50 kilomètres d’ici."

Depuis 2008, la bataille gagnée pour la maternité de Carhaix, on est toujours obligé de se battre pour des droits normaux des citoyens à la santé.

Christian Troadec

 Maire de Carhaix

Christian Troadec, maire de Carhaix, redoute les conséquences futures de cette régulation des services d'urgences. "Ça a un effet catastrophique sur l’ensemble des services qui sont en train de se vider les uns après les autres. Dans six mois ou un an, on dira qu’il n’y a plus personne à l’hôpital de Carhaix, c’est toujours la même technique."

Christian Troadec sera présent à la manifestation prévue lundi 4 septembre à 18h30 devant l'hôpital de Carhaix, à l'appel de l'intersyndicale. Un préavis de grève a également été déposé.

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