Finistère. La ferme aux 12 000 cochons validée par le préfet

Le préfet du Finistère a annoncé ce 9 novembre avoir signé l'arrêté régularisant l'extension d'une porcherie de 12.000 cochons à Landunvez. Une extension retoquée à deux reprises par la justice administrative et contestée par de nombreux riverains.

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" Depuis le 31 juillet 2019 cet élevage fonctionne sous l’empire d’une autorisation provisoire et qui est subordonnée à la mise en œuvre d’un certain nombre de conditions. Il fallait réaliser un certain nombre de travaux de lagunage, de réalisation d'un talus, de couverture des fosses à lisier. Ils ont été réalisés. D’autre part il fallait compléter un dossier pour qu'il soit soumis à un certain nombre d’avis, de la mission de l’autorité environnementale, de la commission d’enquête et avis du CODERST. Ce sont ces avis, et ces travaux, qui font que j’ai donné un avis favorable à l’extension de cet élevage"  a déclaré le préfet Philippe Mahé, lors d'une conférence de presse organisée ce jeudi 10 novembre à Quimper.

Vendredi dernier, le conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst) avait donné un avis favorable au nouveau dossier déposé par cet élevage baptisé Avel Vor ("vent de la mer" en breton).

Une instance de suivi de la qualité de l'eau

Plages fermées, eau dégradée, pollution de l'air... Les opposants dénoncent les multiples nuisances liées à cet élevage, qui viennent s'ajouter, selon eux, à celles des élevages voisins, dégradant l'environnement de la commune.

Sur le lien entre la pollution et les élevages, le préfet a répondu : "Il y a des origines diverses et personne de peut dire quelle est l’origine scientifique et décisive d’une pollution intervenue sur telle ou telle plage [...] on dit tout, mais personne n'a une parole éclairée. Ce que je veux c’est éclairer la parole et les habitants sur ce qui se passe sur le territoire".


En réponse aux inquiétudes des habitants, le préfet a annoncé la mise en place d'une "instance locale de suivi" de la qualité de l'eau sur ce territoire. "On me demande de la transparence, j’y suis prêt, on me demande des analyses poussées, j’y suis prêt, on me demande d’en tirer les conséquences, j’y suis prêt. Avec les autres, avec les élus, les éleveurs, la chambre d’agriculture. C’est ce travail que je souhaite mener simultanément à l’arrêté préfectoral.", a-t-il ajouté.

Avis défavorable lors de l'enquête publique 

L'enquête publique menée en 2015 avait émis un avis défavorable à cette extension. Mais le préfet de l'époque l'avait néanmoins autorisée en avril 2016.
Saisie par les opposants, la justice administrative a annulé l'arrêté d'extension en première instance et en appel, en 2019 et 2021. Mais la porcherie était alors déjà agrandie, produisant 27.000 porcs charcutiers par an dans une commune d'à peine 1.500 habitants, en vertu d'une autorisation préfectorale provisoire.

Les associations vent debout contre ce vent de la mer


"On se fout ouvertement de nous" a réagi mercredi Laurent Le Berre, président de l'Association pour la protection de la côte des légendes (APPCL).Selon lui, les associations vont boycotter l'instance de suivi de la qualité de l'eau proposée par le préfet, qu'il a qualifiée de "vaste plaisanterie".

"On va demander l'abrogation de ce nouvel arrêté qui est de toute évidence parfaitement illégal" a-t-il ajouté. "Des décisions de justice sont tombées, ce n'est pas normal de régulariser par derrière."

Les associations comptent aussi déposer plainte au pénal pour "mise en danger de la vie d'autrui".

Dans le pays du Léon, la production de cochons dépasse par endroit 3.000 porcs au km2. La Bretagne se place en sixième position européenne pour la taille de son cheptel porcin.

 

"27.000 cochons élevés avec vue sur mer"

"On n’est pas étonnés, déplore Arnaud Clugery, directeur d’Eau et rivières de Bretagne. C’est la continuité des 40 dernières années de cette complaisance vis-à-vis du lobby porcin breton. On a des préfets qui répondent aux injonctions du ministère de l’Intérieur et qui s’achètent une paix sociale en donnant toujours raison aux industriels qui portent atteinte au milieu naturel."

Pas étonné, mais agacé, le défenseur de l’environnement poursuit : "Cette décision, c’est le signe que l’on a un Etat qui n’a rien compris aux enjeux de l’époque. On devrait se trouver à la fin de quelque chose qui a été une aberration, le développement de ce type d’élevage, et le signal que le préfet envoie c’est qu’il n’a rien compris et puis à l’inverse, il donne un signal au monde économique qui est Allez-y, continuez comme avant. C’est open bar en fait !"

Arnaud Clugery constate que depuis des années, le développement de l’élevage industriel a fonctionné ainsi. "Les éleveurs s’agrandissent, la justice condamne, mais ensuite, les préfets régularisent. C’est pour cela qu’on a 120 millions d’animaux en Bretagne."

Le directeur d’Eau et rivières de Bretagne ne croit guère au futur comité de suivi sur l’eau. "C’est un comité surprise sorti de sa poche, parce qu’il sent qu’il y a une grosse pression, mais je ne pense pas que ça change la face du monde. L’Etat sauve la face et propose des autocontrôles parce que les services de l’Etat n’ont plus les moyens de réaliser les contrôles. On va donc avoir des gens de ce comité dont l’ambition est de permettre de continuer à produire toujours plus et on va amuser les associations de protection de la nature en leur soumettant de temps en temps des autocontrôles, c’est un peu navrant cette réponse de l’Etat."

Et il conclut, "ce qui est choquant dans ce dossier, c’est qu’on fait prendre des décisions, qui vont peser sur les générations futures parce qu’elles vont produire des effets délétères dans 20 ou 30 ans, par des gens qui ne seront plus là… Ce devrait être des jeunes de 20 ans qui tranchent."

 

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