Depuis 6 ans, la prolifération des algues vertes en baie de Morlaix (Finistère) inquiète les ostréiculteurs mais cette année, "c'est du jamais vu". Malgré les efforts pour nettoyer les parcs à huître, les pertes pourraient monter à 40%. Avec le concours d'associations, des analyses et des recours en justice sont entrepris.
"Si on laisse la verdure, les huîtres crèvent." Dans la baie de Morlaix, les algues vertes prolifèrent et étouffent les coquillages. Depuis quelques mois, 30 centimètres d'algues viennent tapisser les fonds marins. Dans l'exploitation ostréicole de Jacques Cadoret, un bateau passe quotidiennement pour tenter de les enlever.
Entre 30 et 40% de perte
Ses naissains sont semés et élevés au sol, de manière traditionnelle. "Avec une herse ou un tapis de chaînes, on vient remuer le fond, explique-t-il. Mais ce n'est pas une solution car on abîme les sols et les huîtres. Même sur les poches, on doit passer des râteaux pour enlever les algues fixées dessus."
Malgré ses efforts, il y aura de la perte. Entre 30 et 40%, estime-t-il.
"Déjà l'année dernière, ce n'était pas folichon, raconte une ostréicultrice de la baie. Mais cette année, c'est du jamais vu. C'est une catastrophe avec de très grosses difficultés pour récolter." Cela fait maintenant 6 ans que la situation se dégrade.
"Un fléau pour les ostréiculteurs"
Jacques Cadoret a pris contact avec l'association Eau et Rivières de Bretagne. "On va faire des prélèvements aux quatre coins de la baie et on va faire analyser les algues en septembre pour tenter de savoir d'où ça vient. Ensuite, on portera plainte."
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"C'est un fléau pour les ostréiculteurs, constate Yves-Marie Le Lay, de l'association Sauvegarde du Trégor Goëlo Penthièvre, qui lutte depuis des décennies contre les marées vertes du côté de la baie de Saint-Brieuc. Les naissains sont asphyxiés par la présence des algues vertes. Elles engendrent des dommages environnementaux quand elles pourrissent mais aussi sans pourrir en privant d'oxygène les milieux marins."
Masque à gaz
Cet été, vous aurez peut-être l'occasion de le croiser avec son masque à gaz, aux côtés de Jean-Yves Quéméneur, de l'association Force 5. Ils ont décidé d'aller prélever des échantillons de vase et de sable sur tous les sites touchés par les algues vertes.
"On va établir et faire des constats du préjudice écologique lié à la putréfaction des algues, développe Yves-Marie Le Lay. On ira sur tous les sites avec des impacts réels et sérieux sur la biodiversité dans le département du Finistère."
Une fois les dégâts constatés, les associations porteront plainte devant les tribunaux administratifs mais aussi au pénal devant le tribunal judiciaire de Brest, responsable des atteintes à l'environnement.
Appel aux citoyens
Dans les Côtes-d'Armor, une première victoire a été remportée à ce propos. Le préjudice écologique a été reconnu par la justice administrative. Si l'État fait appel de la décision, le message reste encourageant pour les associations. "On fera un recours systématique auprès du tribunal administratif pour reconnaître le préjudice écologique et imposer aux autorités de le réparer dans un délai de 4 mois."
"On ira dans la baie de Morlaix pour montrer que là aussi il y a des échouages d'algues et qu'il y a des conséquences sur la biodiversité. On en appelle aux citoyens pour qu'ils nous signalent les sites qu'on ne connaît pas."
Les associations souhaitent ainsi s'investir d'avantage dans le département pour mettre une plus grosse pression sur l'État.