Bugaled Breizh. "On espère juste que quelqu'un parle et dise tout", la nièce d'un des pêcheurs disparus témoigne

C'est depuis Loctudy, dans le Finistère, qu'Elodie Gloaguen suit l'enquête anglaise sur le naufrage du Bugaled Breizh. Son oncle était l'un des cinq membres d'équipage du chalutier breton qui a coulé en moins d'une minute en 2004. Sa mère fut l'une des figures du combat pour la vérité.

Elodie Gloaguen a 8 ans quand le Bugaled Breizh sombre dans les eaux de la Manche, ce 15 janvier 2004. A bord, Patrick Gloaguen, son oncle et parrain. "Ce naufrage, ça a été mon quotidien à la maison, dit-elle. Mes parents m'en parlaient car j'étais une petite fille qui voulait savoir ce qui se passait". Sa mère, Nathalie, devient la porte-parole des familles des cinq marins qui ont péri en mer. Le corps de Patrick sera retrouvé dans l'épave au moment de son renflouement. "Nous n'oublions pas, lâche-t-elle, émue, je n'oublie pas. Nous pensons à nos morts, à nos marins".

"Qu'il parle, qu'il dise ce qu'il sait !"

Dix sept-ans après cette tragédie, restée inexpliquée, la justice britannique rouvre le dossier. L'inquest a débuté le 4 octobre à Londres. Si de ces audiences devant la Haute Cour n'en ressort aucune condamnation, il n'en reste pas moins que les familles, dont celle d'Elodie, espèrent que la vérité jaillira enfin. "Dites nous tout", réclame la jeune fille aujourd'hui âgée de 25 ans, tournant son regard vers Andrew Coles, le commandant du sous-marin anglais, HMS Turbulent. "Il sait forcément quelque chose, ce n'est pas possible autrement, ajoute-t-elle. J'attends beaucoup de son audition car, jusqu'à présent, il n'a pas dit grand chose".


Ce drame, il a bousillé plein de vies. Il y a eu des décès, des dépressions autour de nous. Depuis dix-sept ans, nous attendons. Nous en avons marre des mensonges

Elodie Gloaguen, nièce de Patrick Gloaguen, l'un des marins disparus


Le Turbulent est l'un des sous-marins soupçonnés par les familles et leurs avocats d'avoir accroché et fait couler le Bugaled Breizh. Andrew Coles se présentera à la barre ce mardi 12 octobre. "Qu'il parle, qu'il dise ce qu'il sait, demande Elodie Gloaguen. Nous avons besoin de la vérité pour avancer, faire notre deuil et nous reconstruire. Ce drame, il a bousillé plein de vies. Il y a eu des décès, des dépressions autour de nous. Depuis dix-sept ans, nous attendons. Nous en avons marre des mensonges".


"Nous ne sommes pas idiots"

L'inquest de Londres fait remonter la tristesse mais aussi la colère. "Je ne dors plus correctement depuis une semaine, raconte Elodie Gloaguen. Tout cela, aujourd'hui, c'est très compliqué pour nous". La jeune fille a repris le combat de ses parents. Sa mère est décédée en 2012. Son père est "usé". "Alors je parle en leur nom désormais car ils ont tellement donné et pendant tant d'années. Si ma mère ne s'était pas autant investie dans cette histoire, peut-être serait-elle encore là" interroge-t-elle. 


Pourquoi a-t-il falllu sept mois pour que le renflouement du chalutier ait lieu ? Il y avait forcément des choses à cacher, ils savaient forcément dans quel état était le bateau et pourquoi"

Elodie Gloaguen


Elodie raconte ses doutes, évoque la discussion toute récente avec son père sur ce qui se joue à Londres. "Nous n'y croyons plus vraiment à la justice, qu'elle soit française ou anglaise. Nous, nous espérons juste que quelqu'un parle, c'est tout". Elle ne s'est pas rendue dans la capitale anglaise pour assister aux débats, "pour raisons financières" explique-t-elle, mais elle les suit à distance. "C'est éprouvant d'entendre à nouveau qu'aucun sous-marin n'était sur zone. Pourquoi a-t-il falllu sept mois pour que le renflouement du Bugaled Breizh ait lieu ? Il y avait forcément des choses à cacher, ils savaient forcément dans quel état était le bateau et pourquoi".

Elodie Gloaguen a fini par connaître le dossier sur le bout des doigts. Du haut de ses 25 ans, elle ne cille pas quand elle demande la levée du secret défense. "Nous sommes peut-être des petits Bretons mais nous ne sommes pas idiots" martèle-t-elle. 
 
 

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