Ce mardi 26 mars 2024, plusieurs manifestations pour les retraites ont eu lieu un peu partout en France. Le 1er janvier dernier, les pensions de retraite ont été augmentées de 5,3%. Largement insuffisant pour Jean, un retraité brestois de 65 ans. Rencontre.
"Je suis révolté. On nous avait promis 1.200 euros (pour les carrières complètes, NDLR), on est loin du compte" assène Jean. Le retraité brestois a 65 ans, bientôt 66. Il a arrêté de travailler il y a trois ans seulement. "Je n'avais pas le choix, sinon je n'avais pas une retraite complète, soupire-t-il. Je vis avec 965 euros par mois, alors que j'ai commencé à travailler à 14 ans, pendant les vacances scolaires, dans une station essence."
Des promesses déçues
En cette journée du mardi 26 mars 2024, alors que des retraités organisent des manifestations un peu partout en France, lui se dit prêt à reprendre un emploi. "Je suis en discussion avec un transporteur brestois pour travailler deux, trois jours, peut-être une semaine par mois" explique-t-il.
Les différentes manifestations ne lui font ni chaud ni froid : "j'ai voté Macron en 2017 et 2022. Je savais que j'avais voté En Marche, mais pas en marche arrière. Il ne fallait pas le dire qu'il allait augmenter les petites retraites à 1.200 euros. C'est soit une promesse, un mensonge ou une tromperie."
La société se fout des vieux, à commencer par le gouvernement
JeanRetraité brestois
Le 1er janvier dernier, les retraites de base ont été revalorisées à hauteur de 5,3%. Largement insuffisant, selon Jean : "Moi, ça m'a fait 40 euros en plus par mois. J'en connais qui ont le double de retraites, ils en ont eu pour 80 euros. Ça crée des écarts entre les retraités. La société se fout des vieux, à commencer par le gouvernement."
Moins de 12 euros par jour
Chaque mois, une fois déduits le loyer de son appartement social (350 euros), "très bien, tout neuf", l'électricité, le gaz et les différents frais, il lui reste "400 euros, moins de douze euros par jour." Jean a déjà poussé la porte de plusieurs associations, comme les Restos du cœur, mais son dossier a plusieurs fois été refusé.
En fin de semaine, il a rendez-vous avec une assistante sociale pour constituer son dossier pour l'Allocation de solidarité aux personnes âgées. "J'ai aussi un peu d'aides au logement, mais avec les lourdeurs administratives, on ne demande pas et on reste comme ça. Et encore, moi, je maîtrise à peu près Internet."
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Pendant sa carrière, Jean a sillonné l'Europe pour livrer des marchandises à travers le continent : "Le seul pays que je n'ai pas fait, c'est l'Italie. J'ai fait des semaines à 70 heures, avec des horaires décalés. Je partais le vendredi matin pour l'Espagne, et j'arrivais le lundi matin, se rappelle-t-il. C'était moi le patron, je faisais de la route, je répondais au téléphone, je gérais cinq taxis, un fourgon et quatre salariés."
Mais en 2012, une agression pendant un trajet en taxi le contraint à fermer son entreprise. "J'ai travaillé toute ma vie, j'ai eu des accidents du travail, et aujourd'hui, ce n'est pas pris en compte, c'est dégueulasse, martèle-t-il. J'ai eu un sacré accident, trois ans de soins."
Mon seul loisir, c'est la télé
JeanRetraité brestois
En 2018, Jean reprend un emploi, celui de chauffeur dans un Ehpad brestois. Puis en juillet 2021, il décide de prendre sa retraite. "Ce n'est pas une retraite, c'est l'antichambre du cimetière, corrige-t-il. Le seul endroit où je vois du monde, c'est aux enterrements, mon seul loisir, c'est la télé. C'est triste."
Et aussi à la Cantoche, un restaurant solidaire brestois où les déjeuners lui coûtent 2,50 euros. "D'habitude, je supprime des repas, je vais à la Cantoche le midi, et une soupe le soir. Mais en ce moment, comme je n'ai pas touché ma retraite, je ne peux plus y aller, déplore-t-il. À une époque, on se faisait un petit restaurant par trimestre. Maintenant ce n'est plus possible."
Avec 1.200 euros de retraite, Jean aimerait bien "s'acheter une petite voiture, prendre du carburant, voir du monde et aller à la pêche à pied."