C'est la saison de ponte pour les goélands. Et comme chaque mois de mai depuis 1993, c'est aussi le début de la campagne de stérilisation des oeufs sur les communes du littoral breton. Cette espèce protégée est en fort déclin depuis 30 ans. Notamment dans les espaces naturels. Les effectifs sont passés de 61.000 couples à 30.000. Faut-il continuer à stériliser les oeufs ?
Chaque année au mois de mai, des cordistes montent sur les toits des villes côtières bretonnes pour stériliser les oeufs de goéland. Leur arme ? Un objet du quotidien présent dans chaque foyer : "L'huile d'olive, explique Julien Vanhulle, cordiste perché ce jour-là sur un toit de la ville de Brest dans le Finistère. On en met sur les oeufs et ça vient boucher les pores. Il n'y a plus d'échange gazeux avec l'oxygène extérieur. Le poussin meurt dans l'oeuf mais ça trompe le goéland qui continue à couver jusqu'à la fin de sa période de pondaison."
Lire : Stérilisation des œufs de goélands en ville : des drones appelés à la rescousse à Douarnenez
369 nids stérilisés
Une campagne qui a fait ses preuves depuis 1993, année de la première opération de ce genre à Brest. Les alpinistes ont un mois pour vérifier les 369 nids stérilisés en 2022. Dégradation de toitures, nuisances sonores, les griefs contre le goéland sont nombreux... Alors que la populaiton est en fort déclin.
"Comme ils sont toujours présents de manière importante dans le milieu urbain, les gens ont l’impression d’avoir affaire à une espèce toujours aussi abondante, voire plus abondante, alors qu’elle a fortement décliné, décrit Bernard Cadiou, ornithologue à l'association Bretagne Vivante.
A l’échelle de la Bretagne, les effectifs sont passés de 61.000 couples il y a 30 ans à moins de 30.000 couples actuellement
Bernard CadiouOrnithologue à Bretagne Vivante
Le gros du déclin s’est produit sur les sites naturels. "Il y a moins de nourriture facilement accessible, donc les goélands diminuent. Alors qu’en ville, notre civilisation du déchet continue à leur fournir de quoi manger tous les jours." A l'image de ces goélands lorientais qui se sont organisés pour voler les sandwichs à l'heure du déjeuner.
Nos poubelles, leur garde-manger
Pour l'ornithologue, il y a un véritable enjeu de sensibilisation du public et des riverains. "Il faut expliquer que si les goélands s’urbanisent, c’est parce que l’homme leur offre des potentialités d’accueil énormes. Les plaintes des habitants sont liées à notre comportement vis-à-vis de la gestion des déchets." Nous laissons trop de nourritures, de restes alimentaires, de déchets accessibles dans nos villes. Un véritable garde-manger.
"Les problèmes sont liés à l’homme, pas aux goélands. Eux ne font que s’adapter à une situation qui leur est favorable à un moment donné."
Aménagements urbains
Bretagne Vivante espère que ces campagnes de stérilisation ne soient plus automatiques et que d'autres pistes soient explorées. Car les solutions existent : "Il faut réfléchir à des aménagements de toitures qui ne sont pas favorables aux goélands, analyse Bernard Cadiou. Car construire des bâtiments neufs avec des toitures favorables aux goélands ne résout pas le problème."
Et côté déchet ? "Il doit y avoir une approche globale par rapport aux déchets, comme Brest le fait déjà : mise en place de conteneurs fermés, rappeler que les sacs poubelles, on ne les laisse pas traîner partout dans la rue car ils sont éventrés par les goélands. Nourrissez les poubelles, pas les goélands !" encourage l'ornithologue.
(Avec Amandine Plougoulm)